David Hallyday en concert avec des titres revisités de son père et de son propre répertoire
Ressentez-vous une pression avant cette tournée ?
Oui, mais je ne l'appréhende pas. J'adore la pression, elle me booste, me porte, me transcende. Je vois les choses de façon positive. Elle m'a toujours réussi. C'est là que je performe le plus. Je ne suis pas nonchaland, ni trop relaxe... Je suis concentré sur mon challenge, sur une idée qui m'est venue naturellement. Ce projet a une saveur particulière, car les titres de mon père font partie de mon ADN. Je me suis laissé entrainer sans l'avoir prémédité. Un jour, j'ai retravaillé une de mes chansons "high", puis Ooh La La, pour le fun.
C'était très amusant. Je m'interrogeais si des radios oseraient passer des versions modernes. À la base, je ne suis pas très fan des reprises, car les réussites sont rares. Je me suis lancé ce défi de rassembler les titres de mon père et les miens. Bizarrement, c'était plus difficile de faire une nouvelle version de mes chansons que de celles de mon père. J'espère que les fans de mon père apprécient les nouvelles versions de mon père. J'ai été élevé dans la transmission même si je touche à quelque chose de sacré.
Avez-vous peur d'être déstabilisé, sur scène, par l'émotion ?
Le live, c'est aussi fait pour perdre le contrôle, se lâcher sans avoir peur de ça. Oui, je pense qu'il y aura certains titres qui vont me prendre les tripes. Le spectacle, c'est cette magie de ressentir des émotions, de partager avec le public. C'est magique, émouvant. Je me laisse de luxe de ne pas anticiper et de vivre ce qui peut se passer. Moi-même, j'aime assister à des spectacles qui ne sont pas robotiques, mais humain... Sur scène, je vais aussi raconter des anecdotes, parler au public et il y aura des surprises... Ma Mère (Sylvie Vartan)? Peut-être (il rit). Sur Paris, j'aurai des invités sur scène.
Vous semblez sensible aux textes ?
Oui, la sélection des titres s'est aussi construite sur des thématiques auxquelles je suis sensible. Par exemple, mon titre "père de personne", m'est venu d'une conversation avec lui sur le divorce et la paternité. Lors de ma séparation, j'ai passé un mois chez lui, on a discuté sur cette situation. C'était enrichissant même si nous n'avions pas le même point de vue sur ce sujet. Un artiste a la chance de pouvoir écrire ce qu'il ressent, et des textes sur des thèmes universels, qui finalement touchent les gens qui ne sont pas différents de nous, qui vivent des émotions sur le sujet de la famille, de l'amour, de la trahison, de la justice...
Comment avez-vous choisi les titres de cet album ? J'ai réécouté les versions originales du répertoire de mon père, d'une carrière de 50 ans. La sélection a été difficile, car il a réalisé énormément de tubes. En écoutant, je me suis facilement projeté sur ce que je pouvais faire de certains titres, d'abord musicalement. Puis, j'ai retiré tout le côté symphonique des chansons de mon père. J'ai beaucoup testé de nouvelles versions en amenant autre chose, des sons plus moderne... J'ai apporté ma vision de la musique tout en proposant des choses taillées pour la scène. Parfois, c'est passé "crème" dès le premier essai, parfois, je m'y suis repris à 3/4 fois avant d'être satisfait. Par exemple, "Derrière l'amour" a été très facile à retravailler avec mes idées, avec un côté rock, plus scénique. Je sais que mon père aurait adoré cette version, car il y a des gros "riff" de guitare. Certaines chansons ont plus été changées que d'autres sur la version initiale, comme Laura.
Quant à "Mirador", je l'ai chanté en anglais et mon père l'a reprise en français. Il a été numéro un avec ce titre ! J'ai été fier. Je la propose donc en version mixte dans l'album. J'ai aussi revisité le titre "Laura" et ma sœur (Laura) a adoré cette version que je chante pour elle, à la place de notre père. On avait fait un duo ensemble "On se fait peur" au moment où elle traversait un moment difficile avec un emballement médiatique. Je lui avais proposé un projet créatif lui permettant de s'affranchir de cette période. C'était génial de bosser ensemble.
Sang pour sang reste le titre phare... Douloureux ?
Cette chanson bouleversante a été une thérapie pour moi... Et pour mon père. C'est aussi l'album qu'il a le plus vendu. Il était réticent à chanter ce titre, il était sur la réserve. Il n'avait pas bien perçu le sens de ce texte. Il pensait que cela pouvait nuire à son image, de chanter l'absence d'un père, et de celui qui n'a pas été celui qu'il aurait voulu être pour son fils. Je lui ai bien développé le sujet et il m'a dit "ah oui, c'est profond".
Cette chanson est un beau message, il y a une forme de pardon, de deux hommes qui finissent par se comprendre enfin. En fait, je me suis inspiré du texte de Kipling "tu seras un homme mon fils", que j'adore. Le message de Sang pour sang, c'est "un jour, tu comprendras pourquoi". Et j'ai dit un jour à mon père, j'ai compris pourquoi. Dans le clip Sang pour sang, la symbolique, c'est d'avoir réuni mon père, mon fils et moi, trois générations, dans cette salle de billard, aujourd'hui désaffectée, où j'affrontais mon père. Mais le premier titre qui m'est venu dans mon projet, c'est Requiem pour un fou qui annonce bien la suite de l'album.
Avez-vous eu des moments d'émotion lors de vos répétitions ?
Il y a eu énormément de moments forts. J'ai eu du mal à terminer Je te promets en piano-voix. C'est une magnifique chanson d'amour. Durant deux ans, lorsque nous étions en studio, je me suis posé la question sur chaque titre. Est-ce que mon père aurait aimé cette version ? Je le connaissais musicalement évidemment bien. Est-ce qu'il a été au bout de ce qu'il voulait faire ? Car il lui fallait s'adapter au paysage musical français différent du style anglo-saxon. À part le blues, qu'il a adoré, a-t-il été au bout de ses envies ? Cet album et les concerts vont peut-être permettre au public de vouloir redécouvrir, ou même de découvrir, et ce serait génial, les versions originales de mon père. Comme "derrière l'amour". J'ai la sensation qu'il m'a accompagné tout au long des répétitions.
Plus de cent dates de concerts, comment vous êtes vous préparez ?
Je suis prêt toute l'année, car je fais du sport constamment. J'adore le sport, surtout en plein air. J'ai un coach. Je m'entraîne physiquement, régulièrement, j'ai du cardio... Je fais toujours de la compétition automobile. Je m'astreins à une bonne hygiène de vie, je suis un régime, je suis vigilant sur les quantités et je prends des compléments alimentaires pour booster mon immunité en cette période hivernale. Je repose aussi ma voix, je dois protéger mes organes vocales. Je suis un très mauvais dormeur, mais j'essaye, en ce moment, de changer cette habitude.
Quels sont vos projets ?
Je vais tourner une série en 2025. J'ai tourné récemment dans Capitaine Marleau. Cela m'a redonné envie de faire de la comédie. J'avance également sur un projet autour du cinéma, au Portugal, sur lequel je bosse depuis neuf ans. J'ai formé une équipe pour créer toute une industrie. C'est un énorme truc sur 70 hectares, au sud de Lisbonne, à 25 minutes. L'idée consiste à réaliser le plus grand studio de cinéma d'Europe, le premier au monde à être écoresponsable, à énergies renouvelables. C'est un autre projet de vie. Il pourrait voir le jour dans les trois ans.
Propos recueillis par Thierry Delaunay