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Agriculture : les traités de libre-échange, coupables (trop) faciles de la crise

A problème épineux, solution simple. Triste réflexe. Alors que la crise agricole qui couvait depuis des mois éclate au grand jour, la conversation médiatique s’est trouvé un coupable idéal : le libre-échange. Ou plutôt cette kyrielle d’accords bilatéraux signés au cours de la dernière décennie entre l’Union européenne et le Canada, le Japon, la Nouvelle-Zélande, le Chili ou encore le Vietnam… Plus jamais ça, martèle aujourd’hui le nouveau locataire de Matignon qui claironne que la France s’opposera à la signature du traité du Mercosur, en discussion depuis 2019 et qui doit libéraliser les échanges - sous certaines conditions - entre l’Europe et les poids lourds d’Amérique Latine.

Si l’Europe a longtemps péché par naïveté et dogmatisme, le libre-échange n’est cependant pas à la source de tous nos maux. Et notamment ceux des agriculteurs français. Un exemple : le Comprehensive Economic and Trade Agreement (Ceta), l’accord signé entre l’UE et le Canada à l’automne 2016. A l’époque, même crainte d’une partie du monde agricole redoutant alors une invasion de bœufs aux hormones canadiens. La déferlante n‘a pas eu lieu. C’est même l’inverse qui s’est produit puisque depuis la signature du fameux accord, les livraisons européennes de produits agricoles vers le Canada ont bondi de 68 %. Avec deux grands gagnants, le secteur des vins et des spiritueux, et celui des produits laitiers.

Les statistiques sont têtues. En réalité, sur les quinze dernières années et alors que ces traités bilatéraux se multipliaient, l’excédent commercial européen dans le domaine agricole s’est considérablement accru. A une exception près, la France, qui n’en a guère profité. Pire, le solde de la balance agricole tricolore avec le reste des pays de l’Union européenne est même devenu rouge carmin. Comme si la "Ferme France" avait perdu du muscle comparativement à ses voisins - et concurrents - européens, alors même que le pays reste le premier récipiendaire des aides de la politique agricole commune (PAC).

En cause, cette PAC qui au fil des réformes est devenue de moins en moins commune. Sa dernière mouture permettant une forme d’adaptabilité des règles et des objectifs selon les pays a même accentué une forme de concurrence déloyale au sein même de l’Union. Et voilà les fraises et tomates espagnoles hypercompétitives déferler sur nos étals, comme le porc néerlandais, le poulet polonais ou la pomme de terre belge… Paradoxalement, ce n’est pas moins d’Europe qu’il faut pour l’agriculture française, mais plus et surtout mieux d’Europe.

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