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Dans les pas du photographe Michel Chadeyron, phénomène de librairie à Ussel

« 7 heures n’a pas encore sonné au clocher de l’église. En ce jour de mars 1964, Michel Chadeyron passe autour de son cou le Rolleiflex et le Hasselblad, fourre quelques pellicules noir et blanc dans les poches de son blouson, coiffe son béret et sort dans la rue Séclide » (1).

Pendant plusieurs années, Verena Feola a travaillé, aux Archives départementales, sur les milliers de clichés de Michel Chadeyron, retrouvés à sa mort dans son atelier ussellois. Toute sa vie, il a pris sa ville et les environs en photo, sous tous les angles, par tous les temps. Elle le raconte à son tour dans quatre fascicules édités par les Archives départementales. « À force de regarder les négatifs, sur la table lumineuse en plus, on ne peut pas ne pas s’attacher. On finit par prendre sa place, par prendre l’œil du photographe », sourit Verena Feola.

Michel Chadeyron vit au rythme de la ville, ils sont sur le même souffle.

Chadeyron, phénomène d'édition

Michel Chadeyron était une vedette à Ussel ; les quatre fascicules sont devenus, sitôt parus, un phénomène de librairie. « Toute la journée, on vient nous en demander, raconte Myriame Michielin, à la librairie MymyLibri. Ça a déchaîné les passions ! Les tomes 1 et 2 surtout. Tant qu’on avait des exemplaires, c’était génial, les gens ont raconté des anecdotes ; tout le monde a quelque chose à dire avec Michel Chadeyron, c’était la star d’Ussel ! D’ailleurs quand ils seront réédités, peut-être qu’on pourrait organiser des ateliers de recueils de souvenirs… »

Elle poursuit : « Ces fascicules peuvent aussi servir pour le tourisme, parce qu’en fait, on n’a pas de livre sur Ussel à proposer aux touristes. Toutes ces photos racontent aussi un moment de l’histoire de la ville, tous ces petits métiers et la ruralité étaient encore prégnants au cœur de la ville. »

 

« Obnubilé par son matériel, il en effectue déjà les réglages. Il remonte par la rue des Sans-Culottes jusqu’à la place Joffre. La Marie est déjà descendue de la Borde, menant son cheval blanc prudemment, pour livrer son lait aux femmes qui l’attendent sur le pas de leur porte ».

Tous les jours, il sort dans la ville avec ses appareils. Pour ses essais techniques, il allait souvent près de chez lui. Il l’aime profondément, ce centre-ville où il vivait, pour en photographier tous ces détails et il a envie de témoigner des changements qu’il vit.

« Mon travail, reprend Verena Feola, ce n’était pas seulement d’identifier des photos, mais qu’elles vivent. Un monsieur, par exemple, a retrouvé ses parents sur une photo, il m’a demandé pourquoi je les avais choisis… Je ne me suis pas attachée à la réussite technique du cliché, mais à ce qu’il raconte. J’ai focalisé sur les évolutions de la ville et sur des vues du quotidien, emblématiques d’une époque. »

Un photographe de rue qui ne rate rien 

« C’est un formidable photographe de rue, c’est peut-être les derniers moments où l’on pouvait le faire. Il est peut-être moins sur l’humain, d’ailleurs il s’est parfois un peu imposé, parce qu’il était dans l’obsession de ce qu’il cherche ; il traque ce qui va changer. »

Avec ses photos, Michel Chadeyron ne roule pas sur l’or. « Quelques-unes sont des commandes, il a travaillé aussi pour le syndicat d’initiative. À la marge, ils en vendaient dans sa boutique. Il en a distribué pas mal aussi. L’essentiel, il les fait à fonds perdu. » Un ouvrier qui sort une pelle, le coq de l’église qui est descendu, il y va ! « Il vit au rythme de la vie, ils sont sur le même souffle. »

« Le quotidien, le naturel, l’instantané sont les maîtres-mots de son existence. Cet après-midi, il demandera à son ami André de l’emmener en voiture sur les routes de campagne alentour. » 

(1) Déambulation écrite par Verena Feola.

Il reste quelques coffrets complets et quelques tomes 3 et 4 disponibles aux Archives départementales. Une réédition est à l’étude.

Blandine Hutin-Mercier

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