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Le retour d’Oasis est-il vraiment une bonne nouvelle ?

Et ce qui devait arriver arriva. Quinze ans, presque jour pour jour, après le split retentissant d’Oasis dans les loges du festival Rock en Seine en 2009, et trente après la sortie de leur premier album, Definitely Maybe, les frères Gallagher ont annoncé cette semaine la réunion du groupe à l’été 2025. Soit 17 dates, au Royaume-Uni et en Irlande, dont cinq à Heaton Park (Manchester) et autant à Wembley (Londres). Un communiqué publié deux jours après l’annonce mettait les choses au clair : Oasis ne fera ni Glastonbury ni aucun autre festival ailleurs dans le monde. Laconiquement baptisée “Oasis Live ’25”, la tournée des frérots aurait ainsi pu être affublée du sous-titre “Bringing It All Back Home”.

Comme on pouvait s’y attendre, la nouvelle a fait le tour du monde. De la presse spécialisée au JT de 20 heures, tous les médias (dont Les Inrocks évidemment) y sont allés de leur petite pastille sur la rivalité légendaire entre Liam et Noel avec Don’t Look Back In Anger en fond sonore, soulignant à quel point l’événement d’une telle reformation était historique. Fébriles, les fans autant que les auditeur·rices occasionnel·les sensibles aux mythes et aux récits du rock’n’roll circus se sont largement mobilisé·es sur les réseaux sociaux pour manifester leur enthousiasme. Des fans dont une partie, sans coup férir, s’est allégrement défoulée sur les quelques voix dissidentes venues soi-disant gâcher la fête, sous prétexte d’avoir voulu questionner l’engouement suscité par cette nouvelle.

A champagne supernova in the sky

Il n’est pas question ici de cracher dans la soupe, il y a de grandes chances pour que l’auteur de ces lignes se retrouve à un moment au premier rang d’un futur concert d’Oasis, braillant de façon approximative les paroles qui ne veulent rien dire de Champagne Supernova. Il demeure néanmoins nécessaire de penser un peu contre soi et de mettre en perspective les ressorts essentiellement nostalgiques qui nous animent à l’heure où, selon les estimations de l’université de Birmingham rapportées par le Guardian, les “frères pétard” de la Britpop s’apprêtent à encaisser près de 50 millions de livres chacun pour une poignée de concerts.

Première réflexion : depuis 2009, on n’a entendu personne réclamer un nouvel album d’Oasis. Preuve que tout le monde se fout de ce que le groupe a à raconter, pourvu qu’il nous livre un show best of qui viendra tirer sur la corde sensible en répondant à nos désirs avides de consommation mémorielle. Désirs déjà largement assouvis lors des concerts solos de Liam, faisant la part belle aux compos des Mancuniens. Deuxième réflexion : est-il souhaitable de réparer l’injustice d’avoir raté un groupe sur scène du temps de sa période d’activité en se précipitant à sa réunion opportuniste ? La réponse est non. La plupart des gens ont bien raté les Beatles. Aller voir Oasis en 2025 relève plus de la bucket list que du voyage ; c’est un peu comme faire la queue pour se prendre en selfie à Santorin, avec les toits du village de Fira et la mer bleue comme toile de fond.

Révolutions ?

Enfin, il est urgent de lire le papier Stop the celebrations – Oasis are the most damaging pop-cultural force in recent British history, du journaliste Simon Price, du Guardian, dans lequel il revient sur les aspects très conservateurs du succès du groupe, à une époque, les années 1990, en prise avec diverses révolutions musicales et sociétales, dont on perçoit aujourd’hui les lignes de partage dans un Royaume-Uni sans cesse à la lisière de l’insurrection. D’ailleurs, combien de groupes outre-Manche se réclament plus d’Oasis que de Massive Attack en 2024 ? Pas de quoi gâcher la fête !

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