Quel gouvernement après le 7 juillet ? Les trois scénarios secrets sur la table de Macron
Au milieu de la brume, la lumière de la certitude : quoi qu’il advienne, il faudra, tôt ou tard, composer un gouvernement. Emmanuel Macron le sait, tout comme il sait que figer dès aujourd’hui ses choix n’aurait aucun sens tant l’issue du scrutin du 7 juillet s’annonce imprévisible. L’heure est aux tentatives, aux ballons d’essai, à la liberté offerte aux uns et aux autres, conseillers d’hier, amis d’aujourd’hui, de réfléchir et d’échafauder des plans. Pour être sûr d’avoir sous les yeux l’étendue la plus vaste des possibles, le président sollicite, réclame des notes et élargit ses cercles. Une seule consigne, que les idées avancées exhalent l’apaisement et la modération, à l’heure où les extrêmes étendent et consolident leur assise.
La tempérance a-t-elle un nom ? Voire plusieurs - ce serait mieux ? A cette question, dans l’entourage du président, certains répondent par l’affirmative et citent, par souci d’égalité, un homme de gauche et un homme de droite. Un tandem, presque, que pourraient constituer à les entendre l’ancien ministre des Affaires étrangères Michel Barnier, et l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, incarnations parfaites de ces "républicains de sensibilités diverses qui auront su, par leur courage, s’opposer aux extrêmes", évoqués par le chef de l’Etat dans sa "Lettre aux Français". "Ce sont des figures capables en temps de coalition de rassembler des gens pas forcément d’accord entre eux, dit-on à l’Elysée. Des figures d’autorité, connues, modérées, capables de réunir les socialistes et les Républicains." Les intéressés ont-ils été sondés ? "Jamais", répond Cazeneuve. Ce qui n’empêche pas des stratèges macronistes de les imaginer se partager Matignon et un ministère régalien, l’Intérieur ou les Armées. Qu’importe la révolution promise en 2017, quand le pays est face à un tel chambardement, demain peut bien commencer hier.
Un scénario à la belge ?
A moins que demain sonne l’heure d’une coalition moins politique : celle des techniciens. C’est en tout cas l’idée que défendent ceux - dont l’ancien ministre de l’Agriculture Julien Denormandie - qui croient aux vertus émollientes pour le pays d’un gouvernement "technique". Ainsi, devant les politiques, devant les journalistes, des proches du président font mine de s’interroger sur la pertinence de la nomination du gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau à Bercy, ou encore sur celle de l’ancien procureur François Molins à l’Intérieur. Et pourquoi pas l’ancien ambassadeur Gérard Araud aux Affaires étrangères ? "Absurdité, pique un observateur, ami sévère du chef de l’Etat. Sortir du marasme suppose des décisions fortes, on ne les prend pas sans majorité."
Reste une dernière hypothèse que tous, à l’Elysée et à proximité, ont étudié : devenir belge… et attendre. Plus précisément, s’inspirer du modèle de gouvernement d’affaires courantes - qui n’est rien d’autre qu’un gouvernement intérimaire - existant en Belgique en cas de dissolution ou lorsque le gouvernement est démissionnaire, et l’appliquer à la France. Pour cela, certains autour du président de la République imaginent avoir recours à "un gouvernement minimal" composé de personnalités indépendantes, seules capables d’expédier les affaires courantes sans être soupçonnées de vouloir en profiter pour faire de la politique. Le tout pendant un an, durée incompressible avant que s’ouvre la possibilité d’une nouvelle dissolution. Ce scénario présente un avantage évident pour Emmanuel Macron : le voilà assuré de conserver sa position en surplomb, privé également de cette concurrence qui le tracasse et d’un Premier ministre "horizon 2027". Idéal ! A moins que les futurs sollicités trouvent peu d’intérêt dans ces postes de ministres fantômes.
En attendant qu’émergent les évidences, Emmanuel Macron répète, comme pour se convaincre : "Il fallait dépressuriser." L’heure du doute attendra aussi la fin des législatives.