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Tour: Cavendish le cabochard joyau de la couronne cycliste

Et encore « une nouvelle fois » de plus sur cette 111ème édition du Tour de France…


Très probablement, un de ses ancêtres ne peut qu’être le célèbre corsaire homonyme[1]… En filou flibustier des lignes d’arrivée, le cabochard mais sympathique Mark Cavendish, natif de l’île de Man, située en mer d’Irlande à égale distance de la Grande Bretagne et de l’Irlande, d’à peine 572 km2, que rien ne prédisposait dans son enfance à devenir coureur cycliste, s’est imposé  pour la 35ème fois sur le Tour, mercredi, à Saint Vulbas (Ain), bien entendu au sprint puisque c’est sa spécialité. Il bat du même coup le record des victoires d’étapes qu’il partageait avec Eddy Merckx (voir notre encadré en fin d’article), dit le Cannibale tellement celui-ci était insatiable de podium et surtout de la première marche.

De plus ce succès, qui semblait pour la plupart des chroniqueurs de la geste vélocipédique inatteignable, a pour lui une douce saveur de revanche. Il a devancé le Belge Jasper Philipsen de 13 ans son cadet, sans doute le sprinteur contemporain le plus affûté, qui, l’an dernier, à Bordeaux, l’avait privé justement de ce record. Cavendish avait fait second derrière lui. Le lendemain, de cette déception, le 8 juillet, il chutait lourdement à 60 km de l’arrivée de l’étape Libourne-Limoges dont la victoire était à sa portée.

Touché à la clavicule, il abandonnait les larmes aux yeux. Son rêve d’être l’unique détenteur de ce record, joyau de la couronne cycliste ;  le monde du vélo a bien des parentés avec l’Ancien régime avec ses rois de la Montagne, du Contre-la-montre, des Sprints, ses ducs, les capitaines de route, ses barons, les protecteurs du leader, et ses valets, les porteurs d’eau (dits les « gregario » en italien – les grégaires en français), qui descendent à la voiture du directeur sportif s’approvisionner en bidons pour étancher la pépie du reste de l’équipe.

La retraite attendra

Le 23 mai 2023 alors qu’il participait au Giro, à l’issue de la deuxième étape, il avait annoncé son intention de prendre sa retraite à la fin de la saison. Donc ce 110ème Tour auquel il allait s’aligner serait son dernier. Mais, au terme de celle-ci, au lieu de confirmer son retrait, il se ravisait : à la surprise générale, il révélait qu’il allait revenir sur la Grande boucle avec la ferme détermination de monter à l’abordage du record des victoires d’étapes.

Pourtant ce retour sur le Tour, sa 15ème participation (trois de moins que le record des 18 détenu par le Français Sylvain Chavanel), avait commencé pour lui sous les pires auspices. Dès l’entame de la première étape dont le départ a été donné à Florence, à la première bosse, il décrochait et terminait à l’agonie, entouré de ses équipiers, à près de 40 mn de Bardet, le vainqueur à Rimini ; rebelote le lendemain, avec 25 mn de retard, il évitait de justesse l’élimination ; à l’arrivée à Turin, il ne participait même pas au sprint massif remporté par l’Erythréen Girmay, le premier Africain noir à gagner une étape[2] ; pour les commentateurs, il ne faisait plus le moindre doute : la « boule de nerf » ainsi que L’Equipe l’avait qualifié était émoussée, le record n’était plus à sa portée ; à la 4ème étape, celle du col du Galibier, il franchit la ligne avec 36 bonnes minutes de débours, échappant de peu au couperet des délais.

Bilan, en quatre jours, il accuse un retard de 1h37’50’’, et se retrouve 170ème au général, devançant de quatre places la « lanterne rouge » (dernier), son dévoué serviteur, son chien de garde, le Danois Michael Morkov.

Il se faufile parmi les grosses cuisses

Puis, miracle à la relative courte 5ème étape, 177,4 km entre Saint-Jean-de Maurienne Saint-Vulbas, à 39 ans et 41 jours, ce qui fait de lui le second plus âgé du peloton, et celui qui cumule le plus de participations, le bougon et inusable « Cav », comme il est surnommé dans le milieu, recouvre l’explosivité de ses jeunes années, au point même de faire sauter sa chaîne et son dérailleur juste en franchissant la ligne avec une bonne longueur d’avance sur le second. Dès lors, on peut se demander si sa galère du début n’a pas été à la fois un cirque pour leurrer ses rivaux et une tactique pour s’économiser. Le vélo, comme la guerre, c’est l’art de la roublardise.

Il a mené son sprint en main de maître. Son équipe a monté son train à une bonne dizaine de kilomètres de l’arrivée et s’est maintenue aux avants postes pour l’amener aux 300 mètres. Le train consiste à se mettre tous les coureurs de l’équipe en ligne pour lancer le sprinteur en s’écartant les uns après les autres. Le dernier à s’écarter est appelé le poisson pilote dont la tâche est de propulser son sprinteur à l’approche des 100/150 m. Or, d’après les vues d’hélicoptères, Cavendish avait perdu le sien aux 300/400 mètres, se retrouvant enfermé dans la meute des « grosses cuisses » (nom donné aux sprinteurs). Logiquement, il était piégé mais, en habile héritier de ses débuts en course de vitesse sur la piste, avec une audace téméraire, il a su se faufiler entre les roues de ses adversaires à l’instar d’une souris qui fuit, se rabattre de la droite de la chaussée sur la gauche pour fermer la porte le long des balustrades et mettre une, deux, trois longueurs à ses suivants. Un cas d’école, ce sprint…

Cavendish a débuté sa carrière sur les vélodromes. Le cyclisme sur route était peu pratiqué à cette époque en Grande Bretagne. Il sera même deux fois champion du monde en Américaine (2005 et 2008 en équipe notamment avec Bradey Wiggins, premier Anglais à gagner le Tour de France en 2012). En 2005, il s’essaie à la route. Il remporte dès cette première année 11 victoires, un record pour un débutant professionnel.

Sa première étape sur le Tour, il l’a gagnée le 9 juillet 2008 à Châteauroux. En tout, il en capitalise 55 sur les trois Grands tours (France, Italie et Espagne), probablement un record aussi. Il fait aussi partie de ce club très fermé des 25 coureurs qui ont revêtu le maillot de leader dans les trois Grands tours. Il cumule en tout 168 victoires, toutes au sprint ce qui fait de lui le meilleur de cette spécialité qui allie subtilité et brutalité. Les grands sprinteurs sont des trompe-la-mort. À plus de 70km/h, ils foncent sans protection hormis celle du casque coude-à-coude vers une victoire qui leur échappe souvent. Gagner un sprint, c’est un orgasme…

Le record de Cavendish a éclipsé deux événements de cette 5ème étape. Pour la première fois, un coureur Africain noir, Biniam Girmay, vainqueur déjà pour une première fois d’une étape du Tour à Turin, lundi, a revêtu mercredi le maillot vert du classement aux points grâce à une 9ème place. Son ambition est de rallier Nice, arrivée du Tour, avec… Ce qui serait une première fois historique : un Noir en vert… L’autre événement, c’est Pogacar, détenteur du jaune et grand favori, qui a évité de justesse une chute qui aurait pu avoir de lourdes conséquences pour lui, voire provoquer son abandon. Dû à un moment d’inattention, il a failli de très peu heurter un panneau de signalisation placé en l’entrée d’un plot situé au milieu de chaussée. Pour l’esquiver, il a fait un écart qui a entraîné la chute, sans gravité, de cinq coureurs qui étaient dans son sillage… Est-ce le signe prémonitoire que la chance est avec lui, que le mauvais sort l’épargnera ?… 


Le record des victoires d’étapes sur le Tour de France qu’a établi mercredi Mark Cavendish a une particularité : il les a toutes gagnées
au sprint à la différence de tous autres coureurs qui figurent au palmarès. Ce qui fait de lui l’incontestable meilleur sprinteur de tous les temps. Son record risque fort de tenir très longtemps. Il paraît même la durée des carrières de plus en plus courtes éternel.

Voici la liste des plus nombreux vainqueurs d’étape.
1- Marck Cavendish : 35
2- Eddy Merckx : 34
3- Bernard Hinault : 28
4- André Leducq (vainqueur du Tour en 1930 et 32) : 25
5- André Darrigade (le Cavendish des années 50/60) :22
(…)
9 – Jacques Anquetil : 16
(…)
12 – Tajed Pogacar : 12 (pour le moment)

    


[1] Thomas Cavendish (1560-1592), intrépide corsaire anglais, surnommé Le Navigateur, le troisième marin avoir réalisé une circumnavigation autour du monde après celles, la deuxième de Francis Drake (1540-1596), et de la première de Magellan-Elcano. Il est aussi le premier corsaire à avoir arraisonné le prétendu imprenable Galion de Manille qui ramenait de fabuleuses richesses de toutes sortes des Philippines au Mexique, deux possessions espagnoles.

[2] https://www.causeur.fr/tour-de-france-biniam-girmay-richard-carapaz-286753

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