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Un gouvernement des "affaires courantes" : quel est son véritable champ d’action ?

Un gouvernement des

La configuration politico-institutionnelle laissait peu de place au doute. Le président de la République va accepter, d'ici ce mardi 16 juillet au soir, la démission de son Premier ministre, Gabriel Attal, après l’avoir refusé une première fois au lendemain du second tour des élections législatives. Resté de plein exercice malgré la défaite du camp présidentiel le 7 juillet dernier, le gouvernement sera désormais "démissionnaire".

Dès que le décret portant cessation de ses fonctions sera signé par Emmanuel Macron, il deviendra un "gouvernement en affaires courantes", selon la nomenclature juridique. Ainsi, jusqu’à la nomination d’une nouvelle équipe gouvernementale, l’exécutif se bornera à assurer la continuité de l’action gouvernementale et administrative. C’est-à-dire accomplir le strict nécessaire pour assurer la continuité de l’Etat. Et ce, pendant "quelques semaines", vraisemblablement jusqu'à la fin des Jeux olympiques au moins, ont affirmé des participants au Conseil des ministres auprès de l'AFP ce mardi.

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Des pouvoirs réduits

En plus de devoir éviter les réunions interministérielles au risque de "multiplier le travail inutile", le Premier ministre et son équipe ne pourront lancer aucune mesure structurelle. "Le gouvernement n’est plus en position de prendre une décision à caractère politique ni de déposer un projet de loi", explique Anne Levade, professeur en droit public à l’Université Panthéon-Sorbonne. Il peut néanmoins se saisir des "affaires urgentes", dont l’adoption est conditionnée par "une impérieuse nécessité". Le constitutionnaliste Benjamin Morel énumérait récemment auprès de L’Express une série de situations pouvant conduire le gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles : "catastrophe naturelle, trouble à l’ordre publique majeur, perte du contrôle de tout ou une partie du territoire, etc."

En outre, toute mesure réglementaire ne peut être prise que "par exception", au nom de la continuité de l’Etat, ou quand elle relève de l’urgence. Et si le président de la République peut convoquer un conseil des ministres, son ordre du jour ne devra pas être trop chargé. Il ne pourra par ailleurs pas procéder à "des nominations jugées politiquement sensibles ou signer décret politiquement sensible", indique Anne Levade. Exemple : les décrets souhaités par l’exécutif sur la réforme de l’assurance chômage n’entreraient a priori pas dans le champ des affaires courantes.

C’est en tout cas ce que laisse penser une jurisprudence du Conseil d’Etat, qui fait office d’unique précédent en la matière. En 1952, les juges du Palais Royal avaient annulé un décret d’application pris par un gouvernement provisoire au motif qu’il ne pouvait être regardé comme une affaire courante. Bien qu’elle remonte à 70 ans, "cette décision a été jugée suffisamment sérieuse pour que jamais le cas ne se rencontre de nouveau", note Anne Levade.

Une configuration tout sauf anormale

Si les pouvoirs d’un gouvernement en affaires sont restreints, c’est notamment parce qu’étant démissionnaire, celui-ci n’est plus responsable devant le Parlement. "Dans un régime parlementaire comme celui de la Ve République, la logique veut qu’un gouvernement fasse usage de pouvoir politique car il est susceptible de voir sa responsabilité engagée devant l’Assemblée nationale. Ce n’est donc pas le cas d’un gouvernement qui a déjà démissionné", précise Anne Levade.

Cette configuration politique, relativement méconnue, n’a pour autant rien d’exceptionnel. À chaque fois qu’un changement de Premier ministre a lieu, le gouvernement en place est systématiquement "en affaires courantes" en attendant qu’un successeur soit nommé à Matignon, et que celui-ci constitue une nouvelle équipe. Il s’agit donc seulement d’une phase de "transition qui ne doit pas s’éterniser", souligne Guillaume Drago, professeur français de droit public à l’université Panthéon-Assas Paris II.

Sous la Ve République, le gouvernement démissionnaire à la plus longue durée de vie - 5 jours - est celui de Bernard Cazeneuve, qui a présenté sa démission le 10 mai 2017, et dont le gouvernement est resté en affaires courantes jusqu’à la nomination d’Edouard Philippe le 15 mai par Emmanuel Macron. Ce sera encore une fois à ce dernier de nommer le futur locataire de Matignon. Mais pour la première fois en sept ans, il devrait lui être imposé.

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