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L’abbé Pierre n’était pas #MeToo — et alors?

Ayant épuisé — pour le moment — son stock de personnalités susceptibles d’avoir un jour couché avec des starlettes, l’inénarrable Caroline De Haas en est donc arrivée à monter un dossier de harcèlement contre l’abbé Pierre, qui, paraît-il, dans son grand âge… Bien qu’il soit plus porté sur les seins que sur l’Esprit saint ou les saintes nitouches, notre chroniqueur a voulu revenir sur ces accusations absurdes, puisque l’impétrant est passé dans un monde meilleur où les néo-féministes en quête de notoriété n’existent pas.


Au commencement était saint Paul, le gnome de Dieu, petite chose misérable qui, frappée d’illumination sur la route de Damas (il faut se méfier, au Moyen-Orient, les coups de soleil, de Paul à Mahomet en passant par tous les illuminés du désert, sont redoutables et vous font prendre de l’eau de source pour du saint-julien 1985 — mon préféré) devint un thuriféraire immédiat du dieu qu’il combattait férocement : une intolérance chasse l’autre. 

La chair est faible

C’est à ce père de l’Église, sous-doté par la nature (qui dira l’incidence du micro-pénis dans les convictions religieuses ?) que nous devons la condamnation par l’Église de la sexualité, au point que s’il admet qu’il faut croître et se multiplier, il finit par conclure que mieux vaut s’en abstenir. Rappelez-vous le beau livre de Pascal Quignard, Le Sexe et l’effroi, qui analyse le coup d’arrêt brutal que le christianisme a imposé au monde gréco-romain, où l’on s’emmanchait sans penser à mal…

De surcroît, la progression hiérarchique au sein de l’Église allant d’un train de sénateur, les prêtres n’arrivent en position de force que tard dans leur vie. Mon hypothèse est que l’andropause au cours des siècles leur a fait dire de grosses bêtises sur la nécessaire chasteté des prêtres, des moines et des nonettes, qui avaient, les uns et les autres, l’âge de forniquer — et qui d’ailleurs ne s’en privaient guère : la vertu de saint Ambroise n’est pas à la portée de tout le monde, et la résistance de saint Antoine aux offres de la reine de Saba et autres petites cochonnes est moins un exemple qu’une exception sidérante.

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Alors l’abbé Pierre aurait touchaillé des jeunes femmes… Et alors ? Il a bien fait. Caroline de Haas, qui a monté le dossier d’accusation après avoir ruiné la vie de toutes sortes d’hommes qui ne lui avaient rien fait — crime impardonnable —, a recueilli le témoignage de quelques victimes supposées de l’abbé et / ou gourgandines en mal de célébrité. Et Mediapart, où bien sûr ils sont tous chastes, de se frotter les mains.

L’abbé Pierre était bel homme, et en l’interprétant au faîte de sa beauté (dans Hiver 54, en 1989), Lambert Wilson lui rendait un bel hommage. Que la chair soit faible, nous le savons tous — et nous nous en excusons pour mieux en profiter. Grand bien nous fasse, à nous et aux pénitentes qui à genoux nous supplient de leur déverser notre sainte parole afin qu’elles s’en abreuvent à la source.

Nouvelles perversions

La chasteté obligatoire ne peut avoir été imposée que par des hommes frappés de sénescence ou des pervers imposant aux autres ce dont ils se dispensaient allègrement : pourquoi Madame De Hass ne monterait-elle pas un dossier contre une flopée de papes à progéniture extensive et mœurs équivoques ?

Quant à l’idée d’inculper les morts, elle est, quand on y pense, hautement surréaliste. Cela se faisait autrefois — voir le « Concile cadavérique » qui en 897 jugea post mortem le pape Formose. Cet anticlérical de Paul Laurens en a tiré un tableau saisissant en 1870. Vite, exhumons la dépouille de l’abbé Pierre, et traînons-la au Palais de justice, au milieu des cris vengeurs des hyènes de garde.

Laissons les morts enterrer les morts. L’abbé Pierre a fait un boulot remarquable, et les féministes de gauche qui pensent surtout à faire parler d’elles en sont loin, si loin qu’elles n’y arriveront jamais. Il n’y a pas de faute dans les relations charnelles entre adultes consentants, qu’on se le dise. Et nous devons juger les hommes sur le seul critère du bien qu’ils ont fait, et non des peccadilles que des oies blanches, faute de se repaître à satiété de la substantifique moëlle, leur reprochent pour occulter leur misérable petitesse.

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