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JO Paris 2024 : comment Léon Marchand a entraîné le légendaire coach américain Bob Bowman en équipe de France

Son sifflement strident et quasi-continu fend l’air. Bob Bowman, avec un sens du show très américain, court au bord du bassin olympique du centre aquatique de Vichy, sourcils froncés derrière ses lunettes. Slalome entre les photographes et les caméramans au fur et à mesure que son protégé progresse dans l’eau. La foule présente dans les gradins se fige. Un instant, le temps d’une accélération de Léon Marchand, la matinée ouverte au public, le 17 juillet dernier, du stage de l’équipe de France de course a pris des airs de compétition internationale.

Peu après, le grand espoir de la natation française, l’un des sportifs les plus attendus aux Jeux de Paris, est revenu sur cette scène… préméditée. « J’ai mis la combi et on a fait un beau spectacle avec Bob. Et encore, là il a été gentil… »

Le Toulousain de 22 ans est bien placé pour évoquer l’ancien coach de Michael Phelps, le nageur le plus titré de l’histoire : cela fait trois ans qu’il s’entraîne avec le natif de Columbia (Caroline du Sud), à l’université d’Arizona State jusqu’en avril dernier, à l’université du Texas, à Austin, depuis.

« L'un des meilleurs au monde pour le 4 nages »

Bowman, 59 ans, est l’un des plus grands techniciens de son sport. Celui qui a aidé Phelps à remporter, par exemple, huit médailles d’or en huit courses à Pékin, en 2008, avec sept records du monde et un record olympique dans la musette.

« Il est très fort, c’est l’un des meilleurs coachs dans le monde, en tout cas pour le 4 nages », résume Léon Marchand. « Il est très engagé dans ce que je fais, très investi. Il va parfois courir au bord du bassin juste pour m’encourager. Ou pour me crier dessus à la fin, ça dépend (rires). Je n’ai pas beaucoup droit à l’erreur avec lui, il est assez précis. Il me laisse peu de liberté dans l’eau. Dès que je commence à faire des bêtises, tout de suite, il me remet dans le droit chemin. »

Mais pas de méprise, l’Américain n’est pas un père tape-dur. « Il ne m’a jamais fait pleurer, donc ça va », reprend en souriant le néo-recordman du monde du 400 m 4 nages. « Il est dur en période de charge, tout simplement. Au mois de décembre, quand on commence à augmenter l’intensité, il peut être très strict. »

Il faut y voir là aussi une question de culture. « La relation coach-entraîné, aux États-Unis, est différente. Il y a beaucoup moins ce côté paternaliste. Là-bas, le coach est présent du début à la fin de l’entraînement, mais pas au-delà. Il n’y a pas de discussion, pas de dîner, de trucs en plus. Bob est plus paternaliste que les autres, mais il ne contrôle pas tout ce que je fais en dehors de la natation. Tant qu’à l’entraînement je fais ce qu’il faut, il n’y a pas de souci », insiste Léon Marchand.

Deux pays, deux coachs, deux cultures

Pour réussir son pari olympique, le jeune Français s’est donc entouré, durant sa préparation et comme depuis 2022, de l’Américain, qui a intégré le staff de l’équipe nationale. Mais qui devra parfois se partager avec ses autres athlètes – américains et hongrois notamment – et dont l’expérience similaire avec Yannick Agnel, entre 2013 et 2014, avait tourné court.

Léon Marchand navigue, lui aussi, des deux côtés de l’Atlantique, entre deux techniciens, puisqu’il a gardé attache avec son premier formateur à Toulouse, Nicolas Castel. Le trio fonctionne ainsi.

« Durant la prépa, je suis au service de l’équipe. Sur le temps des Jeux, quand Bob sera pris, j’interviendrai davantage auprès de Léon. Mais on communique beaucoup, on échange sur ce que l’on peut percevoir, nos ressentis et c’est très intéressant », dévoile le Haut-Garonnais, qui suit depuis plus de douze ans son nageur.

« L’environnement de cette équipe, auprès de laquelle je resterai durant les Jeux, est très bon, son management autour de Jaco (Verhaeren, le directeur de l’équipe de France) est excellent », reconnaît pour sa part Bob Bowman, pour qui « Nico (Castel) a fait de l’excellent boulot lorsqu’il a appris la technique à Léon ».

L’entraîneur à l’aura planétaire se réjouit surtout de voir en Marchand « un gamin – pas encore une star, on verra dans trois semaines – décontracté, assez calme, humble », avec « un bon caractère » et « le goût de la compétition », qui « comprend ce qui est important ». « Tout ce qu’il faut pour faire un grand champion », souligne-t-il. Un nouveau Michael Phelps ?

Non, ce ne sera pas un nouveau Phelps, mais un premier Léon.

« Il ne gagnera peut-être pas 23 médailles d’or. Mais à la question “peut-il faire des performances spectaculaires”, la réponse est oui », juge le néo-Texan, parsemant ses phrases de quelques mots de français. « Ses Jeux seront réussis à mes yeux s’il réalise les performances dont il est capable. Tout le reste en découlera. »

Le reste, ce sont les records, les médailles et, à domicile, la ferveur ou les sollicitations dont « il faudra le protéger ».

Côté conseil, justement, Bowman s’appuie sur son expérience avec son illustre poulain, mais aussi sur un autre célèbre champion. « Je lui parle de ce qu’a vécu Ian Thorpe et que j’avais utilisé avec Michael Phelps. Ian avait dit : “Il y a beaucoup d’attentes à l’extérieur et si tu les regardes négativement, c’est une pression. Si tu le prends positivement, c’est un soutien”. Beaucoup de gens s’intéressent à ce que tu fais, utilise-le. Le principal, c’est de se concentrer sur les choses que l’on contrôle, à savoir la nage, d’avoir la certitude de détenir ce dont on a besoin et de rester concentré sur sa routine. Facile à dire, mais difficile à faire. »

« Léon aime les barbecues... »

Autre préconisation, plus légère : « Léon aime les barbecues depuis qu’il est au Texas. Vous devriez lui demander », rigole, taquin, Bowman, dont l’histoire avec les Bleus est loin d’être terminée puisqu’il accueillera à l’avenir le très jeune (17 ans) Rafael Fente Damers.

« C’est la spécialité là-bas. Dans les restaurants, ils coupent devant toi une viande qui a été fumée entre 12 et 15 heures, je crois. C’est très bon… mais j’y suis allé trop souvent et Bob me répète “pas de barbecue” tous les week-ends », répond Marchand.

« Mais lui adore la nourriture aussi. Ça fait deux semaines et demie qu’il est en France, je pense qu’il vit sa meilleure vie. Il kiffe. » Et d’ici la fin des épreuves de natation, dimanche 4 août, il n’a pas peut-être pas fini de savourer.

Sébastien Devaur

Nageur polyvalent, Léon Marchand débutera ses Jeux ce dimanche, avec les séries, à partir de 11 heures, et la finale éventuelle du 400 m 4 nages, à 20 h 30, dont il est champion du monde en titre et recordman du monde (4’02’’50).

Mardi, il pourrait se consacrer à la finale du relais 4 x 200 m nage libre (à 21 h 59), alors qu’il aura disputé, en théorie, les séries le matin et les demi-finales (20 h 41, 21 h 46) des 200 m brasse et papillon.

Le lendemain, les finales de ces deux distances sont prévues à 20 h 36 et 22 h 08. Jeudi matin, place aux séries du 200 m 4 nages, avant les demi-finales, à 21 h 34. La finale a lieu, vendredi, à 20 h 49.

Enfin, il devrait finir ses travaux d’Hercule par le relais 4 x 100 m 4 nages, dimanche 4 août, à 19 h 12.

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