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Venezuela : l’armée bolivarienne, l’assurance-vie de Nicolás Maduro

Les mots dans la bouche du président résonnent presque comme une provocation. "Je tiens à féliciter cette Garde nationale professionnelle, humaine et puissante", a déclaré Nicolás Maduro lors d’une cérémonie pour le 87e anniversaire des forces armées, ce dimanche 4 août. Corps militaire chargé de faire respecter l’ordre public, la Garde nationale bolivarienne est extrêmement sollicitée par le pouvoir depuis le scrutin du dimanche 28 juillet.

A l’issue de l’élection présidentielle, Nicolás Maduro revendique toujours la victoire, appuyée le 2 août par le Conseil national électoral. Mais l’opacité autour de la révélation des résultats entraîne d’importants soupçons de fraude, poussant les Vénézuéliens dans la rue. La colère de la population s’est tout à bord dirigée à l’encontre des symboles. Des statues d’Hugo Chavez, son prédécesseur entre 1999 et 2013, sont déboulonnées. Les heurts ont déjà entraîné la mort de 13 personnes.

Par l’intermédiaire du ministère de la Défense, le général Vladimir Padrino, l’armée a réaffirmé "la loyauté la plus absolue et [son] soutien inconditionnel" au dictateur vénézuélien, présenté comme le "président constitutionnel […], notre commandant en chef légitimement réélu par le pouvoir populaire".

Equipée par la Russie

Forte de 343 000 hommes en 2020 selon l’Institut international d’études stratégiques - soit autant que les forces armées mexicaines, pourtant quatre fois plus peuplé - la Force armée nationale bolivarienne (FANB), équipée militairement par la Russie, est la clef de voûte du régime vénézuélien. Si bien que le candidat d’opposition, Edmundo Gonzalez Urrutia s’adressait à elle, début juillet, dans une lettre où il l’appelait "à respecter et à faire respecter [la] volonté souveraine" du peuple.

"Dans l’histoire du Venezuela, c’est toujours l’armée qui tranche en dernier", analyse dans nos colonnes Mariasol Pérez Schael, intellectuelle vénézuélienne et ancienne directrice du journal Exceso - censuré sous Chavez. Elle rappelle que l’histoire du Venezuela est étroitement liée à la question militaire. Du temps des colonies, le territoire était "la caserne" de l’empire espagnol aux Amériques. Au XIXe siècle, l’indépendantiste Simon Bolivar - duquel se revendiquent Maduro et un bon nombre de dirigeants de l’Amérique latine - était "un civil qui, une fois devenu militaire, a imposé l’ordre par les forces armées". A sa déclaration de loyauté à l’encontre de Nicolás Maduro, Vladimir Padrino a rajouté que l’armée agirait "avec force" pour "préserver l’ordre intérieur".

Le Venezuela et l’armée, toute une histoire

Quand bien même, l’armée réaffirme son soutien à Maduro, il s’agit davantage d’une preuve de fidélité que d’un acte de soumission. "Maduro n’a pas le leadership militaire en tant que tel. Il a conquis les forces armées à coups de privilèges, de promotions et de création de nouveaux postes", estime le général à la retraite Antonio Rivero, critique du chavisme en exil aux Etats-Unis. Des propos appuyés par Mariasol Pérez Schael. "Si une fracture apparaît au cœur du système, notamment dans l’armée, alors tout peut changer", anticipe l’ancienne éditorialiste. D’où la tentative du candidat d’opposition, misant "sur des fissures annoncées par certains dans le soutien de l’armée au pouvoir", précise l’AFP.

C’est Hugo Chavez, lieutenant-colonel de l’armée devenu ensuite président, qui est à l’origine de la dynamique qu’entretient le pouvoir actuel avec les militaires. Avec la nouvelle Constitution de 1999, il a donné à l’armée des postes clés dans l’administration et l’économie, et octroie à ses membres le droit de vote.

Aujourd’hui, elle contrôle les sociétés minières, pétrolières et de distribution alimentaire, ainsi que les douanes et 12 des 34 ministères, dont des portefeuilles importants tels que le Pétrole, la Défense, l’Intérieur ou le Commerce. "La force armée nationale bolivarienne me soutient, elle est chaviste, elle est bolivarienne, elle est révolutionnaire", a réaffirmé cette semaine Nicolás Maduro alors que dans les rues, les militaires continuent de s’époumoner : "Chavez vit".

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