Roman, texte pour la réouverture du Creux de l'Enfer : la critique d'art Camille Azaïs fourmille de projets
Depuis lundi 15 juillet, et pour une quinzaine de jours, Camille Azaïs, critique d’art et autrice, a posé ses bagages en plein cœur de Thiers (Puy-de-Dôme), dans une résidence d’artiste louée par le centre d’art contemporain d’intérêt national le Creux de l’Enfer.La quadragénaire est critique d’art depuis un peu plus de dix ans. Elle a beaucoup écrit pour des magazines, fait de la médiation autour d’œuvres. "Petit à petit, j’ai commencé à écrire des fictions. Il y a une sorte de frontière entre critique d’art et romancière que je suis en train d’explorer", sourit-elle.
Le déclic ? "Lorsque j’ai travaillé pour l’émission de France Inter, Autant on emporte l’histoire." Elle a notamment écrit un texte sur Gustave Courbet. "Il fallait trouver un moyen de le rendre vivant, c’était nouveau pour moi. J’ai fait d’autres projets pour France culture autour du personnage de Michael Jackson pour comprendre son personnage mi-ombre, mi-lumière."C’est en 2022 que Camille Azaïs publie Homemakers, son premier texte de fiction, "sorte d’essai fictionnel".
Un texte pour le Creux de l’EnferEn 2022, celle qui est également professeure d’Histoire de l’art depuis trois ans à l’école des Beaux-Arts de Caen (Calvados) a obtenu une bourse de 8.000 € pour des recherches sur l’art et la ruralité. Grâce à ces recherches, elle a été repérée par Sophie Auger-Grappin, directrice du Creux de l’Enfer qui lui a commandé un texte pour la réouverture du centre d’art suite à sa restauration débutée en janvier dernier.
"Je vais me servir de mes recherches et m'appuyer sur des œuvres artistes qui ont exposé ou exposeront au centre d’art. L’idée est de faire le lien entre le contexte agricole et paysan de la ville et son rapport à l’art, de mettre Thiers au centre de sa campagne."
"C’est très intéressant de se plonger dans l’histoire du Creux de l’Enfer"
Le projet lui a beaucoup plu : "Thiers a un lien très fort au territoire. Le rapport avec le passé industriel m’intéressait. Et le centre d’art est un lieu important de l’art contemporain. C’est très intéressant pour moi de me plonger dans son histoire, dans les expositions qui ont eu lieu."Le travail sera rendu en septembre pour une parution en juin 2025. Ce texte fera partie d’un corpus constitué d’une quinzaine de participations d’autres artistes.
Un livre autour de l’agricultureÉgalement romancière, elle a décidé de saisir la proposition de résidence d’artiste de Sophie Auger-Grappin pour se concentrer sur sa fiction Triticum qui devrait paraître à la rentrée 2025 ou en 2026. "Cela fait au moins deux ans que j’y pense. Je sens que c’est le moment de l’écrire."Le pitch ? "Cela part d’un questionnement sur le blé et d’une passion pour le pain", explique Camille Azaïs.
Camille Azaïs écrira un texte dans le cadre de la réouverture du Creux de l'Enfer.
Quid de la genèse ? Cela remonte à la période du confinement où elle a réalisé son premier levain. Depuis, elle a continué à faire son pain. Et cette expérience lui a donné envie de se renseigner sur la farine. "Aujourd’hui, on a réduit le nombre de variétés de blé en culture et on cultive des clones."Pour écrire sa fiction, "je me suis plongée dans l’histoire des semences paysannes, des paysans boulangers. En parallèle, j’ai eu l’idée de créer un personnage de femme qui a un mode de vie extrême", pointe la littéraire.
Avant cette résidence, la quadragénaire n’avait pas encore eu l’occasion de venir à Thiers et la ville l’a beaucoup inspirée."Avant d’arriver, j’avais l’idée d’écrire des scènes autour de la faucille, du geste de couper. À un moment mon personnage volait un couteau et en me promenant, j’ai vu ce même couteau dans un magasin. J’en avais rêvé et il était là. J’ai tout de suite eu envie de l’acheter, s’amuse Camille Azaïs avant d’ajouter : le côté couteau va être très présent et il va l’être d’autant plus que je suis venue à Thiers."Lors de ses promenades, Camille Azaïs a constaté à de nombreuses reprises la présence de la plante renouée du Japon. Avant d’arriver à Thiers, elle avait eu l’occasion de se renseigner à son sujet mais "de la voir ici, cela m’a donné envie d’écrire une scène où mes personnages coupent les tiges pour goûter si c’est bon", confie Camille Azaïs qui comptait bien tenter l'expérience.
Un premier roman publié en 2025 Son premier roman Minimale va paraître en avril 2025. C’est l’histoire d’une femme qui refuse de manger des céréales. "À travers ce refus, l’idée est de parler de l’agriculture d’aujourd’hui et ce moment où les populations de cueilleurs chasseurs se sont sédentarisées et se sont lancées dans les céréales. Elle est dans cette position de ne manger que ce qu’elle peut produire ou échanger avec ses voisins", résume Camille Azaïs.Tout au long du livre, un dialogue d’idées va s’installer avec le personnage d’un boulanger. "Ce sont deux solitudes qui se rencontrent."
Lydia Reynaud