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“Trap” : M. Night Shyamalan s’amuse avec un huis clos excitant et imprévisible

À chaque film, M. Night Shyamalan, comme un enfant déballant ses jouets, nous fait la même avance : jouer avec lui ou souffler sur le château de cartes ? Trap ne fait pas exception à la règle.

Le film s’ouvre sur le concert d’une popstar, mélange de Taylor Swift, pour la fanbase de jeunes filles surex, et de Billie Eilish, pour la voix grave et murmurée. Cooper (Josh Hartnett), père de famille exemplaire, ni trop cool ni trop has been, fait le bonheur de sa fille, Riley (Ariel Donoghue), tête blonde de 12 ans victime de harcèlement scolaire, en l’accompagnant voir son idole sur scène.

Sur place, un anormal réseau policier quadrille la zone et fait immédiatement comprendre à ce dernier qu’il est pris comme un lapin. Ne faisons pas mystère de l’enjeu inscrit sur l’affiche du film : Cooper, en plus de sa casquette de sexy dad, est aussi serial killer.

Jamais loin du précipice

Shyamalan reconduit le motif du dédoublement de personnalité, notamment à l’œuvre dans Split, en faisant jouer à Josh Hartnett une partition double et bouffonne, exemplarité outrancière du père de famille d’un côté et surexpressivité menaçante du parfait psychopathe détraqué par le trauma d’une mère autoritaire de l’autre.

Dans le périmètre sous contrôle que représente le stade où a lieu le concert, caméras de surveillance, smartphones brandis par la foule et écrans géants sur lesquels irradie le show forment un réseau touffu d’images à travers lequel Cooper tente de se faufiler. C’est une véritable chasse à l’homme numérique qu’orchestre Shyamalan dans la première partie de son film, comme un écho direct et très pertinent au rôle capital des écrans dans l’éclosion du mouvement MeToo et dans la désignation des auteurs de violences, dont Cooper serait la quintessence.

Dans cet invraisemblable labyrinthe de pièges se dessine, aussi, l’autoportrait amusé d’un cinéaste avide de pirouettes scénaristiques, et dont le génie réside dans ce jeu de funambule où la fulgurance côtoie les risques d’un ratage. Trap n’est lui non plus jamais loin du précipice, mais la cadence virtuose et démesurée avec laquelle Shyamalan conduit son récit place ses coups de force davantage sur le terrain excitant de l’imprévisible et de la surprise que sur celui de la cacophonie.

Éloge à la jeunesse

Enfin, Shyamalan trouve surtout avec Trap une vraie acuité pour parler de la jeune génération, et surtout de celle de ces jeunes filles ultra-connectées, ivres de pop, détentrices d’un savoir inconnu de leurs aîné·es (cette scène du début où Riley apprend des mots à son père). Il en organise la prise de pouvoir en passant par un changement de point de vue.

Le cinéaste américain enrichit son éloge adressée à cette jeunesse lucide et éclairée via la star Lady Raven, incarnée par sa propre fille Saleka Shyamalan, legs d’amour. En confiant une importance telle à ce personnage d’abord périphérique, il diffuse à l’intérieur de son thriller un parfum extrêmement émouvant sur le pouvoir de la musique et de ses popstars adorées, capables de réparer les chagrins, et même de sauver des vies.

Trap, de M. Night Shyamalan, avec Josh Hartnett, Ariel Donoghue, Saleka Shyamalan. En salle le 7 août.

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