Donald Trump veut racheter le Groenland : une idée déjà émise par Harry Truman en... 1946
Le Groenland comme nouvel Etat américain ? Une vieille idée assurément. Donald Trump a beau avoir proposé à deux reprises - en 2019 et en 2024 - de racheter ce territoire de 2 millions de km² grand comme quatre fois la France, il n’est pas le premier président américain à y avoir pensé. En 1946, le démocrate Harry Truman proposait déjà 100 millions de dollars en lingots d’or au Danemark pour l’acquérir. Pourquoi une telle offre ? Les autorités militaires y étaient favorables. A l’époque, elles considéraient même la transaction comme une nécessité. L'achat du Groenland donnait en effet aux Etats-Unis la possibilité de construire des bases militaires permettant de contrer les éventuelles attaques de bombardiers soviétiques.
Le site de l’agence Associated Press dévoile quelques détails de l’histoire, à partir de documents déclassifiés. "En fait, l'une des solutions envisagées était que les Etats-Unis échangent des terres situées dans le district de Point Barrow, en Alaska, contre les parties du Groenland qu'ils considéraient comme ayant une valeur militaire. Dans le cadre de ce plan, les Danois auraient reçu les droits sur le pétrole découvert et auraient dû le vendre aux Etats-Unis".
Le secrétaire d'Etat James Byrnes fait part de cette offre au ministre danois des Affaires étrangères Gustav Rasmussen, en visite à New York le 14 décembre 1946. Mais elle n’a pas l’effet escompté : "Nos besoins ... ont semblé choquer Rasmussen, mais il n'a pas rejeté catégoriquement mes suggestions et a dit qu'il étudierait un mémorandum que je lui ai remis", témoigne James Byrnes.
Près de 80 ans plus tard, Marc Thiessen, directeur de la rédaction des discours à la Maison-Blanche (2007–2009) continue de croire que le Danemark a fait ce jour-là une erreur magistrale. "En 1967, la découverte de pétrole la plus riche de l'histoire des Etats-Unis a eu lieu dans la région de Point Barrow. Mauvaise décision, Danemark ! Triste !", écrit-il dans une analyse datée de 2019, qui circule à nouveau sur les réseaux sociaux.
Acheter... ou louer
Mais le "non" danois est surtout un frein à l’ambition des Etats-Unis. Comme le rappelle Marc Thiessen, le Groenland dispose de vastes richesses en minéraux, des ressources que le Danemark n'a pas pu ou voulu exploiter : zinc, plomb, or, diamants, cuivre et uranium. Cette zone est également intéressante en raison de ses éléments de terres rares, actuellement fournis aux Etats-Unis par la Chine.
"En achetant le Groenland, nous aurions le contrôle de ces minerais d'importance stratégique. Sur le plan militaire, cela permettrait d'écarter la Chine et la Russie, qui ont toutes deux ciblé agressivement l'Arctique en y installant des bases, des stations de recherche scientifique et des investissements stratégiques", détaille l'expert.
Bien sûr, ce sympathisant de Donald Trump ne dira pas un mot sur les conséquences environnementales de l’exploitation économique du Groenland ou sur la légitimité des Etats-Unis à revendiquer un territoire de plus. Dans son édito, il rappelle au contraire les nombreuses acquisitions de territoires effectuées par les Etats-Unis à coups de dollars, comme l’achat en 1867 de l’Alaska à la Russie pour un peu plus de 7 millions de dollars. Le Danemark refuse, pour l’instant, toute proposition de ce style. Mais il pourrait finir par céder un jour, se disent les pro-Trump. Très pragmatique, l’un d’entre eux conclut : si on ne peut pas acheter le Groenland, on peut sans doute le louer.