Une accalmie rare dans le Pacifique !!!!!
En cette période de l’année, il est presque étonnant d’observer une certaine sérénité sur l’immense désert liquide qu’est le Pacifique Sud. Habituellement, ces latitudes offrent un cocktail bien secoué de grosses dépressions, de vents hurlants et de vagues imposantes. La plupart des skippers du Vendée Globe bénéficient ainsi de conditions bien plus sages que celles auxquelles on pourrait s’attendre. Cela vaut pour le schéma général parce que, bien sûr, il y a des exceptions. Entre la Tasmanie et la Nouvelle-Zélande, Oliver Heer (Tut Gut.) et Antoine Cornic (Human Immobilier) en prennent pour leur grade et se font sérieusement malmener par les éléments. Plus à l’Est, à l’approche du cap Horn, Thomas Ruyant (VULNERABLE) et sa bande de poursuivants constatent un renforcement progressif du vent, tout en anticipant un changement de rythme marqué, une fois la Terre de Feu dépassée. En Atlantique, les deux leaders, Yoann Richomme (PAPREC ARKÉA) et Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance), naviguent eux aussi avec précaution. Leur objectif ? Frôler le centre d’une petite dépression, suffisamment près pour en tirer avantage, sans toutefois franchir la ligne rouge et risquer de transformer leur trajectoire en numéro d’équilibriste raté.
« La situation actuelle dans le Pacifique est plutôt exceptionnelle à cette période de l’année. C’est assez rare de ne pas voir défiler les grosses dépressions. Ce vendredi, une grande partie des concurrents naviguent dans de belles conditions anticycloniques », explique Christian Dumard, consultant météo de l’épreuve. En ce moment, l’océan Pacifique semble en effet décidé à honorer son nom. Pas de dépressions titanesques. Non, le géant habituellement turbulent a choisi la carte de la tranquillité. Une rareté dans cette partie du globe, où le chaos est souvent roi. Pour les skippers du Vendée Globe, ce répit météorologique est presque déconcertant. Les eaux du Sud, d’ordinaire si sauvages, se présentent sous un jour apaisé, presque sereines. À croire qu’elles ont décidé, pour une fois, de jouer les bons élèves. « Il fait froid mais il fait beau et la mer est tellement plate par rapport à ce qu’on a connu dans l’Indien ! C’est le bonheur, le bonheur, le bonheur ! », a relaté Benjamin Ferré, excité comme un hamster dans une roue XXL. « C’est royal ! », a confirmé de son côté Sébastien Marsset, un peu étonné par ces conditions presque accueillantes, si l’on ose employer ce terme dans le Grand Sud.
Calme relatif, turbulences localisées
Si l’été austral est bien en place pour les skippers de Monnoyeur – Duo for a Job et de FOUSSIER ainsi que pour une large proportion du peloton, certains solitaires subissent néanmoins des conditions particulièrement éprouvantes. Antoine Cornic, après avoir affronté des vents atteignant 55 nœuds la nuit dernière, reste sous pression ce vendredi. Même traitement pour Oliver Heer, qui encaisse à son tour l’impact du passage de la dépression en route vers le Sud-Est. « Je traverse une période un peu délicate, et clairement, je préfère mettre ma course en stand-by temporairement jusqu’à ce que le gros du mauvais temps passe. La sécurité avant tout ! », a confié le skipper de Tut Gut. lors de la vacation officielle, ce matin. Cela rappelle que le Pacifique n’est jamais totalement docile. Mais au-delà de ces épisodes isolés, les conditions sont étonnamment clémentes pour cette région et cette saison. Même le cap Horn semble avoir enfilé son peignoir et siroté une camomille. Il attend moins menaçant qu’à l’accoutumée mais toujours impressionnant. Et si les skippers qui se préparent à le déborder dans les prochaines 24 heures ne l’affronteront pas sous un déluge de vent et de vagues, ils savourent cette chance sans pour autant baisser la garde. Et pour cause, dans ces eaux, la prudence reste la meilleure alliée car même lorsque l’océan semble coopératif, personne ne s’y trompe : le Pacifique reste capricieux, et le moindre signe d’agitation pourrait rapidement rappeler à la flotte sa puissance.
De la fureur des mers du Sud à la tactique de l’Atlantique
« Le vent se renforce petit à petit. Actuellement, il y a 25 nœuds de secteur nord et ça va continuer de monter jusqu’à 30-35 nœuds, avec des rafales à 40. Une fois en Atlantique, ça va mollir d’un coup avec le dévent de la cordillère des Andes. La transition promet d’être assez brutale », a expliqué Nicolas Lunven. Après un mois de lutte contre les cinquantièmes hurlants et le froid intense, le skipper de Holcim – PRB aspire à quitter les mers du Sud. Pour lui comme pour les concurrents qui l’entourent, chaque mille parcouru vers des latitudes plus clémentes est une avancée vers des conditions plus agréables. Ces dernières ne garantiront cependant pas forcément une navigation facile. « Au début, il va falloir se frayer un chemin à travers cette zone de petit temps. Globalement, la remontée de l’Atlantique Sud s’annonce assez compliquée, avec pas mal de changements de situation, des phénomènes assez dynamiques, des passages de centres dépressionnaires et bien d’autres choses », a précisé le Vannetais qui va ainsi devoir enchaîner les changements de voiles, les prises de ris, les virements de bord mais aussi les séances de matossage. « Ça ne va pas être un long fleuve tranquille tout droit », a assuré Nicolas qui devrait, de fait, connaître une section à la fois technique et stratégique jusqu’à la latitude de Rio de Janeiro.
Entre rodéo et stratégie
Même topo ou presque pour les leaders, et notamment Yoann Richomme et Charlie Dalin. Relancés à plus de 20 nœuds de moyenne, leur priorité aujourd’hui est simple : contourner une petite dépression par le nord tout en évitant soigneusement la zone de calmes en son centre. Ici, pas question de viser le mille comme aux fléchettes, ce serait la pire stratégie. L’enjeu ? Filer à l’Est au plus vite pour aborder la transition suivante avec fluidité. « Il va falloir décider dès ce soir de la route à prendre et ce n’est pas simple. Il y a de grosses zones de vents faibles et ça bouge beaucoup. D’un fichier à l’autre, ça varie considérablement », a analysé le skipper de MACIF Santé Prévoyance. Actuellement engagé dans ce qu’il décrit comme un véritable « rodéo sur un taureau argentin », il trouve néanmoins de quoi se réjouir. D’abord, les températures grimpent enfin, au point qu’il pourrait presque envisager de sortir le t-shirt. Ensuite, il s’éloigne à grands pas de la Zone d’Exclusion Antarctique, qu’il compare volontiers à un voisin bruyant qu’on est ravi de quitter. Enfin, ses routages lui prédisent une remontée express jusqu’à Recife en une semaine seulement, avec en prime une possible arrivée aux Sables d’Olonne autour du 14 ou 15 janvier… juste à temps pour profiter des dernières galettes des rois !
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