Langue française : ce qui se cache derrière la "règle Mbappé"
C’est une règle que nous avons tous apprise sur les bancs de l’école : "Quand un n précède un m, un b ou un p, il se transforme en m." D’où "emmener", "trembler", "champignon", et ainsi de suite. Dans les salles de classe, elle est désormais connue comme… la "règle Mbappé" !
Elle a pour origine un phénomène connu sous le nom de "paresse articulatoire". Car, je suis désolé de vous le dire un peu brutalement, mais nous sommes tous des fainéants ! Consciemment ou non, nous cherchons à économiser la fatigue que représente le fait de parler. C’est ainsi que nous sommes collectivement passés de "chaircuiterie" à "charcuterie", par exemple, mais aussi d’"in-pact" (prononcez "inepacte") à "impact".
Dans le genre "que vaudrait une règle sans ses exceptions", laissez-moi maintenant vous expliquer pourquoi nous écrivons "bonbonne", alors qu’il s’agit étymologiquement d’une petite bombe, au sens d’un petit récipient ? La question se pose d’autant plus que nous avons affaire ici à un emprunt à l’occitan "boumbouno". Passe encore que le son [ou] méridional soit devenu [o] en français, mais pourquoi le m tend-il à céder la place à un n (en fait, les deux graphies sont autorisées) ? Eh, bien, figurez-vous qu’il faut y voir l’attraction de… "bonbon" !
Explication. Le terme "bonbon" lui-même échappe à notre fameuse règle Mbappé, car, à l’origine, il s’agit du redoublement enfantin de deux mots séparés : "bon" et "bon". Le rapport avec "bonbonne" ? Les deux mots se ressemblent tellement que l’orthographe du premier a influencé celle du second !
Je ne résiste pas non au plaisir de vous parler d’"embonpoint" (pas le mien, hein, celui du dictionnaire !), qui prend bien un m devant le b, mais… pas devant le p. La raison ? "Embonpoint" est issu de la jonction de "en bon point", qui avait pour sens initial "en bonne forme". C’est pourquoi il s’est un temps écrit "embompoint". Jusqu’à ce jour funeste de 1694 où l’Académie française modifia sa graphie pour rappeler l’origine du mot, mais ne le fit qu’à moitié, en rétablissant le n de "bon", mais pas celui d'"en".
Une décision inconpréhensible…