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Israël et la bombe atomique : un arsenal nucléaire plus si secret

Hôpital Soroka de Beersheva. Le 19 juin, Benyamin Netanyahou tient une conférence de presse sur le conflit opposant son pays à l’Iran. Puis prononce cette phrase : "Israël fera disparaître la menace du nucléaire et des missiles iraniens". Le Premier ministre israélien ne s’étend pas sur la façon dont il le fera. Mais il n’a pas besoin. Derrière ces mots plane une certitude qu’Israël n’a daigné confirmer : l’Etat hébreu fait partie des pays dotés de l’arme nucléaire.

90 à 300 ogives nucléaires

Israël fait partie des neuf puissances nucléaires de la planète. Et pourtant, c’est la seule à n’avoir jamais reconnu posséder l’arme atomique. Aucune déclaration publique, aucun test revendiqué. Dans les faits, tout indique le contraire. Mais selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), Israël détiendrait environ 90 ogives nucléaires. Certains analystes estiment que ce chiffre pourrait monter jusqu’à 300. En comparaison, la Corée du Nord en posséderait 50, 290 pour la France, et plus de 5 000 pour les Etats-Unis et la Russie.

Bien qu’Israël répète depuis les années 1960 qu’il ne sera pas le premier "à introduire" des armes nucléaires au Moyen-Orient, autrement dit, tester, déclarer ou utiliser selon la définition de Tel-Aviv, l’Etat hébreu n’y est pas pour autant étranger. A peine fondé, dès les années 1950, l’Etat d’Israël se lance dans la recherche nucléaire. En 1952, la Commission à l’énergie atomique est créée. Puis en 1957, la France accepte de lui fournir un réacteur à eau lourde pressurisée. L’année d’après, un site est construit près de la ville de Dimona, dans le désert du Néguev.

Très vite, les Etats-Unis soupçonnent un usage militaire. En 1960, un rapport du Joint Atomic Energy Intelligence Committee évoque une usine de retraitement pour produire du plutonium. En 1973, les services américains sont convaincus qu’Israël détient la bombe. Mais jamais le pays ne le confirme.

Depuis, Israël n’a pas changé de position et n’a pas signé le Traité de non-prolifération nucléaire. Pour le faire, il faudrait renoncer à cette arme, ou l’admettre. L’Etat hébreu refuse l’un et l’autre. Il ne bénéficie pas non plus du parapluie nucléaire américain, à la différence de plusieurs pays européens et asiatiques. Pour les experts interviewés par le New York Times, cela confirme une autonomie stratégique : Israël n’a pas besoin de protection extérieure, parce qu’il détient ses propres moyens de dissuasion.

Une opération de modernisation ou de construction ?

Dimona. Son nom est connu, ses contours beaucoup moins. Une chose est certaine : cette ville est le cœur du programme nucléaire israélien. Construit dans le secret, ce centre reste aujourd’hui hors de portée de toute inspection internationale. Les Etats-Unis y ont envoyé des scientifiques dans les années 1960, mais ces visites ont été de plus en plus limitées, puis interrompues. Depuis, aucune inspection étrangère n’a été autorisée.

Mais Dimona est bien actif. Ces dernières années, des images satellites ont révélé de nouvelles constructions importantes sur et autour du site. Pour plusieurs experts, il s’agit au minimum d’une opération de modernisation. D’autres estiment qu’un nouveau réacteur est en cours de construction, ce qui permettrait d’accroître la production de plutonium, et donc la capacité de l’arsenal.

Des documents déclassifiés et des recherches historiques suggèrent qu’Israël a préparé ses bombes nucléaires pendant les guerres de 1967 et 1973, sans aller jusqu’à leur usage. Le pays a également été soupçonné d’avoir mené un test nucléaire non déclaré en 1979, lors de l’incident Vela. Un satellite américain avait alors détecté un double flash lumineux dans l’Atlantique Sud. Mais Israël a nié toute implication.

Officiellement, l’Etat hébreu n’a donc jamais utilisé ni testé l’arme nucléaire. Mais la simple existence présumée de cette arme a suffi à modeler ses relations régionales. Aujourd’hui, face à un Iran soupçonné de se rapprocher du seuil nucléaire, Israël insiste sur son refus d’accepter une telle évolution. Et si l’Iran est signataire du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, les puissances occidentales et Israël l’accusent de violer ses engagements. Pire, Israël refuse de voir un pays ennemi rejoindre le club des puissances nucléaires. Celui dont il fait partie sans jamais l’avoir confirmé.

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