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Rachida Dati, ministre de la Culture : stupeur et tremblements ?

L'arrivée de Rachida Dati au ministère de la Culture a immédiatement été critiquée par de nombreux·euses acteur·ices du monde de la culture, pourtant la femme politique a souvent inspiré les artistes...

Les commentaires sur ma nomination, je m’en fiche, même si j’y vois parfois aussi un mépris de classe.” À peine exclue des Républicains pour avoir intégré la Macronie, ce qui ressort de la réaction de Rachida Dati aux critiques sur sa nomination à la tête du ministère de la Culture, c’est d’abord sa rouerie politique. De quel mépris de classe parle Rachida Dati ? L’ex-garde des Sceaux de Sarkozy qui gagnait, d’après Le Point, plus de 50 000 euros par mois en 2012 en honoraires d’avocate, et dont les émoluments pour son nouveau poste s’élèvent à 10 647 euros bruts par mois, auxquels s’ajoute son salaire de maire du 7e arrondissement et de conseillère de Paris (5 639 euros bruts par mois), fait assurément partie de la haute bourgeoisie parisienne.

Le critère cimentant une classe sociale n’est donc pas économique pour la ministre. Elle fait référence à un capital culturel dont on l’accuse de manquer, ce qui l’handicaperait dans l’exercice de ses fonctions. À celles et ceux qui lui reprochent de n’être pas assez intéressée par l’art, elle répond en les stigmatisant en tant qu’aristocratie culturelle méprisante à l’égard du reste de la population – une stratégie teintée de populisme qui fait craindre le pire.

Trumpisation de la culture

Dire que sa nomination fut une surprise est un euphémisme. À droite comme à gauche, elle a été accueillie avec stupeur. Sans parler de ses mises en examen pour corruption, trafic d’influence et recel d’abus de pouvoir, des bruits de couloir circulent : il s’agirait d’un pacte passé entre Dati et le Président. Elle aurait intégré le gouvernement en échange du soutien d’Emmanuel Macron dans la revanche qu’elle a à prendre à la Mairie de Paris en 2026, son objectif à long terme, comme elle l’a encore affirmé au Parisien dimanche dernier.

La réaction la plus virulente à sa nomination est d’ailleurs venue de l’actuelle Maire de la capitale, Anne Hidalgo, la qualifiant de “trumpisation de la culture”. Sans aller jusque-là, on s’inquiète de savoir comment Rachida Dati se positionnera dans le climat post-MeToo qui agite toute la société française et les métiers de la culture en particulier. Dans un second mandat macroniste particulièrement défavorable aux précaires, une réforme de l’intermittence est aussi à craindre.

Réputée pour avoir une grande gueule et sachant faire preuve d’insolence, le tempérament éruptif de la ministre pourrait être une force, reste à savoir s’il sera bénéfique à la Culture, aux objectifs du Président ou aux ambitions personnelles de la candidate à la Mairie de Paris. Et si Rachida Dati ne semble pas être la personnalité politique la plus inspirée par le champ artistique, on relève que les artistes ont été plutôt inspiré·es par Rachida Dati.

Rachida, mon p’tit chat

Faïza Guène s’inspire d’elle dans son roman Un homme, ça ne pleure pas (La Loupe, 2014). Dans son film La Conquête, Xavier Durringer confie son rôle à l’actrice Saïda Jawad. Une bande dessinée satirique d’Yves Derai, Bernard Swysen et Marco Paulo, qu’elle a tenté de faire interdire, est intitulée Rachida, aux noms des pères. Les rappeurs Sniper, L’Don, Dirty Dahn et Richie Rich la citent dans leurs chansons. Mais c’est au groupe d’electroclash Sexy Sushi que l’on doit l’œuvre rachidesque la plus saillante.

Dans À bien regarder, Rachida, Rebeka Warrior chante : “Rachida, mon p’tit chat, T’as besoin que d’un seul doigt, Pour m’envoyer en prison, Ou me filer 100 coups de bâton.” Espérons qu’on ne substitue pas dans quelques mois à la seconde partie de la phrase : “Pour réduire mes indemnisations, Ou casser ce qui fait de notre culture une exception.

Édito initialement paru dans la newsletter Cinéma du 17 janvier. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !

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