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“Man in Black” : Arte diffuse un docu puissant sur le compositeur chinois Wang Xilin

Man in Black prend une place un peu à part dans la filmographie de Wang Bing. S’il s’inscrit dans la veine portraitiste de l’auteur (L’Homme sans nom, Fengming, Madame Fang), il se rapproche de manière inédite de la performance artistique.

Associé à la cheffe opératrice Caroline Champetier, le documentariste chinois filme son compatriote Wang Xilin, célèbre compositeur âgé de 86 ans. Sur la scène du Théâtre des Bouffes du Nord, la caméra suit patiemment l’entrée de l’homme entièrement nu, avant de se rapprocher au plus près de ce corps marqué par le passage du temps et les violences subies lors de la Révolution Culturelle chinoise.

L’art et la mémoire

Il se lance alors dans une série de gestes, qui évoquent aussi bien les étirements d’un prisonnier enfermé dans sa cellule qu’une forme d’assujettissement ou de contrainte physique. Dans le clair-obscur du théâtre, cette rencontre entre un corps et une caméra particulièrement mobile invente une étrange chorégraphie, qui semble déjà convoquer en creux les violences de l’histoire.

Après ces séquences presque muettes, la parole fait irruption. Wang Xilin retrace son parcours, de son entrée au conservatoire jusqu’à sa mise au ban du Parti communiste chinois et les persécutions qui suivront. Habitué du plan long et fixe pour laisser la parole se déployer librement dans le temps, Wang Bing se fait ici beaucoup plus interventionniste qu’à l’accoutumé. Le montage se resserre sur des événements et traumatismes précis, dont l’évocation est traversée par la douleur ou la colère.

Expérimentations sonores

Grâce à un mixage sonore d’une grande précision, les compositions de Wang Xilin s’entremêlent à la parole et, parfois, vont jusqu’à recouvrir sa voix. La musique semble alors prendre le relais du témoignage, comme pour transposer ce récit en symphonie. Il décrit lui-même ce processus créatif au cours de son introspection : “Les aigus du violon pour le grésillement du fer rouge, le xylophone et le tuba pour la fumée.”

Avec ces expérimentations sonores, Wang Bing figure ainsi la puissance expressive de la musique, qui, sans l’aide d’aucun mot, se fait le transport des affects et des histoires vécues et devient à sa manière un acte de résistance.

Le documentaire Man in Black est disponible sur Arte.

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