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Mer Rouge : prix du fret, défection des transporteurs… Le commerce mondial perturbé

Quand un conflit en alimente un autre. Les attaques des rebelles houthistes se poursuivent sans s’affaiblir dans la mer Rouge, depuis fin novembre 2023. Ces derniers affirment ne viser que les navires traitant avec Israël, et ainsi agir en solidarité avec les Palestiniens confrontés à la guerre entre l’Etat et le Hamas dans la bande de Gaza.

Encore cette semaine, au large du Yémen, un nouveau tir de missile a touché ce mardi un vraquier grec battant paillon maltais. Un cargo américain avait également été ciblé, le lundi 15 janvier, dans le golfe d'Aden par un tir similaire.

Problème : ces attaques se multiplient dans la zone du détroit de Bab al-Mandeb, qui contrôle l’accès au sud de la mer Rouge, où passe environ 12 % du commerce maritime mondial. Depuis la mi-novembre, le nombre de conteneurs a chuté de 70 %, selon les experts maritimes.

Deux navires touchés par des missiles houthis en mer Rouge

Itinéraire alternatif vers le cap de Bonne-Espérance

De nombreux armateurs ont préféré interrompre leur trafic dans cette zone. Ainsi, ce mercredi, trois des principaux transporteurs maritimes japonais ont confirmé qu’ils suspendaient le transit de tous leurs cargos par la mer Rouge, en raison des tensions dans cette région, afin de "garantir la sécurité des équipages".

Une décision similaire avait été prise par certaines grandes compagnies pétrolières (BP, Shell, QatarEnergy) et de transport maritime (MSC, Maersk, Hapag-Lloyd, CMA CGM…) qui, depuis plusieurs semaines, veulent éviter la mer Rouge jusqu’à nouvel ordre.

Nombre d’entreprises semblent opter pour un itinéraire alternatif autour du cap sud-africain de Bonne-Espérance pour relier l’Europe à l’Asie. Ainsi, les transporteurs ont dérouté "plus de 200 milliards de dollars de marchandises" vers cette zone, précise la chaîne de télévision financière américaine CNBC.

Selon les données de Flexport, spécialiste de la logistique, "la part des navires qui ont choisi de passer par le Cap de Bonne-Espérance au lieu du canal de Suez est passée de 13 à 85 % depuis la fin novembre", peut-on lire dans le quotidien économique allemand, Handelsblatt. Mais ce détour de quelque 6 000 kilomètres allonge les délais de livraison d’une dizaine de jours en moyenne.

Pour ajouter aux difficultés, une autre région du monde est touchée, cette fois-ci par des risques climatiques. La sécheresse qui frappe le canal de Panama a fortement ralenti le transit des navires entre l’Asie et les Etats-Unis. Alors qu’en temps normal une quarantaine de porte-conteneurs l’empruntent chaque jour, ce chiffre est réduit mi-janvier à 24 passages quotidiens.

Arrêt de production et retards de livraison

Résultat, plusieurs entreprises ont déjà annoncé des délais, à l’instar du géant suédois du meuble Ikea ou de certains constructeurs automobiles. En Allemagne, comme le rapporte le quotidien Handelsblatt, "c’est chez Tesla, dans le [land du] Brandebourg, que cela se voit le plus jusqu’à présent : les attaques incessantes des milices houthistes yéménites sur les convois commerciaux en mer Rouge touchent l’économie allemande".

Le 11 janvier, le constructeur américain de voitures électriques a arrêté la production dans sa Gigafactory du nord du pays "pendant deux semaines en raison des difficultés de livraison". L’usine de Volvo, à Gand (Belgique), devait également être fermée trois jours mi-janvier, faute de boîtes de vitesses, dont la livraison a pris du retard à cause de "réajustements dans les voies maritimes".

Enfin, le transport de gaz naturel liquéfié (GNL) "sera affecté" par l’escalade en mer Rouge, a affirmé mardi le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdulrahmane Al-Thani, lors du Forum économique mondial à Davos.

Menace inflationniste

Les conséquences sont irrémédiables sur les prix : les compagnies maritimes ont procédé à des hausses importantes des tarifs pour couvrir les frais liés à la crise. L’un des indicateurs de référence pour mesurer le coût de fret des marchandises acheminées depuis la Chine, le Shanghai Contenarized Freight Index (SCFI), a plus que doublé en un mois.

Attaques en mer Rouge: les prix bondissent

Le surcoût en termes de carburant est d’environ 20 %, selon la plateforme de logistique Container xChange, qui estime que la crise en mer Rouge pourrait faire grimper les coûts du transport maritime de 60 %, avec une surprime de l’ordre de 20 % pour les assurances des armateurs.

Cela fait émerger le spectre d’une inflation renouvelée. Ces craintes ont été évaluées par le cabinet international Oxford Economics à 0,7 point supplémentaire d’inflation mondiale en fin d’année 2024, "dans l’hypothèse où "la mer Rouge se fermait aux bateaux pendant plusieurs mois et que les frais de transport demeuraient autour de deux fois le prix de décembre". Tout dépendra donc de la durée de la crise.

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