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Emmanuel Macron et la santé : responsabiliser les malades, vraiment ?

Emmanuel Macron et la santé : responsabiliser les malades, vraiment ?

Les malades peuvent se préparer à devoir ouvrir un peu plus leur porte-monnaie. Lors de sa conférence de presse, Emmanuel Macron a fait peu d’annonces nouvelles en matière de santé, alors que les déserts médicaux continuent de se creuser, et les difficultés de l’hôpital de s’approfondir. Le Président s’est contenté d’écarter une nouvelle fois toute régulation de l’installation des médecins, et de rappeler le "cap" fixé ces dernières années : délégation de tâches aux paramédicaux, recrutement d’assistants médicaux, service d’accès aux soins qui devrait bientôt toucher "100 %" de la population. Les hospitaliers, eux, ont été renvoyés aux hausses de salaires et aux moyens débloqués dans le cadre du Ségur de la santé. Le chef de l’Etat a simplement insisté sur la nécessité de mieux aider les personnels non médicaux à se loger dans les grandes villes.

Pour désengorger les urgences, la seule vraie nouveauté concerne la "responsabilisation de ceux qui ont recours de manière indue" à ces services. Le Président a ainsi fait part de sa volonté d’appliquer un "reste à charge aux gens qui vont aux urgences pour un petit bobo". Une mesure qui s’annonce difficilement applicable pour plusieurs raisons. D’abord, les passages "non urgents" et donc inappropriés aux urgences ne sont en réalité pas si nombreux : une étude publiée en 2019 avait montré qu’ils concerneraient seulement 6 % des recours à ces services. Cette réforme aurait donc une portée limitée… pour une mise en œuvre qui relèvera à n’en pas douter d’une véritable usine à gaz, car établir les critères pour définir précisément cet usage abusif s’annonce délicat. Une telle mesure pourrait aussi potentiellement décourager des malades de consulter alors qu’ils en auraient réellement besoin. Ils risquent ensuite de se retrouver dans une situation bien plus grave… et bien plus coûteuse pour la collectivité.

Doublement des franchises médicales

Un tel reste à charge serait aussi injuste, puisqu’il pèserait essentiellement sur les malades dépourvus d’assurance santé, sauf à imaginer interdire aux complémentaires de les rembourser. C’est déjà le cas pour les franchises médicales instaurées par Roselyne Bachelot, quand elle était ministre de la Santé de Nicolas Sarkozy en 2008. Après plusieurs mois de tergiversations, Emmanuel Macron a tranché ce soir : ces franchises seront bien revalorisées. "Doubler la franchise sur les médicaments de 0,5 centime à un euro n’est pas un crime", a-t-il dit. Tout en précisant que les patients en affection de longue durée (c’est-à-dire souffrant de maladies chroniques, affections cardiovasculaires, cancers, diabète…) seront "protégés" par un plafond de 50 euros par an.

Une annonce qui ne manquera pas de faire réagir les associations de malades. Un doublement des franchises les amènera par définition plus rapidement qu’aujourd’hui à ce plafond. Or on voit mal en quoi ces patients, atteints de pathologie graves, seraient "protégés" alors qu’ils devront payer 50 euros de leur poche chaque année… Déjà sur la table l’an dernier, ce projet, largement critiqué par les syndicats de médecins libéraux et par les partis d’opposition, n’avait finalement pas été inclus dans la loi de finances de la sécurité sociale pour 2024. Charge désormais à Gabriel Attal et à Catherine Vautrin de faire adopter cette mesure, qui devrait rapporter 800 millions d’euros d’économies.

Alors que le Président a finalement assez peu évoqué la santé dans son propos liminaire, la tonalité globale de sa conférence de presse ne manquera pas d’inquiéter un peu plus les acteurs du secteur. Après les promesses des années Covid, la page des investissements et des grandes réformes dans ce domaine qui préoccupe pourtant particulièrement les Français semble désormais tournée.

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