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Dati, Le Maire, Darmanin… Trois conseils à Gabriel Attal pour manager les fortes têtes

Dati, Le Maire, Darmanin… Trois conseils à Gabriel Attal pour manager les fortes têtes

Ne plus se raser pour paraître plus vieux ? Préférer les tenues sombres ? Relooker le nouveau Premier ministre, 34 ans, est relativement facile pour lui donner une apparence de maturité qui tranche avec son physique encore juvénile et souriant. "Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant", gronde l’Ecclésiaste (X, 16). "Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années", rétorque Rodrigue, dans Le Cid, de Corneille, paru en 1637. A l’époque, sous le règne de Louis XIII, né en 1601 et intronisé en 1610, à la mort de son père, priver de ces caractéristiques de jeunesse ne rimait déjà plus à rien. L’âge du capitaine Attal, plus jeune Premier ministre de l’histoire de la Vᵉ République, ne devrait plus être à la Une, dans un monde qui se veut inclusif et qui doit donc accepter comme il est le manager du gouvernement. "Action, action, action", a-t-il impulsé. Son objectif : s’imposer comme chef dans un contexte piégé : certains de ses collègues rêvaient de cette promotion interne qu’il a emportée au nez (et à la barbe) de plus anciens.

Inutile de jouer les fiers à bras si ce n’est pas dans son ADN, d’outrer ses discours pour muscler son jeu ou de choisir une personnalité à sacrifier pour montrer son autorité. Premier conseil : rester soi. C’est parce qu’il était lui qu’il a été choisi. Mettre en avant ses qualités, ses caractéristiques, car l’ex-ministre de l’Education nationale a endossé un nouvel habit qui est désormais bien le sien et qui n’appartient à personne d’autre. D’une part, pour ne pas virer schizophrène en s’interrogeant en permanence sur quelle personnalité sortir et, d’autre part, pour ne pas "mentir aux Français", puisque c’est l’engagement premier pris par le Premier. Et c’est à l’équipe de le suivre pour mener à bien leurs batailles collectives. Or, lorsqu’on obtient un poste convoité par bien d’autres et par la seule volonté du prince, on est attendu non pas au tournant mais à chaque pas.

Se mettre dans la poche "les durs à cuire"

Il a cent jours devant lui, une période de trois mois, une sorte d’état de grâce qui fait allusion à l’évasion de l’empereur Napoléon de l’île d’Elbe, le 20 mars 1815, pour reprendre le pouvoir. Le deuxième conseil est de séduire les ambitieux (Gérald Darmanin et Bruno Le Maire, qui ont les yeux rivés sur 2027), s’imposer auprès de ses ex-collègues (les membres du gouvernement d’Elisabeth Borne qui ont été reconduits) ou rassurer fermement ses ex-chefs (Gabriel Attal a été sous les ordres de Bruno Le Maire à Bercy). Sans oublier de mettre dans sa poche "les durs à cuire", politiques stars, comme Rachida Dati, qui intègre le gouvernement Attal 1, sans avoir travaillé jusqu’alors avec lui. Etre disponible pour tous et à chaque instant, donner des gages pour que ceux qui veulent être autonomes puissent continuer ainsi, en exigeant toutefois une loyauté sans faille de leur part. C’est du donnant-donnant : on travaille ensemble, on va dans une même direction. Pour les hésitants qui ont connu une autre cheffe, leur donner une feuille de route aussi précise que possible, quitte à rompre avec le passé. "Travailler, travailler, travailler."

Cela ne suffit pas : même si ce travail est fait, il y a toujours des risques de dérapage. Des membres de l’équipe mal préparés, une situation nationale compliquée, un épisode inattendu, et le navire amiral tangue. Ecouter les spécialistes en évitant de succomber à ses biais cognitifs, s’entourer d’une équipe capable de dénicher les meilleurs experts sur un thème précis et accepter d’entendre ce qui dérange est le troisième conseil. Sans en abuser, une certaine modestie fait partie du costume, mais il faut parfois faire preuve de hauteur si certains, à l’étage inférieur, jouent les arrogants et défient le chef pour le faire trébucher. Même si la décision finale revient au locataire de Matignon et doit être prise rapidement, il ne doit jamais se précipiter dans l’analyse, ne pas "précrastiner", a fortiori s’il est un hyperactif. Résister au stress du bon élève qui doit faire ses preuves. Avoir confiance dans un directeur de cabinet capable de dire, comme à César : "Hominem te esse memento" ("Rappelle-toi que tu n’es qu’un homme"). En cas de souci, conserver cette modestie à l’égard de l’étage supérieur en lui proposant des solutions et en acceptant celle que l’Elysée aura choisie… sauf si celle-ci est contraire à ses valeurs. Et un jour, peut-être, rêver comme Gérard Lenorman : "Si j’étais président de la République/Jamais plus un enfant n’aurait de pensée triste"…

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