"Plus Trump que Trump" : Donald Jr, l’ambitieux "chauffeur de salle" de son papa
Dans la famille Trump, on connaissait le père. Mais la star politique montante, c’est le fils. Donald Junior a recommencé, comme en 2020, à sillonner le pays pour mobiliser la base trumpiste. Il a adopté le même discours populiste, la même rhétorique incendiaire, les mêmes théories du complot que son paternel. Mais c’est un meilleur orateur. Ce barbu souriant de 46 ans évite les digressions filandreuses de Donald Trump et manie avec humour attaques et provocations, comme on a pu le vérifier dans l’Iowa début janvier. Là, juste avant les caucus remportés par son père avec 51 % des voix, il a multiplié les interventions pour attaquer pêle-mêle Hunter Biden (le fils de), Nikki Haley – "qui ne connaît rien aux avions mais siège au conseil d’administration de Boeing" – et, plus généralement, "l’élite qui vit dans un monde parallèle".
Auteur de First Dads, un livre sur les "présidents papa", Joshua Kendall décrypte : "Les enfants de président œuvrent souvent discrètement en coulisses dans les campagnes. Don Jr., lui, joue le rôle de pitbull agressif. Il est parfois plus Trump que Trump, il va plus loin que lui dans ses déclarations." Il a par exemple suggéré dans un tweet que Joe Biden était pédophile, il a appelé à "la guerre totale" contre les élections truquées…
L’aîné des Trump a mis du temps à trouver sa voie. Après une période de rébellion contre son père, il rentre dans le rang pour rejoindre le groupe immobilier familial. En 2016, il est cantonné à des tâches marginales dans la campagne présidentielle. Mais il passe brusquement au premier plan lorsqu’on apprend qu’il a organisé une réunion avec des Russes soi-disant détenteurs de révélations sulfureuses sur la candidate Hillary Clinton. Ce scandale déclenche une enquête sur la collusion de l’équipe Trump avec Moscou et renforce la piètre opinion que son père a de lui. Celui-ci avait protesté lorsque Ivana, sa femme de l’époque, avait proposé de donner au bébé le prénom Donald Jr. "Et si c’est un loser ?" s’était-il inquiété.
Une fois à la Maison-Blanche, Donald Trump s’entoure d’Ivanka, sa fille, et de son gendre, Jared Kushner. "Don" et Eric, son frère cadet sont, eux, chargés de gérer le groupe familial. Mais Don Jr. se découvre un talent politique. Ce grand amateur de chasse et de pêche sait s’adresser aussi bien aux électeurs ruraux qu’aux millionnaires de Floride.
Don Jr, l’héritier ?
"Il a une forte présence sur scène, il sait enflammer les foules, leur parler le langage trumpiste. Partout, il fait salle comble", commente Brian Seitchik, un ex-consultant de l’équipe de Trump. Souvent accompagné de Kimberly Guilfoyle, une ex-journaliste de Fox News pour qui il a divorcé, Don Jr. devient l’une des personnalités conservatrices les plus populaires du pays et compte près de 11 millions de fans sur X (ex-Twitter).
On prédit à ce père de cinq enfants une brillante carrière d’élu ou d’animateur de talk-show. Curieusement, peut-être parce que le rôle de provocateur est moins exigeant ou parce que papa n’apprécie pas qu’on lui fasse de l’ombre, Don Jr. se contente de podcasts et publie deux livres pamphlet contre les élites de gauche. Leurs ventes s’envolent grâce à l’achat par le Parti républicain et d’autres organisations de milliers d’exemplaires que l’on distribue aux heureux donateurs.
Ces jours-ci, Don Jr. fait figure d’héritier politique, faute de concurrence. Ivanka et Jared Kushner, qui ont quitté Washington pour Miami, ont pris leurs distances. En 2022, lorsque Donald Trump a annoncé sa candidature à la présidence, sa fille a publié le même jour un communiqué : "J’aime beaucoup mon père. Mais pour l’instant, je choisis de mettre la priorité sur mes jeunes enfants… et ne prévois pas d’être impliquée en politique."
Jared Kushner, lui, a créé un fonds d’investissement qui a reçu notamment 2 milliards de dollars de l’Arabie saoudite. Le couple, selon la rumeur, sort cependant un peu plus en ville, signe qu’il pourrait reprendre du service. En décembre, il s’est rendu en Israël sur le site de l’attaque du Hamas et a rencontré diverses personnalités.
Car les finances de la famille risquent de dépendre de plus en plus de ses succès politiques. La Trump Organization vient d’être jugée coupable d’avoir frauduleusement gonflé ses actifs. Le procureur a requis 370 millions de dollars d’amende et une interdiction à vie pour Donald Trump (et cinq ans pour ses deux fils) de s’impliquer dans l’immobilier à New York.
On attend la décision du juge. Quant à Don Jr., certains le voient déjà candidat à l’élection présidentielle de 2028. Un nouveau Trump à la Maison-Blanche ? En meeting dans l’Iowa début janvier, l’intéressé s’est vu demander par un membre de l’auditoire s’il envisageait de se présenter en 2028. Il n’a pas complètement exclu cette éventualité.