Mobilisé sur le blocage de l'A71 par les agriculteurs : "Mes enfants de 3 et 5 ans, je ne les vois guère"

Vincent Anglaret est le propriétaire de la grande remorque qui, depuis une semaine, sert de table de pique-nique, estrade pour les discours et surtout point de ralliement.

Des doubles journées et un père mobilisé

Tous les jours, il se lève à 6 heures et travaille dans son exploitation à Sauxillanges jusqu’à 9 heures. Heure à laquelle il rejoint la mobilisation. Et pendant ce temps-là?? "Pendant ce temps, c’est mon père qui gère." À 73 ans, il venait de prendre sa retraite… Sa femme, Hélène, l’épaule. En s’installant en 2001, Vincent double la production de l’exploitation. De 222.000 litres de lait par an à 500.000. 

Le double de boulot et on n’a pas gagné un rond de plus, comme me disait mon père. Il faut 3 litres de lait pour payer un litre de gazole non routier. Il y a 20 ans, c’était l’inverse.

Surtout, surtout, ne pas lâcher

Retour à 2024. Vincent retrouve la ferme aux alentours de 18 heures et se remet au travail jusqu’au souper. "On a la chance qu’aujourd’hui ce soit beaucoup robotisé. Et en cette période, il y a moins de travail. Ça aurait été en mai, je ne sais pas comment on aurait fait. Et dans quinze jours, on va commencer à préparer les clôtures et tout."

Le seul moment où les yeux cernés de Vincent s’assombrissent, c’est en évoquant ses deux enfants de 5 et 3 ans. "Oui, je ne les vois guère." Il redresse la tête, "mais c’est pour eux qu’on fait ça". Ne pas laisser la détermination s’effriter. "Il ne faut surtout, surtout pas lâcher. La marmite bout et la soupape va péter." Depuis son installation en 2001, Vincent n’a jamais vu une telle mobilisation. À côté de lui, Denis, actif depuis 1985, non plus. "Regarde autour de toi, tu vois un camion de CRS?? Non. Personne. Parce qu’on n’abîme rien et parce qu’on est plus nombreux qu’eux."

Simon Antony