Woke fiction, le cinéma français n’est pas épargné
Critiques et spectateurs finissent par se lasser des films partisans et répétitifs (pro-immigration, anti-flics, etc.). Mais le filon reste très porteur pour certains…
Dans son excellent et très instructif essai, Woke Fiction (1), Samuel Fitoussi énumère les « commandements » du cinéma wokiste. Parmi ceux-ci : « Tes héros seront vertueux. » « Tes minorités seront discriminées. » « Tu effectueras un découpage identitaire de la société et tu la “représenteras”. » « Tes personnages non blancs seront gentils, tes personnages blancs, méchants. »
Samuel Fitoussi analyse comment le wokisme a conquis les plateaux de cinéma
Le cinéma nord-américain, écrit Fitoussi, subit depuis un bon moment l’idéologie woke, comme le prouvent une partie de sa cinématographie récente et les « critères de diversité » que l’Académie des Oscars impose désormais à tout film prétendant à un prix : « Sur une plateforme internet, les sociétés de production devront indiquer la couleur de peau, le sexe, le genre et l’orientation sexuelle de chaque personne impliquée dans la création du film, des acteurs aux techniciens de plateau. » En France, en plus de constater l’imprégnation du wokisme dans les publicités et dans certaines séries, les spectateurs peuvent l’observer de plus en plus fréquemment dans les films de cinéma subventionnés par le CNC (et son fonds « diversité ») et, pour partie, l’argent public.
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Le Collectif 50/50 lutte, en partenariat avec le ministère de la Culture, « pour “la parité, l’égalité et la diversité” dans le cinéma français » et a créé un annuaire professionnel recensant « “les talents féminins et/ou issus d’une diversité sociale, ethnique et culturelle” afin d’aider “les recruteur·se·s” à “accéder à des équipes techniques et artistiques mixtes et paritaires”. Parmi les 981 professionnels du cinéma répertoriés sur l’annuaire, on dénombre… 0 homme blanc », indique Samuel Fitoussi. Certains scénarios se conforment à une « lutte contre les stéréotypes » tournant à la caricature, en particulier quand il s’agit de « donner une bonne image de la diversité ». Et l’essayiste de citer les noms des nombreux films français qui en 2022 sont sortis du même moule de propagande diversitaire et immigrationniste : Les Survivants, Les Engagés, Ils sont vivants, Les Rascals, Rodéo, etc. « Pourquoi, interroge Fitoussi, accorder une telle importance aux stéréotypes véhiculés par la fiction sur les minorités ethniques ? Peut-être parce que certains militants (et ceux-ci semblent surreprésentés dans l’industrie du cinéma) sont persuadés que si des Français accordent leurs suffrages à des candidats classés à droite, c’est qu’ils ont été victimes de désinformation xénophobe. Il faut donc les rééduquer, leur montrer que la diversité est une chance et l’opposition à l’immigration une absurdité. » Malgré les critiques souvent élogieuses des médias progressistes, ces films n’ont eu aucun succès public.
Pourtant, profitant de notre illustre « exception culturelle française », des subsides inhérents à cette dernière et de la publicité des médias bien-pensants, des scénaristes et des réalisateurs continuent de fabriquer à la chaîne des films obéissant aux commandements wokes, diversitaires et immigrationnistes. Ces films, formatés pour vanter l’apport bénéfique de l’immigration et le merveilleux « vivre-ensemble » multiculturel qui en découlerait ou pour dénoncer le racisme d’État, les violences policières et la discrimination systémique dont souffriraient les « jeunes des banlieues », envahissent les écrans français. Comme on pouvait s’y attendre, ces calamités propagandistes subventionnées en partie avec notre argent sont des fiascos. Pourtant, après que nous aurons évoqué rapidement quelques unes des dernières productions en question, nous verrons que, financièrement parlant, tout le monde n’y perd pas.
Une ribambelle de films couverts d’éloges, mais qui font un flop au box-office
Avant que les flammes ne s’éteignent, le film avec Camélia Jordana sur Assa Traoré, les « violences policières » et le « racisme d’État », a franchi péniblement, après un mois d’exploitation, la barre des 23 000 spectateurs, avant de disparaître dans les oubliettes de l’histoire du cinéma (voir mon papier du 7 déc. 2023). Très, très grosse gamelle.
Ma France à moi, de Benoît Cohen et avec Fanny Ardant, raconte la vie d’une bourgeoise soixantenaire qui, s’emmerdant comme un surmulot dans son appartement parisien, décide d’accueillir Reza, un jeune afghan : « Ces deux êtres, qui n’ont rien en commun, vont devoir apprendre à vivre ensemble… » Grosse promo. France Inter reçoit le réalisateur et l’actrice principale, ensemble, séparément, le week-end, en semaine. L’Obs souligne que Benoît Cohen s’acquitte magistralement de sa tâche, à savoir « prôner la solidarité, plaider pour le vivre-ensemble et déconstruire les préjugés ». Le public n’en peut plus de cette pommade. Sorti le 20 décembre 2023, le film cumule… 28 585 spectateurs après un mois d’exploitation. La dernière semaine a vu… 96 spectateurs s’égarer dans les quelques dernières salles projetant ce navet militant. Énormissime bide.
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Stéphane Marchetti a écrit et réalisé La Tête froide, avec Florence Loiret Caille dans le rôle principal. L’histoire (je vous la fais courte) : Les Alpes en hiver. Marie fait du trafic de cartouches de cigarettes entre la France et l’Italie. Elle rencontre Souleymane, jeune « réfugié » prêt à tout pour rejoindre sa petite sœur. La presse est dithyrambique et abuse du vocabulaire moralisateur : fraternité, solidarité, humanisme, altruisme, empathie, etc. La radio publique ne tarit pas d’éloges et consacre de nombreuses émissions au film. Rien n’y fait. Les deux premières semaines d’exploitation ne comptabilisent que 21 921 spectateurs. Bérézina en vue.
« La police, dans le logiciel woke, occupe une fonction toute particulière : celle de Némésis absolue, de dominante parmi les dominants. Il est inadmissible de la représenter positivement. » Samuel Fitoussi.
Attardons-nous sur Le cas de Bâtiment 5, réalisé par Ladj Ly, intéressant à plus d’un titre. On se souvient du succès du premier long-métrage du réalisateur, Les Misérables : une presse aux anges, un prix du Jury à Cannes, quatre Césars dont celui du meilleur film, notre président « bouleversé par la justesse » du film et réclamant à cor et à cri des idées pour « améliorer les conditions de vie dans les quartiers » après l’avoir vu. Résultat : 2,2 millions de spectateurs et une nomination à l’Oscar du meilleur film international (qui reviendra finalement à Parasite, du Coréen Bong Joon Ho, ce qui n’est que justice). Bâtiment 5, deuxième film d’un triptyque prévu sur « les cités », était par conséquent attendu avec impatience. Le synopsis promettait d’ailleurs beaucoup : « Haby – « noire, musulmane, qui porte le voile », précise systématiquement le réalisateur dans les nombreuses émissions de la radio publique qui l’ont invité – jeune femme très impliquée dans la vie de sa commune, découvre le nouveau plan de réaménagement du quartier dans lequel elle a grandi. Mené en catimini par Pierre Forges, un jeune pédiatre propulsé maire, il prévoit la démolition de l’immeuble où Haby a grandi. Avec les siens, elle se lance dans un bras de fer contre la municipalité et ses grandes ambitions pour empêcher la destruction du bâtiment 5. »
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L’Humanité, il fallait s’y attendre, s’emballe : « Un grand film qui bat à plate couture tous les poncifs sur le sujet et les mauvais procès à l’encontre des habitants (des cités). » Les Inrocks, Elle et Franceinfo s’enthousiasment. Les critiques des « médias bollorisés », pour parler comme Thomas Legrand, sont eux-mêmes sous le charme : CNews encense le film et « attend avec impatience le dernier volet de la trilogie du cinéaste consacrée à la banlieue », tandis que le JDD n’émet qu’une très légère réserve sur l’aspect « un brin démonstratif » du scénario. En revanche, une partie de la presse habituellement férue de ce genre de cinéma, Libération et Le Monde en tête, note plus sévèrement le film, jugé trop mécaniquement manichéen. Télérama, jésuite comme jamais, n’en dit pas vraiment du mal mais n’en dit pas grand bien non plus – une tiédeur qui vaut sanction. De la même manière que l’académo-militantisme nuit à la véritable recherche universitaire, l’artistico-militantisme nuit à la création cinématographique – certains critiques finissent par se lasser de ces films partisans et répétitifs, et le public va voir ailleurs s’il y est. Résultat des courses : 164 295 spectateurs après presque deux mois d’exploitation, dont 615 seulement pour la dernière semaine. Au vu du budget investi, de l’aura du réalisateur « issu de la diversité » et du succès attendu, cela équivaut à une catastrophe industrielle.
Le wokisme, ça paye (mais pas pour tout le monde)
En parlant de budget, Siritz.com, blog destinė aux professionnels du cinéma et de l’audiovisuel relayant les informations de Cinéfinances.info, nous en apprend de belles. Le budget des Misérables était de 2,1 millions d’euros. Pour la préparation, 28 jours de tournage et la post-production, la rémunération du réalisateur Ladj Ly a été de 60 000 €, ce qui représentait « un peu plus que la moitié de la rémunération médiane des réalisateurs de films français sortis en 2020 », précise le site. Jusque-là, rien à dire. Le budget de Bâtiment 5 a été, lui, de 8,3 millions d’euros. France 2 a co-produit le film qui a reçu 550 000 euros d’avance sur recettes par le CNC et, en tout, 2,3 millions d’euros d’argent public. « J’ai fait bosser plein de gens du territoire et, cette fois, le budget du film nous a permis de les payer correctement », a déclaré Ladj Ly à Télérama, le 6 décembre 2023. Il a surtout permis de payer très correctement… Ladj Ly. En effet, apprend-on grâce au site internet Siritz, « pour la préparation, 42 jours de tournage et la post-production, la rémunération du réalisateur a été de 450 000 €. C’est 3,3 fois la rémunération moyenne des réalisateurs de ces films de fiction. » En plus de ce pactole, Ladj Ly a touché, en tant que co-scénariste, la moitié d’une autre rémunération de 500 000 euros, somme qui est « deux fois et demi le budget moyen des scénarios de ces films », précise-t-on sur le site spécialisé. Dénoncer sans relâche le « racisme structurel », les « violences policières » et les « discriminations systémiques » dont souffriraient les « minorités » en France peut s’avérer très rémunérateur.
Raison pour laquelle, comme Rokhaya Diallo, Ladj Ly ne perd jamais une occasion d’accuser la France de tous les maux, surtout lorsqu’il est à l’étranger. Le Parisien a rapporté les propos tenus par le réalisateur au Canada, en septembre 2023, dans un entretien donné à la revue Deadline à l’occasion de la présentation de son dernier film au festival de Toronto, à propos des « violences policières » dans son pays : « C’est un problème récurrent en France : la violence, les meurtres commis par la police dans ces quartiers. Malheureusement, ce genre de choses (comme la mort de Nahel Merzouk) se produit tous les mois. L’histoire se répète. […] La police a carte blanche pour tuer ces jeunes sans jamais être condamnée. C’est un fait et les chiffres le montrent. Le problème n’est pas nouveau. » Dans la foulée, lors d’une conférence animée par le Hollywood Reporter, Ladj Ly a affirmé qu’en France « la police a le feu vert pour tuer les Noirs et les Arabes ». S’ils prennent connaissance de ces déclarations outrancières et mensongères, espérons (sans trop y croire) que l’audiovisuel public et le CNC y regarderont à deux fois avant que d’aider au financement du prochain film de ce réalisateur discréditant systématiquement la France, sa police et une partie de ses habitants, tout en profitant de largesses financières obtenues grâce à la très cocardière « exception culturelle française ».
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