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Le froid, les mains, le savon, le bonnet… On fait le tri dans les idées reçues sur les infections hivernales

Le froid, les mains, le savon, le bonnet… On fait le tri dans les idées reçues sur les infections hivernales

À tous ceux pour qui l’hiver rime avec pratiques transmises de génération en génération : nous avons sélectionné quelques croyances virales, et tenté de démêler le vrai du faux avec l’aide du service d’hygiène hospitalière du CHU de Clermont-Ferrand.

Ne pas sortir les cheveux mouillés. Ne pas marcher pieds nus sur le carrelage. « Prendre froid ! » Même entendus ad nauseam, on se surprend à reprendre les poncifs façon mantras. Et si c’était n’importe quoi ? Pour faire la part des choses, nous nous sommes, entre autres sources, tournés vers le service d’hygiène hospitalière du CHU. Ousmane Traoré, chef de service, remet un peu d’ordre dans les idées reçues.

1. "Attraper froid" ?

Le froid à lui seul ne rend pas malade si l’on n’est pas en contact avec un agent pathogène (virus, bactérie, parasite, moisissure ou agent chimique). Sauf à se faire véritablement congeler une partie du corps. En revanche, l’exposition au froid peut irriter (bronches, peau…).

Les contractions musculaires au froid peuvent aussi provoquer, ou réveiller, des douleurs (contractures, raideurs…). L’idée d'attraper froid renvoie plus probablement aux défaillances des systèmes immunitaires affaiblis en hiver, et muqueuses plus fragiles. "Pour ces raisons, le contact avec un virus peut aboutir plus facilement à une infection ", estime le Pr Traoré.

 Il y a moins de rayonnement d’UV susceptibles de dégrader les micro-organismes.

Des travaux américains, publiés en 2022, concluent aussi à une corrélation entre la sensibilité aux virus hivernaux et la baisse de la température des parois nasales : à 32 °C au lieu des 36 ou 37 °C, elles rempliraient moins bien leur rôle de barrière naturelle.

2. Y a-t-il bien plus d’épidémies en hiver ?

"C’est une grande question que l’on se pose depuis des décennies. Il y a des hypothèses ; pas de vraies certitudes."

Première hypothèse : une survie plus longue des agents pathogènes dans un environnement hivernal. "Ils sont moins exposés aux rayonnements. On connaît notamment l’effet antibactérien des UV. " 

L’hiver est associé à des modes de vie plus confinés, avec des contacts entre humains plus importants, de la promiscuité dans les transports, au travail… 

Deuxième hypothèse : le facteur social aggravant. En hiver s’ajoutent les brassages de population pendant les fêtes. La conséquence, c’est davantage de virus excrétés par la respiration. Lesquels vont persister en plus forte densité dans un lieu donné. "Nos parents agissaient de bon sens en aérant régulièrement?!"

3. Aération ou ventilation ?

L’aération n’est jamais une mauvaise idée. Mais la ventilation mécanique peut l’être. Brasser un air contaminé contribue à diffuser les virus qui sont présents. "Mais les systèmes de ventilations contaminants n’ont été que très exceptionnellement démontrés, notamment pour les restaurants que l'on avait incriminés en Chine." Cela reste toutefois possible (notamment dans les avions où l’environnement est exceptionnellement clos).

 Le défi du XXIe siècle sera peut-être lié aux injonctions contradictoires entre l’isolation thermique et la circulation de l’air.

Ce qui reste avéré, c'est qu'un système de ventilation/climatisation mal entretenu peut favoriser des problèmes à lui tout seul. Il peut héberger des moisissures, des bactéries… " Cela doit être entretenu. Il ne s’agit pas d'installer et laisser vivre ! ".

Pour finir, une aération ou ventilation insuffisante peut aussi favoriser une humidité dans les murs : elle sera favorable à la prolifération des moisissures.

4. Un virus survit-il quelques heures ? Ou quelques semaines ?

"Les agents pathogènes les plus résistants sont les virus de la gastro-entérite" (norovirus, rotavirus). Il en existe plusieurs. Ils provoquent communément vomissements et diarrhées. Ils peuvent persister jusqu’à plusieurs semaines dans l’environnement. "Ce sont aussi les plus résistants à : la chaleur, aux ultraviolets, et aux désinfectants."

 Il y a moins de rayonnement d’UV susceptibles de dégrader les micro-organismes.

Mais attention aux bactéries, notamment echericschia coli ou staphylocoques dorés. Ils peuvent persister plusieurs mois sur des surfaces inertes.

5. Par le nez ? La bouche ? Les yeux ? Les mains ?

Les virus se transmettent essentiellement à la faveur des contacts humains, avec et sans toucher. Les virus respiratoires sont transmis dans le cadre d’une relative proximité entre individus. Mais d’autres facteurs entrent en jeu : conditions d’humidité, de projection (respiration calme ou plutôt toux, éternuement, chant). Quant à la distance protectrice : "C’est un grand facteur de débat, renforcé par le Covid…"

La règle, c’est qu’il vaut mieux être à 2 mètres qu’à un mètre d’une personne contagieuse.

En plus du mode respiratoire direct, les mains peuvent contaminer : à l’occasion d’un geste parasite. "Vous contaminez d’abord vos mains, puis, en fonction de ce que vous allez faire, vous vous contaminez en touchant vos yeux, le nez… Mais la maladie s’attrape au niveau oculaire ou respiratoire : pas par les mains ! ".

Pour l’immense majorité des virus, la voie digestive n’est pas une source de contamination. Elle en fait partie pour les bactéries.

6. Le passage aux toilettes : du sérieux ?

"Le microbiote humain le plus important se trouve dans le système digestif. Dans 1 g de selles émises par quelqu’un qui a une gastro-entérite, il y a des quantités phénoménales de virus. Il suffit d’une toute petite faute d’asepsie pour avoir des milliers de virus sur une poignée de porte, une chasse d’eau…" Or, il suffit de quelques dizaines de micro-organismes pour développer une gastro-entérite ! "C’est un lieu à risque où l’hygiène des mains est capitale."

7. Savon ou solution hydroalcoolique ?

"Les produits hydroalcooliques ont une efficacité beaucoup plus importante qu’un simple savon. Mais bien entendu, il faut utiliser l’eau et le savon pour des mains visiblement souillées ! " Attention, toutes les solutions hydroalcooliques ne se valent pas. " Il faut au moins 70 ou 75 % d’alcool. "

L‘eau de javel reste le meilleur désinfectant pour les objets et surfaces. Mais utilisée au bon dosage, et avant la date de péremption. "La javel se dégrade très vite et la chaleur accélère la dégradation".

Anne Bourges anne.bourges@centrefrance.com

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