"Il a fallu vingt ans pour que je sois diagnostiquée" : une association aide à mieux repérer l’autisme chez les personnes HPI
Sonia Fiquet est mère de famille et sait de quoi elle parle quand il s’agit d’autisme : ses trois enfants sont atteints de ce handicap (ne dites pas maladie). Elle le sait d’autant plus qu’elle a été elle-même diagnostiquée il y a quatre ans. À 51 ans, elle mettait alors enfin un nom sur des troubles que jusqu’à présent, les spécialistes rencontrés associaient à son autre particularité, être HPI, c’est-à-dire personne à haut potentiel intellectuel.
« Il a fallu vingt ans pour que je sois diagnostiquée autiste asperger. Ça a changé ma vie. Je comprenais enfin ce que l’on nomme la cécité contextuelle, qui suscite des comportements autocentrés. Pour moi, si quelqu’un faisait la tête, c’était forcément parce que j’avais fait quelque chose de mal. Tout cela rigidifie le handicap et je ne le voyais pas. »
Masquer les troublesProblème, les autres ne le voient pas non plus, car les personnes HPI atteintes d’autisme ont les capacités de compenser et de masquer leurs troubles. Chez elles, pas de manifestation extérieure comme chez les autres personnes autistes. « Tout reste à l’intérieur, mais le mécanisme est en marche, souligne Sonia Fiquet. L’autisme est un problème de synchronisation des synapses. Notre cerveau ne peut pas traiter correctement des infos trop denses. Avec des personnes HPI, qui ont la capacité de réguler leurs émotions, de s’adapter, on va croire que tout est OK alors qu’elles n’ont compris ni le contexte ni, parfois, de quoi on parle. »
Fragilité, vulnérabilité, suicidesRésultat, une fragilité, un stress qui touche tout autant les personnes HPI atteintes de troubles du spectre autistique. A fortiori si elles ne sont pas correctement diagnostiquées. « Le taux de suicide chez les autistes est presque trois fois supérieur à celui de la population normale. » Car avant cela, la fragilité peut se traduire par une exposition précoce à des maladies rares. « Ma fille aînée, qui n’accepte pas son autisme, souffre d’une maladie dégénérative de la moelle osseuse qui s’est déclarée à 23 ans alors qu’elle survient d’habitude beaucoup plus tard. »
Ou par une vulnérabilité plus grande : « Quand on souffre de TSA, on évalue encore plus mal les intentions des gens. Il y a ainsi beaucoup plus de personnes autistes victimes d’agressions sexuelles que dans la population générale », ajoute Sonia Fiquet, qui précise sans détours en avoir été elle-même victime dans son enfance.
Si le nombre de personnes atteintes de troubles autistiques est estimé à près de 600.000 en France (soit 0,89 % de la population), celui des personnes HPI-TSA n’est pas évalué. Sonia Fiquet avance tout de même une donnée : « 40 % des HPI qui consultent sont autistes. »
Améliorer l'accès au diagnosticEn première ligne, cette formatrice en communication relationnelle, basée à Avignon, a participé activement au lancement de l’association de défense des droits des personnes HPI et TSA, créée en novembre dernier, qu’elle préside. Premier objectif : améliorer l’accès au diagnostic. « Si les médecins, psychologues et psychiatres ne sont pas formés, ils ne nous voient pas. Des grilles de repérage sont en place, mais ça ne suffit pas. »
L’association milite aussi pour un meilleur accès à des thérapies comportementales adaptées. Et va commencer par une campagne de sensibilisation. Elle sera présente sur le salon de AutiChance, le 17 février, sur le campus de Paris-Cergy, et tiendra sa première assemblée générale le 29 février.
Contact. Association de défense des droits des personnes HPI et TSA. Site internet : addp-hpi-et-tsa.com. Mail : contact@addp-hpi-et-tsa.com.
Patrice Campo