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Loi immigration : le RIP des Républicains a-t-il une chance d'aboutir ?

Loi immigration : le RIP des Républicains a-t-il une chance d'aboutir ?

La riposte de la droite était attendue après la large censure fin janvier de la loi immigration par le Conseil Constitutionnel. Les Républicains vont tenter de soumettre plusieurs mesures retoquées par les Sages à un référendum d'initiative partagée (RIP), une procédure qui n'a jamais abouti pour l'instant.

"Il s'agit maintenant de rendre la parole au peuple français pour qu'il puisse se prononcer directement par référendum", affirme la droite dans l'exposé des motifs de cette proposition de loi qui ouvre la voie à ce RIP. Ce type de référendum, inscrit dans la Constitution depuis 2008, est une procédure qui n'a pas encore été couronnée de succès, les conditions pour qu'elle aboutisse étant difficilement surmontables.

Le principe : permettre aux parlementaires de provoquer un référendum avec le soutien d'une partie des électeurs, sans passer par un vote majoritaire au Parlement. Ainsi, le projet doit d'abord réunir au moins 185 parlementaires - soit un cinquième des 925 députés et sénateurs - puis passer dans un délai d'un mois le filtre exigeant du Conseil constitutionnel. Ce dernier a un mois pour juger de la conformité du texte.

Ensuite, il devra obtenir en neuf mois le soutien de 10% du corps électoral, soit environ 4,5 millions de personnes, avant que les Français puissent finalement se prononcer. Une fois que le nombre de signatures obtenues est vérifié par les Sages, le président de la République peut convoquer un réferendum - à moins que le Parlement n'examine la proposition de loi dans un délai de six mois.

A noter que la proposition de loi soumise au référendum ne peut porter que sur les domaines énumérés par l'article 11 de la Constitution : "l'organisation des pouvoirs publics" ainsi que les "réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent", est-il indiqué sur le site d'information du gouvernement.

En outre, la proposition de loi "ne doit pas avoir pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an et elle ne doit pas porter sur un sujet rejeté par référendum il y a moins de deux ans".

Le premier obstacle surmontable

Ainsi, avec 133 sénateurs et 62 députés, qui ont pratiquement tous voté le texte sur l'immigration en décembre, LR devrait être en mesure de surmonter le premier obstacle des 185 parlementaires nécessaires.

Les Républicains sont aussi persuadés que leur proposition de loi, composée de cinq articles, entre bien dans le domaine référendaire. Elle relève, selon eux, de "la politique sociale de la nation au sens du premier alinéa de l’article 11 de la Constitution".

La droite rappelle, par ailleurs, que les amendements qu'elle avait introduits pour durcir la loi sur l'immigration ont été censurés par les Sages non pas sur le fond, mais comme "cavaliers législatifs", car jugés sans lien avec le projet de loi initial.

AME, prestations sociales

Parmi les mesures retenues pour leur RIP, l'instauration d'une "condition de durée de résidence" pour le versement de certaines prestations sociales à des étrangers en situation régulière.

LR souhaite aussi réintégrer l'abandon de l'Aide médicale d'Etat, un dispositif permettant aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d'un accès aux soins. La droite n'a toutefois pas introduit dans son texte ni la déchéance de nationalité ni la remise en cause du droit du sol qui "n'entreraient pas dans le champ de l'article 11", indique une source du parti.

La fixation par le Parlement de l'instauration de quotas migratoires et le durcissement des conditions du regroupement familial ne figurent pas non plus dans leur proposition de loi.

Cette riposte de la droite intervient alors que le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, en visite dimanche à Mayotte, a annoncé une révision constitutionnelle destinée à supprimer le droit de sol sur l'île pour tenter d'enrayer l'immigration incontrôlée.

"Première étape"

Les Républicains avaient sévèrement critiqué la censure du Conseil constitutionnel, leur possible candidat à l'Elysée en 2027, Laurent Wauquiez, dénonçant un "coup d'Etat de droit" et leur patron Eric Ciotti déplorant "un hold up démocratique".

La droite rappelle toutefois que ces mesures ont été adoptés "très largement" par le Parlement et estime qu'une "très large majorité de Français y étaient favorables". Les LR ont pris cette initiative alors que le groupe centriste, allié de la droite au Sénat, a déposé début février une proposition de loi qui reprend la plupart des mesures de la loi sur l'immigration censurées par le Conseil constitutionnel. Une initiative qui a peu de chances d'aboutir, la majorité présidentielle s'y montrant défavorable.

La droite souligne toutefois que ce RIP ne constitue qu'une "première étape" et qu'une révision constitutionnelle sera ensuite "indispensable (...) pour permettre à la France de retrouver la maîtrise de son destin".

Une procédure "dissuasive et peu lisible"

Mais c'est loin d'être gagné. À ce jour, aucune proposition parlementaire n'est parvenue à valider l'ensemble des conditions et à aboutir à l'organisation d'un RIP. Le seul qui a été autorisé par le Conseil constitutionnel, contre la privatisation d'Aéroports de Paris en 2020, n'avait réuni qu'1,1 million de soutiens au terme des neufs mois de collecte, bien loin du seuil nécessaire pour déclencher la procédure.

Plus récemment, lors de l'examen de la très critiquée réforme des retraites, des parlementaires de la Nupes, opposés au passage de l'âge légal de départ à 64 ans, ont proposé à deux reprises l'organisation d'un RIP. Saisi, le Conseil constitutionnel a rejeté, en avril puis en mai, ces projets.

En juin 2020, le Conseil constitutionnel avait dressé un bilan critique du RIP, jugeant la procédure "dissuasive et peu lisible". Il avait notamment critiqué la difficulté d’utilisation du site internet dédié ainsi que l’aspect décourageant d’un si grand nombre à atteindre. Les Sages avaient alors suggéré à l’avenir de réaliser des campagnes d’information du public ou de créer les conditions d’un débat.


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