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"Un cas unique en France" : comment Lyon est devenue la capitale des extrêmes droites

« Lyon est symboliquement intéressante pour ceux qui se réfèrent au passé », pose l'ancien professeur de lettres Alain Chevarin, qui se refuse à parler d’ultradroite. Un terme qu’il renvoie aux mouvements clandestins et terroristes.

L’implantation des extrêmes droites donne à la ville des airs de laboratoire, analyse Alain Chevarin, de par la densité et la diversité. On trouve à Lyon des partis, mouvements, groupuscules, du RN à l’Action française en passant par l’ex-Bastion social, des organisations violentes et des intégristes religieux. "Un cas quasiment unique en France", selon l'expert.

Ancienne capitale des Gaules, symbole religieux

La religion, justement. C’est l’une des raisons du phénomène. Ancienne capitale des Gaules, Lyon est un symbole. « C’est une ville globalement catholique. Jusqu’à récemment, les clefs de la ville étaient remises à l’archevêque (*), rappelle Alain Chevarin. La Manif pour tous a été quasiment lancée à Lyon. La plupart des mouvements d’extrême droite se réclament de la chrétienté. Les identitaires ont viré de bord et sont devenus catholiques et font une procession pour la Vierge Marie le 8 décembre. Le fait de se poser en défenseurs du catholicisme a joué en leur faveur. »

(*) Jusqu’en 2020 et l’élection du maire écologiste Grégory Doucet, les élus de la ville montaient, à pied, tous les 8 septembre, depuis l’année 1643, à Fourvière pour remettre un écu d’or à l’archevêque.

Le Vieux-Lyon, adossé à la colline de Fourvière, ses vieilles pierres et surtout, ses trois paroisses (Saint-Jean, Saint-Paul et Saint-Georges) avait tout du fief idéal pour des groupuscules attachés au passé religieux.

À cela s’ajoute la présence historiquement faible du Front national, puis du Rassemblement national, dans une métropole modérée, oscillant entre le centre-droit et le centre-gauche. « Les résultats modestes du parti frontiste ont toujours laissé de la place aux autres formes d’extrême droite, soulève le spécialiste. Partout où le FN était puissant, les groupuscules étaient limités. Il ne l’a jamais été assez pour maîtriser ces groupes, ce qui leur a laissé de la place. »

Proche de Jean-Marie Le Pen et cadre du parti frontiste, Bruno Gollnisch a été l’un des rares à exister dans une région lyonnaise où il n’a jamais été hostile aux groupuscules.

Lyon III, l'université noyautée par l'extrême droite

Bruno Gollnisch a longtemps enseigné à Lyon-III, université née dans les années 1970 et associée aux courants d’extrême droite. « Elle a été noyautée par des universitaires d’extrême droite qui ont apporté une sorte de caution intellectuelle au mouvement », note Alain Chevarin.

Condamné à six mois de prison ferme pour une violente agression le 1er février, à Lyon, (lire par ailleurs), Sinisha Milinov incarne ces liens entre les extrêmes droites. Ex-porte-parole du groupuscule Les Remparts, il a été responsable de La Cocarde Lyon, un syndicat étudiant. En 2020, il se présentait sur la liste RN pour les municipales, à Villeurbanne.

Lyon et ses extrêmes droites (La Lanterne, 2020) par Alain Chevarin.

Malik Kebour

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