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Georges Frélastre, le "Chien vert de Paris, naturalisé Bourbonnais"

Qui était-il vraiment ? Homme politique ? Chef d’entreprise ? Grand voyageur ? Aventurier ? Professeur émérite ? Conférencier de talent ? Écrivain ? C’est un peu tout cela et plus encore. Georges Frélastre, né à Paris en 1924, avec le statut de pupille de la Nation. Son père, avocat, étant décédé en 1927 des suites d’une grave blessure contractée sur les champs de bataille de la Grande Guerre.

Il a presque 10 ans quand il arrive à Cusset, avec sa sœur Roberte, pour suivre leur mère, qui pour élever ses deux enfants, a dû quitter Paris pour venir à Cusset exploiter la source Coursolle, aujourd’hui disparue, (propriété achetée par son grand-père, épicier Vosgien) qui se trouvait rue du faubourg du Chambon, à une époque où la cité des "chiens verts" comptait de très nombreuses sources, et se rêvait ville thermale.

Un auteur du Var raconte ses souvenirs de jeunesse à Vichy

Concessionnaires d’Orangina pour le centre de la France

Parisien déraciné, le jeune Georges s’intégrera rapidement dans le tissu cussétois, au contact des garnements du quartier, qu’il invite à jouer au ballon, et à cache-cache au milieu des caisses d’emballage des bouteilles, dans le vaste parc qui entourait la source et son élégant pavillon. Georges devient vite un "chien vert", qui sera d’ailleurs le titre d’un de ses ouvrages, bien des années plus tard.

Il est toujours resté très attaché au Bourbonnais, et à sa ville d’adoption, Cusset. Avec sa sœur, ils passeront toute leur enfance dans le faubourg du Chambon, aidant leur mère dans l’exploitation, pas toujours facile, de la source. Une femme chef d’entreprise, ce n’était pas vraiment courant dans ces années-là.

Suite au décès de leur maman, en 1949, Georges et Roberte (diplômée en pharmacie), reprennent l’exploitation de la source, tentant de se diversifier avec la vente de sodas qu’ils fabriqueront, en tant que concessionnaires d’Orangina pour tout le centre de la France. Ils commercialiseront même l’eau de source Coursolle jusqu’en Italie, sous forme de Lithiné. Et ce jusqu’en 1963, où ils doivent fermer, concurrencés par le géant Vichy-Saint-Yorre. Sa sœur exploitera sa pharmacie dans le quartier des Darcins, place Gouttebel, et Georges fera de brillantes études, débutées au collège de Cusset (Doctorat de droit, licence de lettres, diplôme de Sciences Po), sera professeur d’économie à la faculté de Clermont-Ferrand.

Vie publique et associative

Il s’investit dans la vie publique et associative, maire adjoint de Cusset avec André Rabineau, président de plusieurs associations, comme la compagnie théâtrale cussétoise "Art et Amitié", créée par Albert et Odette Dumont, ou le groupe folklorique "Vichy et ses sources" pendant près de 20 ans, (dont la majorité des membres, curieusement, venaient de Cusset). Il fut par la suite conseiller général pendant 37 ans, et adjoint au maire de Vichy, Claude Malhuret.

Il a contribué, tant à Vichy qu’à Cusset, à de nombreuses réalisations importantes, entre autres le Pôle universitaire Lardy. Voyageur infatigable, il parcoura dans sa vie plus de 80 pays. De l’Algérie, à 23 ans, où il enseigne à l’école supérieure de commerce d’Alger, (où il fera la connaissance de Madeleine, son épouse), aux Etats-Unis, où il a vécu un an, étudiant et conférencier à l’université de Berkeley en Californie. En tant que professeur de faculté, il a l’obligation en parallèle de ses cours, d’effectuer des recherches.

Il s’intéresse alors aux pays de l’Est, il effectuera 19 missions dans différentes républiques du bloc soviétique, rare occidental à se rendre en Albanie dans les années 1960. Puis ce sera le continent africain qui le passionne, il enseigne dans des universités à Yaoundé au Cameroun, puis Abidjan, Dakar, Libreville… Il réalise même un film avec des amis vichyssois, où ils s’égarent dans le désert Mauritanien, frôlant la mort, et côtoient des tribus coupées du monde aux coutumes ancestrales. Il y aura aussi la Chine, Cuba, le Brésil, le Québec…

Cours et conférences aux quatre coins du monde

Il donnera cours et conférences aux quatre coins du monde. Sportif, il fut vainqueur aux Etats-Unis d’une course interuniversités en 1948 sur 1.000 mètres, ce qui lui donna l’occasion de rencontrer Bing Crosby, grande vedette américaine, et de se lier d’amitié avec un certain John Steinbeck qui n’avait pas encore reçu le prix Nobel de littérature.

Il joua aussi au SCA Cusset football, avec Pierre Coulon, futur maire de Vichy, et pratiqua avec assiduité le tennis au Sporting de Bellerive. Passionné de rugby, il fut dirigeant du Racing-Club de Vichy de la grande époque, et fervent supporter de la JAV depuis l’ère Andrijasévic des années 1970.

Il aimait aussi participer aux concours "gentlemen" organisés sur les cours de Cusset par la Boule cussétoise. Excellente plume, Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages, articles, reportages, notamment sur les pays de l’Est, et obtient en 1977 le prix Sully Olivier de Serres, pour Paysans et collectivisme (Comme son compatriote bourbonnais, l’écrivain paysan Émile Guillaumin).

"Nous considérions notre père comme un aventurier, et attendions impatiemment chacun de ses retours pour connaître ses impressions, comment s’était déroulé son séjour, mais la première chose à laquelle il pensait, c’était se reposer tant ses missions étaient fatigantes. Et ce n’était que lors de la conférence qu’il donnait ensuite sur le pays visité, que nous apprenions détails et péripéties, en même temps que les spectateurs".

Suivront des romans, Un Vichyssois sous Vichy, Les complexes de Vichy, ou Le Chien vert, dans lequel il raconte sa jeunesse cussétoise mouvementée. Jusqu’à sa disparition, en 2011, Georges Frélastre, l’humaniste, "naturalisé Bourbonnais" comme il aimait à se définir, aura eu une vie fort bien remplie, hors du commun, de la source Coursolle au bout du monde, la vie d’un "Chien vert de Paris", que celui qui écrit ces lignes a eu la chance de connaître, et en garde le souvenir d’un homme attachant et passionnant. 

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