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Pourquoi la Chine a du mal à remonter la pente sur le plan économique après sa politique "zéro Covid"

Pourquoi la Chine a du mal à remonter la pente sur le plan économique après sa politique

Alors que le pays connaît actuellement une période de déflation, les dirigeants chinois, réunis à l’occasion de leur grand-messe annuelle, table sur une croissance de 5 %. Un objectif difficile à atteindre, en raison de gros freins comme une crise immobilière toujours pas digérée.

En matière de décorum, le Parti communiste chinois (PCC) ne laisse jamais rien au hasard. C’est dans le cadre pompeux du Grand palais du peuple de Pékin que se déroule, depuis mardi, la session annuelle du parlement. Une simple chambre d’enregistrement mais un excellent baromètre des orientations politiques du pays.

Chômage des jeunes

La grand-messe 2024 du PCC est, sans surprise, dominée par les questions économiques. "Les problèmes que connaît actuellement la Chine sont liés à différentes causes. Mais l’économie du pays a quand même été très pénalisée par la pandémie et la politique « zéro Covid », tout comme par l’environnement international, qui n’est pas très dynamique avec le poids des soubresauts géopolitiques. L’annonce, qui a été faite en ouverture de session, à savoir un objectif de croissance de 5 % sera difficile à atteindre", tranche Mary-Françoise Renard, professeur émérite à l’Université de Clermont Auvergne (UCA). Pékin traîne d’abord comme un boulet l’éclatement de la bulle immobilière, avec des promoteurs en faillite, des millions d’appartements non livrés et des acheteurs lésés.

"11 à 12 millions de diplômés sur le marché"

Deuxième point faible, le chômage des jeunes demeure à des niveaux très élevés. "Les chiffres ne sont plus publiés depuis l’an dernier. Mais on estime qu’on serait autour de 20 %. C’est une donnée qui pèse sur la confiance de la population et des consommateurs chinois, d’autant que ce sont souvent des diplômés. Mais vous avez des situations extrêmement disparates. Avec d’un côté, les jeunes issus de la campagne, dont les parents n’ont pas de gros revenus et se sont endettés pour financer leurs études, qui doivent à tout prix trouver un travail, fut-ce à l’usine. Et d’un autre côté, vous avez les jeunes urbains, dont les parents ont plus de moyens, qui peuvent continuer à habiter au domicile familial en attendant de trouver un job qui leur convient. Mais nous parlons tout de même de 11 à 12 millions de diplômés qui vont arriver sur le marché du travail en 2024", poursuit la spécialiste de la Chine. Du fait de cette conjoncture, l’économie est entrée en déflation. "Cette tendance s’explique par une demande pas assez forte, qui a provoqué une surproduction, synonyme de stocks. Mais la Chine n’est pas au bord du gouffre. En économie, les choses sont toujours beaucoup plus complexes que ces visions caricaturales, tempère Mary-Françoise Renard. Lors du Forum de Davos, le Premier ministre Li Qiang avait annoncé qu’il n’y aurait pas de grands plans de relance. On se doutait donc de l’absence de mesures structurelles."

"L'immobilier pesait 30 % du PIB"

Le PCC s’est cependant engagé à créer 12 millions d’emplois urbains et à augmenter, comme en 2023, de 7,2 % le budget de l’armée populaire. Pékin semble s’être aussi décidé à assainir le secteur immobilier. "Ces dernières années, celui-ci pesait à hauteur de 30 % dans le PIB. Au début, ce poids était justifié en raison des besoins en logements et en infrastructures. Une fois ces besoins satisfaits, l’économie n’a plus pu absorber cette offre et du coup, cela s’est fait par de l’endettement, explique Mary-Françoise Renard. Aujourd’hui, le gouvernement veut limiter le nombre de logements inachevé et calmer la colère des acheteurs. Selon les chiffres publiés, les logements de 45 % des acheteurs ne seraient pas terminés et plus d’un million de petits propriétaires ne seraient plus en mesure de rembourser la banque pour un appartement qu’ils n’habitent pas."

"Épargne importante"

L’immobilier en panne, le gouvernement chinois doit trouver de nouveaux moteurs pour tirer la croissance. "Pékin compte sur une montée en gamme de la production et incite les consommateurs à changer leur lave-linge, leur aspirateur, etc., pour en acheter un nouveau de meilleure qualité.

Le souci, c’est qu’il existe un problème de stagnation du pouvoir d’achat. Et comme Xi Jinping ne veut pas faire une politique de redistribution, il n’y a pas une confiance suffisante en une reprise, perspectiver aggravée par le chômage des jeunes, qui inciterait les Chinois à consommer. Alors que, paradoxalement, leur épargne est très importante", conclut la spécialiste de la Chine. 

Dominique Diogon

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