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Que vaut le documentaire sur Brigitte Fontaine, “Réveiller les vivants” ?

S'intéressant à une drôle de figure mi-underground, mi-populaire, ce documentaire hagiographique réussit sa mission : convertir les néophytes à l’OVNI Brigitte Fontaine.

“Je suis révoltée depuis toujours contre tout”, annonce-t-elle dès les premiers instants du documentaire. Servi par une identité graphique pop et implacable, Réveiller les vivants bénéficie de moult archives et d’intervenant·es passionné·es (Étienne Daho, P.R2B, Arthur H, Rebeka Warrior…), à commencer par la principale intéressée, qui retrace son parcours avec force punchlines.

D’abord en revenant à la source de son refus des conventions, un enterrement “atroce” à laquelle elle fut, avec les autres élèves de son école, obligée d’assister. Bien trop de règles à suivre pour la petite Brigitte, élevée en Bretagne, qui les rejette viscéralement. 

Étonnant de l’entendre confesser qu’elle détestait, enfant, qu’on la regarde. Et pourtant, elle commence par le théâtre, à Paris, avant de choisir le chant dans les années 1960. Débute alors une carrière surprenante et néanmoins très maîtrisée, portée par “une fluidité de la connexion créative”, dixit Arthur H. La radicalité, ça se cultive. Pas de n’importe quoi, car les mélodies sont bien là : elles se suivent sans forcément se ressembler, dressant un panorama tant sonore qu’émotionnel de Brigitte Fontaine

On l’aime encore plus

Ses convictions (a)politiques, ses influences, comme l’Art Ensemble of Chicago – avec lequel elle collabore sur Comme à la radio (1970) –, ses happenings partagés avec son grand amour Areski Belkacem, idéal alter ego musical, sa complicité avec Jacques Higelin, son absence durant les années 1980, son succès avec M, son travail avec Daho en 1995, ses livres… Tout cela est condensé par un trio de réalisateurs férus de la dame : Benoît Mouchart, qui a notamment mis en scène un concert de Fontaine illustré par l’auteur de BD Blutch au Festival d’Angoulême 2007, Yann Orhan, connu pour son travail visuel auprès d’artistes français tels Thomas Dutronc ou Hubert-Félix Thiéfaine, et le chef monteur-réalisateur Aurélien Guégan. Il fallait bien trois hommes pour traiter du parcours d’une femme de cette trempe.

“Je veux être aimée pour le pire/Je veux être aimée pour mes os/Je veux que les hommes délirent/Comme des chiens sentimentaux…”, chante-t-elle sur Éternelle. Après avoir vu ce film, on aime plus encore Brigitte Fontaine. Cette extraterrestre, comme la définit joliment Daho, qui nous fera encore et toujours danser la “java des terriens”… La plus mutante des chanteuses françaises, qui gagne à être (re)découverte à l’heure de l’inscription de l’IVG dans la Constitution, un grand pas pour la liberté des femmes à disposer de leur corps.

Une liberté qu’elle a fait mieux que défendre, qu’elle a incarnée – une fois encore, un refus des étiquettes et une esquive du mot “féministe”, précise ici Fontaine, assurément “solidaire avec toutes les meufs”. D’où un choix malin de diffuser ce documentaire le 8 mars, journée internationale des droits des femmes.

Brigitte Fontaine, réveiller les vivants, de Benoît Mouchart, Yann Ohran et Aurélien Guégan. Diffusion le 8 mars à 23h15 sur France 5, et en replay sur france.tv.

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