Soudan: le chef de l'ONU appelle à un cessez-le-feu pendant le ramadan
"Dans quelques jours commencera le mois sacré du ramadan. Je lance donc ici et maintenant l'appel suivant: j'appelle toutes les parties en présence au Soudan à faire honneur aux valeurs portées par le ramadan en cessant les hostilités pour toute sa durée", a déclaré Antonio Guterres lors d'une réunion du Conseil de sécurité à New York.
"Cette cessation des hostilités doit conduire à faire définitivement taire les armes dans l'ensemble du pays et permettre au peuple soudanais de s'engager résolument sur la voie d'une paix durable", a-t-il ajouté, craignant que le conflit conduise à "déstabiliser de façon catastrophique l'ensemble de la région, du Sahel à la Corne de l’Afrique en passant par la mer Rouge".
Relayant son appel, une résolution est en cours de discussions au sein du Conseil, et les Britanniques, à l'origine du texte, espèrent un vote vendredi.
Le projet de texte vu par l'AFP "appelle toutes les parties à une cessation immédiate des hostilités avant le mois du ramadan".
Il demande également aux belligérants de permettre "un accès humanitaire total, rapide, sûr, et sans entrave, y compris via les frontières et à travers les lignes de front".
Les combats, qui font rage depuis le 15 avril 2023 entre l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane et les Forces de soutien rapide (FSR, paramilitaires) du général Mohammed Hamdane Daglo, ancien numéro deux du pouvoir militaire, ont fait des milliers de morts et quelque 8 millions de déplacés -- la plus importante crise de déplacement de populations au monde.
Si la plupart des membres du Conseil ont soutenu jeudi l'appel à un cessez-le-feu durant le ramadan, certaines délégations se sont montrées plus réservées, notamment la Chine et la Russie.
"Insoutenable"
"La tâche la plus urgente est de mettre fin aux combats aussi vite que possible", a commenté l'ambassadeur chinois adjoint Dai Bing. Mais "la Chine estime que les actions du Conseil devraient être propices à la diplomatie et éviter d'exacerber les tensions".
"M. al-Burhane vient de m'envoyer un message où il salue l'appel du secrétaire général", a de son côté déclaré l'ambassadeur soudanais Al-Harith Idriss Al-Harith Mohamed.
Mais "il se demande comment le faire" alors que les paramilitaires "continuent, sans cesse, leurs attaques contre les civils", a-t-il ajouté, appelant ceux qui voudraient voir cet appel concrétisé à "présenter un mécanisme de mise en oeuvre".
"La crise humanitaire au Soudan est en train de prendre une ampleur démesurée. Pas moins de la moitié de la population – près de 25 millions de personnes – a besoin d'une assistance vitale", a insisté Antonio Guterres.
"Le spectre de la famine plane sur le Soudan. Quelque 18 millions de personnes sont dans une situation d'insécurité alimentaire aiguë. Jamais ce nombre n'a été aussi élevé en période de récolte – et pourtant, on s'attend à le voir continuer à grimper en flèche dans les mois à venir", a-t-il mis en garde.
"On nous signale déjà que des enfants sont en train de mourir de malnutrition".
"La situation des enfants est particulièrement insoutenable. Quatre millions ont été déplacés, plus de 700.000 vont souffrir de la forme la plus mortelle de malnutrition cette année", a renchéri l'ambassadeur britannique adjoint James Kariuki.
Dans ce contexte, le plan de réponse humanitaire de l'ONU pour le Soudan en 2024, chiffré à 2,7 milliards de dollars, n'est financé qu'à 4%.
Du côté du conflit lui-même, Antonio Guterres s'est dit "alarmé" de développements qui risquent de "fragmenter encore plus profondément le pays, d'exacerber les tensions intra et inter communautaires et d'aggraver les violences ethniques".
Il a également fustigé les "attaques sans discernement" des forces armées soudanaises et des FSR contre les civils, les pillages, les arrestations arbitraires, les disparitions forcées, la torture, l'enrôlement des enfants, les violences sexuelles ou encore des cas de traite d'êtres humains à des fins d'exploitation sexuelle.