"Groupes de niveau" : ce qu'il faut retenir de la visite du Premier ministre Gabriel Attal dans un collège à Chartres
En déplacement, ce jeudi 14 mars dans l'après-midi, au collège Mathurin-Régnier, à Chartres, pour présenter sa réforme sur le choc des savoirs, et notamment les groupes de niveau en 6e et 5e, il a de nouveau montré à ses interlocuteurs que le patron au sujet de l’école, c’est lui. Laissant peu de place à la ministre en titre de l’Éducation nationale, Nicole Belloubet, cantonnée lorsque l’occasion lui était donnée, à répondre aux aspects plus techniques de la réforme voulue par Gabriel Attal. Voici ce qu'il faut retenir de son passage en Eure-et-Loir.
Questionner les jeunes, mais aussi le corps enseignant
Le Premier ministre et la ministre se sont d’abord rendus dans une classe du collège, où des jeunes de 11 à 15 ans, passionnés de mathématiques, étaient en train de préparer la demi-finale du concours de la Fédération française de jeux de mathématiques et de logistique, prévue samedi. L’occasion pour Gabriel Attal de questionner les jeunes sur leur appétence pour les mathématiques, mais aussi l’enseignante sur sa façon de préparer les élèves à ce concours, dont les méthodes, peuvent différer des enseignements traditionnels au collège.
Ils se sont ensuite rendus dans une autre salle où ils ont échangé avec la directrice académique, Évelyne Mège, le principal du collège, Rémi Artige, et des professeurs de l’établissement. Ces derniers n’ont pas hésité à leur adresser leurs interrogations et leurs craintes dans la mise en œuvre d’une des mesures les plus controversées du choc des savoirs : la mise en place, dès la rentrée de septembre, pour les élèves de 6e et de 5e, des groupes de niveau en français et en mathématiques.
Un Premier ministre toujours au chevet de l'éducationGabriel Attal avait prévenu, dès son entrée à Matignon : « J’emmène avec moi la cause de l’école. » Son passage éclair rue de Grenelle ne lui a pas permis de mettre en place concrètement cette réforme qui a pour ambition « d’élever le niveau des élèves, trouver une pédagogie adaptée et éviter le tri social ».
Car le constat n’est pas reluisant, selon les dires du Premier ministre. « Les écarts de niveau des élèves entre l’entrée et la sortie du collège ne se résorbent pas, malgré l’engagement et le dévouement de nos enseignants et des équipes pédagogiques. Et probablement aussi du fait d’une organisation qui ne permet pas véritablement de faire progresser le niveau de chacun », assure-t-il, en se référant notamment aux résultats des évaluations nationales.
"Relancer l'ascenseur scolaire au collège"
« Il faut relancer l’ascenseur scolaire au collège », martèle-t-il, prenant exemple sur ce qui, d’après lui, « depuis 2017, commence à porter ses fruits à l’école élémentaire ».
« On voit que les élèves qui rentrent en 6e aujourd’hui ont des difficultés de lecture, de calcul et d’écriture moins importantes que ce que l’on pouvait connaître, il y a encore cinq, six ou sept ans. » En progression, certes, mais « pas encore assez », concède-t-il. C’est, pour Gabriel Attal, le résultat « d’une action résolue, qui a été engagée à l’école primaire, avec le dédoublement des classes en zones d’éducation prioritaire, mais aussi avec les plans maths et français. Il faut poursuivre ».
Une visio-conférence avec des enseignants partout en France
Si le « choc des savoirs » ne se limite pas à la mise en place de « groupes de niveau » ou « groupes de besoins », comme préfère plus pudiquement les appeler la ministre de l’Éducation nationale, c’est bien cet aspect qui cristallise le plus la contestation d’une partie des équipes pédagogiques rencontrées, ce jeudi 14 mars, à Chartres, ou lors de la visioconférence organisée durant ce déplacement, à laquelle plus de 11.000 acteurs de l’école ont participé partout en France.
Des enseignants dénoncent notamment une sorte de « tri et de stigmatisation des élèves », propice, selon eux, à un « enfermement dans leurs résultats ». Certains s’interrogent aussi « sur les moyens pour y parvenir ».
Un Premier ministre se voulant rassurant
Pour Gabriel Attal, au contraire, il s’agit de « mieux répondre aux besoins des élèves en difficulté » en leur apportant un enseignement adapté, mais aussi « de faire s’envoler ceux qui sont déjà en avance ».
Des chefs d’établissement s’inquiètent aussi et se demandent d’ores et déjà comment ils vont pouvoir concrètement organiser les choses, dès la rentrée de septembre, sans pour autant déséquilibrer ce qui existe déjà.Pour les rassurer, le Premier ministre a insisté sur « l’autonomie » des établissements dans la mise en œuvre de la réforme. La règle sera donc « le groupe », et la classe entière « l’exception ».
François Feuilleux