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Comment fonctionnent les résidences d'artistes au Théâtre des Ilets de Montluçon

Comment fonctionnent les résidences d'artistes au Théâtre des Ilets de Montluçon

Des répétitions du spectacle La voix de ma grand-mère sont ouvertes au public lundi 22 et mardi 23 avril, au Théâtre des Ilets de Montluçon (Allier). Elles concluent dix-sept jours de résidence. Une autre compagnie était invitée par le CDN, sur une semaine.

On a tendance à l’oublier, mais le théâtre est un artisanat. Avant d’arriver jusqu’au public, des mois, voire des années de travail sont nécessaires. Sur leur chemin, les artistes comptent sur les lieux de diffusion, privés ou publics, pour les accompagner financièrement, mais aussi techniquement.

Au Théâtre des Ilets, à Montluçon (Allier), dont la création est inscrite à l’ADN, des résidences se tiennent régulièrement, à la faveur des disponibilités et des projets présentés.

Un laboratoire pour les comédiens

Au début de la deuxième quinzaine d'avril, le centre dramatique national grouillait de vie. Fanny Gayard et sa compagnie Sans la nommer, basée à Genevilliers, ont investi la petite salle, du lundi 15 au samedi 20 avril, pour avancer sur le spectacle L’art, c’est vous :  "Nous avons déjà réalisé deux semaines de résidence sur Paris. La quatrième aura lieu toujours au printemps, à Juvisy, au Théâtre des Bords de Seine."

La troisième semaine montluçonnaise est un moment dit laboratoire. 

On essaie beaucoup d’improvisations, d’hypothèses, qu’on questionne.

La version finale de cette pièce "sur les émotions politiques qui sous-tendent les soulèvements populaires", sera répétée durant quatre semaines, à l’automne, avant la première représentation au Studio-Théâtre de Vitry-sur-Seine. Entre les deux, l’équipe finalise une écriture qui suit le processus de création.Photo Cécile Champagnat

Le Laos et le père en scène

Vanasay Khamphommala, elle, arrive à la fin de celui-ci. La performeuse et chanteuse lyrique est en résidence depuis début avril à Montluçon pour son spectacle La voix de ma grand-mère, co-produit par les Ilets. "Ce que Fanny (Gayard) est en train de faire là, moi, je l’ai fait en résidence à Bordeaux, en octobre dernier. Cela a été suivi de deux mois d’écriture au Laos."Le père de Vanasay Khamphommala est sur la scène du spectacle "La voix de ma grand-mère", programmé aux Ilets les 14 et 15 mai prochains. (Photo Cécile Champagnat)

C’est le pays d’origine de son père, qui est sur scène avec elle. À 80 ans, il monte pour la première fois sur les planches. L'autrice de 43 ans raconte : 

Cela fait depuis 2019 que je suis sur ce projet. Et au début, je ne savais pas que mon père serait sur scène. Il raconte tout ce qu’il ne m’a pas transmis. Durant toutes ces années, j’ai appris le laotien, les musiques traditionnelles du pays. J’ai voyagé six mois là-bas et j’ai renoué avec des membres de la famille.

Lundi 22 et mardi 23 avril, de 15 heures à 18 heures (*), les répétitions sont ouvertes au public, avant les premières, toujours aux Ilets, les 14 et 15 mai prochains. "C’est stressant, mais j’aime bien ça." "Les sorties de résidence sont des moments de tests", rebondit Fanny Gayard : "On explique au public qu’on est en chantier. On raconte où on en est. C’est intéressant."

Elle et les sept autres membres de son équipe se sont prêtés à l’exercice vendredi 19 avril et ont quitté les deux logements mis à leur disposition par le CDN de Montluçon.

Treize compagnies ont été accueillies en résidence au Théâtre des Ilets, en 2023, dont trois d’écriture et une de construction de décor. Cela représente un total de 98 jours. Le coût pour l’accueil global des artistes et techniciens était de 35.800 € l’an passé.

"Diversité culturelle" dans un contexte difficile

Vanasay Khamphommala, sa compagnie Lapsus Chevelü de Tours, son père et sa mère logent dans une maison située juste en face du théâtre. Un luxe. 

C’est une résidence exceptionnelle, dans un lieu doux pour moi. Le monde de la culture vit un moment particulier, très tendu, très violent. Et cela fait du bien d’être ensemble, avec d’autres personnes qui font des choses, de constater que des théâtres comme celui-ci accompagnent des artistes émergents. C’est bien pour la diversité culturelle.

Fanny Gayard confirme : les coupes budgétaires fragilisent le monde du spectacle. "J’ai 37 ans et cela fait dix ans que je suis dans la compagnie. C’est la première fois que pour la saison prochaine, je n’ai pas de dates, hormis celles de nos co-productions." Et Vanasay Khamphommala d’ajouter : "Il faut travailler pour ceux qui ont 30 ans et qui sortent d’école. C’est bien d’avoir un CDN comme celui-là politiquement engagé."

Le Théâtre des Ilets propose deux types de résidence. Il y a celle des artistes coproduits : "Les coûts comprennent des frais techniques (embauche d’intermittents), les hébergements, les voyages, les repas… La durée est variable : d’une semaine à quatre semaines (assez rare)", détaille le centre dramatique national de Montluçon. Il y a celle des autres artistes "dont la prise en charge des frais est modulable : de manière certaine technique, plus les hébergements si besoin et les voyages pour les compagnies qui viennent de loin".Photo Cécile ChampagnatÀ cela, s’ajoutent des résidences d’écritures. Le centre dramatique national prendre alors en charge l’hébergement et le voyage des autrices et auteurs, d’une semaine à quinze jours, voire trois semaines. Des résidences atelier concernent la construction de décors et des accessoires.Le nombre de résidences dépend donc du nombre d’artistes concernés, du budget et de la disponibilité des salles.

(*) Gratuit. Réservations conseillées au 04.70.03.86.18 ou sur theatredesilets.fr ; la billetterie pour le spectacle, en mai, est également ouverte.

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