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L'opération "place nette XXL" initiée par le ministre de l'Intérieur a-t-elle mis fin aux points de deal de Clermont-Ferrand ?

L'opération

Initiée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, visant à éradiquer le trafic de stupéfiants, l’opération "place nette XXL" a-t-elle mis fin aux points de deal de Clermont-Ferrand ? Sans grande surprise, la réponse est non. Néanmoins, au cours des semaines écoulées, les forces de l’ordre ont peut-être posé la première pierre à l’édifice de la lutte contre le trafic qu’elles cherchent à faire s'effondrer. Coûte que coûte.

Devant l’entrée d’un immeuble, rue Alexandre-Ribiot, une poubelle de tri renversée sur le trottoir. Elle fait office de banc pour un "chouf". Assis nonchalamment sur le container, ce guetteur regarde passer les voitures. Sa présence atteste que le "plan" est ouvert. C’est l’une des "portes d’entrée" du plus gros point de deal de Saint-Jacques. En effet, quelques mètres plus loin, passants et automobilistes tournent sur la rue des Plats, qui borde la rue Sévigné. C’est sur cette petite placette, entre les immeubles, que s’achalande le commerce de résine de cannabis et de cocaïne depuis plusieurs années.

Opération de com "XXL" mais pas seulement

Encore un peu plus loin, à la "sortie", un homme est assis sur une chaise en plastique. Lui scrute les arrivées sur la rue des Plats, lorsque l’on vient du boulevard Claude-Bernard, en haut du viaduc, au niveau de l’arrêt de tram Saint-Jacques/Dolet. Lorsque l’on quitte ce petit périmètre, la vie suit son cours. Des étudiants sortent du tram, des automobilistes se dirigent vers le CHU, d’autres vont faire quelques courses place Henri-Dunant. Si l’on ne connaît pas la ville, difficile de s’imaginer qu’à quelques encablures de là, est organisé l’un des plus gros et des plus lucratifs points de deal de Clermont-Ferrand. Durant trois semaines, entre fin mars et début avril 2024, dans le cadre de l’opération "place nette XXL", de gros moyens ont été engagés dans la capitale auvergnate, comme dans d’autres villes en France, pour "mettre un coup de pression" sur les dealers et tenter "d’asphyxier" le trafic. À Clermont, cela s’est traduit par l’arrivée, notamment, de la CRS 83, mais également d’unités de forces mobiles de la gendarmerie, venues renforcer les effectifs puydômois habituels.

Une première pierre à l’édifice de la lutte contre le trafic ? 

Une opération de com "XXL" lancée en grandes pompes par le gouvernement?? Sans aucun doute. Mais pas seulement. Car, localement, cela aura eu pour effet immédiat un déploiement inédit de forces de l’ordre dans les quartiers, principalement à Saint-Jacques et à La Gauthière. Cette opération s’est même étendue à l’ensemble du département et aura permis, outre le côté répressif, d’assurer une présence auprès des habitants, témoins et otages quotidiens du trafic de drogues. Avec quels résultats?? De nombreuses interpellations et saisies de drogues. Pour autant, la lutte contre le trafic de stupéfiants se poursuit. C’est une bataille de tous les instants et, dans les quartiers de Clermont-Ferrand, la police continue son travail de sape sur les points de deal. Depuis cette opération "place nette XXL", qui est amenée à se renouveler, annonce la préfecture, d’autres dealers ont été arrêtés, tant à Saint-Jacques qu’à La Gauthière. Souvent des mineurs ou des jeunes hommes. Les premiers seront traduits devant la juridiction des mineurs, tandis que les seconds ont déjà écopé de convocation devant le tribunal correctionnel. Les mis en cause, recrutés par "annonces" sur les réseaux sociaux et grassement payés à la journée (*), sont des "locaux" mais viennent également d’autres régions de France. Ce qui représente une main-d’œuvre intarissable.

Retour rue Alexandre-Ribiot, quelques jours plus tard. La poubelle est toujours versée sur le flanc, elle n’a pas bougé d’un centimètre. Il pleut des cordes. Pourtant, ce jour-là, ce sont deux guetteurs qui se partagent le "poste", à l’abri, dans le renfoncement de cette entrée d’immeuble. La météo maussade est loin de décourager les dealers… Face à cette organisation tentaculaire et pyramidale que représente le trafic de stupéfiants dans les quartiers, "le combat" des forces de l’ordre est donc loin d’être terminé. Les policiers de la BAC, notamment, y retourneront encore demain. Et après-demain... Autant de fois que nécessaire. 

(*) À Clermont-Ferrand, un "chouf", un guetteur chargé de surveiller et d’alerter lorsque la police arrive, est payé jusqu'à 150 € la journée. Tandis que pour un "charbonneur", un revendeur, cela peut monter jusqu’à 300, voire 350 €. 

Julien Moreau

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