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Rapatonadas, Mangoune, One two tripoux, livres en occitan... Comment l'IEO est devenu incontournable dans le Cantal ?

Rapatonadas, Mangoune, One two tripoux, livres en occitan... Comment l'IEO est devenu incontournable dans le Cantal ?

L’Institut d’études occitanes (IEO) célèbre ses 50 ans d’existence dans le Cantal. L’occasion pour les membres historiques de se remémorer les moments forts de ce demi-siècle à militer pour faire vivre l’occitan à travers les générations. Didier Huguet, Félix Daval, Catherine Liethoud et Patric Alec reviennent sur leurs souvenirs et planchent sur l’avenir.

« Quand je me suis penchée sur les clichés pour réaliser l’exposition rétrospective, j’ai réalisé l’ampleur de ce que l’IEO avait accompli en cinquante ans. Je me suis dit : “Qu’est-ce qu’on a travaillé !” » Catherine Liethoud est arrivée « quelques mois » après la création de l’IEO. « Je ne parlais pas la langue, et comme beaucoup, je pensais que l’occitan se parlait beaucoup plus au sud. » Elle connaît bien la situation de la langue bretonne et, passionnée par les langues régionales, elle se jette à l’eau pour apprendre l’occitan.

Créée en 1974, l’IEO existait déjà dans d’autres territoires et le militantisme occitan était porté dans le Cantal par le Félibrige d’Auvergne depuis la fin du XIXe siècle. « Le Félibrige œuvrait pour une reconnaissance de l’occitan, se souvient Felix Daval, membre du conseil d’administration, parmi les plus anciens de l’IEO Cantal. Tout le monde l’associait aux choses traditionnelles. Mais dans les années 1968, un peu partout, les gens se sont intéressés à la langue et on a assisté à un renouveau, porté par les chanteurs occitans comme Claude Marti, Joan Pau Verdier… C’était la mode du folk, des lycéens chantaient en occitan, s’accompagnaient à la guitare, jouaient à Aurillac et dans les villages, organisaient des veillées… » Ainsi, la section cantalienne de l’IEO s’impose presque d’elle-même. La dynamique occitaniste prend de l’ampleur. 

On s’est mis à faire du collectage de gens qui connaissaient la mémoire du pays. Il nous a paru important de sauvegarder ces connaissances

L’idée est de valoriser la culture locale. Le résultat de ces nombreux collectages est devenu des documents constitutifs de l’histoire du territoire, consultable aux Archives départementales. « Il s’agit de contes, transmis de père en fils, de chansons, de savoir-faire du pays – comment tailler les arbres – de recettes de cuisine… » Parmi les collecteurs, le premier animateur permanent de l’IEO (à partir de juillet 1982), Didier Huguet.

« Au moment du renouveau, je me suis rendu compte qu’on pouvait faire du neuf avec du vieux. J’ai voulu m’engager plus. J’ai passé beaucoup de temps à faire du collectage d’anciens. Petit à petit, je suis devenu conteur et maintenant, je ne fais que ça. » Parallèlement, il enseigne l’occitan pour l’Éducation nationale. « L’une des choses marquantes, c’est qu’en tant qu’animateur, j’ai été à l’initiative des premières semaines du conte, qui sont devenues Las Rapatonadas. Rapatou, c’est le surnom familier qu’on donnait au diable. » En 1992, il publiera, avec Jean-Claude Rocher, Paroles d’oiseaux, avec des photos de Pierre Soissons et des aquarelles de Julie Feuillas.

Les yeux des enfants "pétillent" lorsqu'ils parlent occitan

 Le souci de transmission est présent en chaque membre. Cette fibre, l’actuel président de l’IEO, Patric Alec, la développe au sein de la structure. « L’an dernier, nous avons accueilli des enfants du centre de loisirs d’Aurillac. Bien qu’ils n’aient pas une forte imprégnation linguistique à l’occitan – mis à part les TAP proposés par l’IEO et les interventions de Laure Bonnet –, j’étais très surpris de constater que les enfants parlaient bien. Leurs yeux pétillaient lorsqu’ils parlaient occitan. » Quelque chose de l’ordre des origines, des racines, se passe. Les enfants y sont sensibles.

« L’avenir de l’occitan repose sur le nombre de locuteurs. Sans appui plus marqué politiquement, j’ai peur que nous ne puissions pas compenser le manque de transmission. Nous faisons ce que nous pouvons, avec notre engagement fort. Nous mettons en valeur notre culture populaire riche et noble. Mais l’avenir de l’occitan se situe peut-être davantage en milieu urbain qu’en milieu rural. Il y a plus de calandretes (établissements scolaires immersifs, NDLR). C’est peut-être dans les villes que les jeunes générations vont la conserver et la transmettre. »

À titre personnel, Félix Daval a été marqué par un événement en particulier. « J’ai écrit un roman qui s’appelait Les Fraisses èran tombats (Les frênes étaient tombés). Il raconte la vie dans les années 1960 dans le Cantal, telle qu’elle est vécue par les Cantaliens, pas telle qu’elle est vue par les touristes. J’y évoque les gens qui vivent ici, ceux qui travaillent dur, les Auvergnats de Paris… En 1981, l’IEO Cantal l’a édité et il a eu beaucoup de succès. C’est bien entendu un fait marquant pour moi. » À Catherine Liethoud, l'anniversaire de l’IEO évoque également un souvenir personnel. « Dans les débuts, quelque chose m’a amusée. À l’époque, l’IEO soutenait le comité Larzac, en 1976. J’ai rencontré Bernard Giacomo, on cherchait à attirer l’attention et Pierre Boissière nous a suggéré quelque chose : nous sommes allés écrire “Larzac” dans l’herbe, à l’engrais, sur le flanc du puy Courny visible depuis Aurillac. Et ça avait très bien fonctionné, l’herbe avait poussé plus verte et on n’avait rien abîmé ! » Au fil des ans, l’IEO a été à l’origine de plusieurs fêtes dans le Cantal : la Fête de la châtaigne de Mourjou, la fête des Palhàs à Massiac, La Mangoune à Laroquebrou, One Two Tripoux à Thiézac, la Fête de la tarte à la tomme à Raulhac… À travers l’agence Sirventès, d’abord intégrée à l’IEO, avant de devenir une Scop indépendante. 

Anna Modolo

Quelques dates 1975. Fête occitane de Lafeuillade-en-Vézie, puis Saint-Jacques-des-Blats en 1977… 1978. Le carnaval est de nouveau fêté à Aurillac. 1979. Jos la Clujada, recueil de poèmes d’Arsène Vermenouze, est réédité. C’est le début de l’édition par l’IEO Cantal. 1981. Premier festival du conte. Il va prendre de plus en plus d’importance pour devenir Las Rapatonadas. 1992. Première Foire de la châtaigne à Mourjou. D’autres foires à thème vont naître ensuite : Massiac, Raulhac 1994. Création du premier bal de musique traditionnelle à présent intégré à Hibernarock, le Bal de la Caneta. 2017. Début des balades contées de Géraud à Gerbert.

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