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Grippe, dengue, Covid… Les JO de Paris, futur nid à épidémies ?

Grippe, dengue, Covid… Les JO de Paris, futur nid à épidémies ?

Plus de 10 000 athlètes, 45 000 volontaires, 12 millions de spectateurs et 25 000 journalistes. Les chiffres sont connus, ils donnent le vertige. Avec une telle masse de visiteurs agglutinés le temps de deux petites semaines festives à Paris et en Ile-de-France, la question du risque sanitaire se pose durant les Jeux olympiques. Mouvements de foule, intoxications alimentaires, orages, vague de chaleur, maladies virales ou bactériennes : la direction générale de la santé indique avoir répertorié une quarantaine d’aléas présentant des répercussions possibles sur la santé des participants.

Avec la succession d’épidémies ces dernières années (Covid, variole du singe, VRS, grippe…), les infections inquiètent particulièrement. Historiquement, les grands rassemblements sportifs ont pourtant rarement été marqués par des épisodes importants de maladies transmissibles. Il y a bien eu 61 cas d’infection au norovirus, responsable de gastro-entérites, en marge de la Coupe du monde 2006 en Allemagne, ou encore 82 cas de rougeole aux JO d’hiver de Vancouver au Canada en 2010. Le norovirus avait aussi circulé lors des JO d’hiver en Chine en 2018 (41 cas).

Mais globalement, aucune diffusion de grande ampleur d’agents pathogènes n’a jamais été signalée jusqu’ici dans un contexte de rassemblements sportifs. Seule exception marquante, l’Euro de football de 2021 : "Plusieurs équipes de scientifiques ont montré qu’il avait contribué à la propagation du Sars-CoV-2, en particulier du variant Delta", rappelle Mircea Sofonea, professeur associé d’épidémiologie à l’université de Montpellier. Les JO de Tokyo de 2021, eux, n’avaient pas contribué à relancer la circulation du coronavirus, mais ils s’étaient déroulés dans des conditions particulières, quasiment à huis clos, sans spectateur. Mais même en 2016, quand la planète entière s’inquiétait que les Jeux olympiques d’été se tiennent au Brésil en pleine épidémie de Zika, il ne s’est… rien passé. Aucun cas n’a été déclaré parmi les participants et les visiteurs, ni sur place, ni à leur retour dans leurs pays.

Les moustiques tigres, bien installés en Ile-de-France

"Cette fois, le contexte est différent", relève toutefois la Pr Brigitte Autran, immunologue et présidente du Covars, le comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires. Le Covid circule toujours, la variole du singe n’a pas totalement disparu. "Si on prend l’exemple de la dengue, les épidémies s’amplifient d’année en année au niveau mondial, et il existe aujourd’hui un risque non négligeable que des personnes infectées arrivent et deviennent une source de contamination potentielle", poursuit la Pr Autran. Une menace prise d’autant plus au sérieux que les moustiques tigres, vecteurs de ce virus, colonisent désormais quasiment tout le territoire, et se trouvent notamment bien installés en Ile-de-France.

"Personne ne s’attend bien sûr à une épidémie dévastatrice comme au Brésil ces dernières semaines, mais la menace augmente d’année en année", souligne Brigitte Autran. La spécialiste alerte aussi sur le risque que des visiteurs en provenance de l’hémisphère sud n’amènent avec eux le virus de la grippe, puisque cette partie de la planète sera alors à ce moment de l’année en pleine période épidémique. "Avec le brassage de populations et la promiscuité, toutes les conditions seront réunies pour que les pathogènes diffusent de façon favorable, ici en France, même si, pour des pathogènes associés à périodes d’incubation plus longues, les maladies ne se déclareront qu’au retour des visiteurs chez eux", confirme Mircea Sofonea.

D’autres spécialistes des maladies infectieuses s’avèrent moins inquiets. "Lors de la Coupe du monde de 1998, les autorités avaient demandé au réseau Sentinelles, dont je m’occupais, de travailler sur la prévention et la surveillance du risque. Nous pensions alors que le risque d’émergence était élevé, mais nous n’avions rien vu, et au contraire, nous avions même enregistré une baisse des consultations pour infections virales", raconte par exemple le Pr Antoine Flahault, aujourd’hui directeur de l’Institut de santé globale à l’Université de Genève (Suisse).

Des cas sporadiques

La menace représentée par la dengue lui paraît également limitée, car les populations de moustiques restent bien moins importantes sous nos latitudes que dans les régions intertropicales. "Il pourrait y avoir quelques contaminations sporadiques, ou même de petits clusters de cas autochtones, comme nous en voyons régulièrement désormais. Tout cela pourrait arriver, mais sans toutefois prendre des proportions importantes", précise l’épidémiologiste.

Quant aux maladies infectieuses respiratoires, la saison chaude ne leur est de toute façon guère propice. "En réalité, les JO ne changent pas grand-chose à la situation de Paris en été, il y a toujours des millions de visiteurs qui viennent d’un peu partout dans le monde. Ils seront peut-être un peu plus nombreux, mais le risque de transmission de maladies respiratoires n’atteindra probablement même pas celui que l’on connaît en hiver", abonde le Pr Renaud Piarroux, épidémiologiste et chef de service à l’Assistance Publique Hôpitaux de Paris.

Les autorités s’apprêtent à déployer de nombreux moyens de surveillance, y compris dans les eaux usées, de façon à pouvoir découvrir très rapidement quels microbes circulent dans la population, et agir en conséquence pour les circonscrire. Mais il y a d’autres sortes de virus qui inquiètent les experts : les virus informatiques. Le risque de voir une attaque de grande ampleur paralyser les systèmes d’information de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris est pris très au sérieux. Des protocoles ont déjà été mis en place pour y faire face : groupes WhatsApp pour maintenir la communication entre les services, procédures pour déconnecter les appareils électroniques des réseaux sans avoir à les débrancher totalement, préparation à travailler en mode dégradé, sans parler bien sûr des mesures de renforcement du niveau de sécurité informatique. Car une attaque réussie alors que Paris focalisera l’attention du monde entier serait probablement tout aussi dévastatrice pour la santé publique et l’image de la France qu’un cluster de quelques cas de maladies infectieuses…

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