Terreau fertile

Ils représentent plus d’un quart des jeunes français de 15 à 29 ans. Viennent de territoires pudiquement qualifiés de « peu denses » ou « très peu denses ». Soit, excusez du peu, 88 % des communes hexagonales. Mais ils ont la fâcheuse impression d’être les oubliés de la République. D’être relégués dans une réserve d’Indiens, une sorte de sous-pays. Vivre le passage de l’adolescence à l’âge adulte dans cette France ultra-périphérique ressemble à un parcours du combattant. Accès aux soins, à l’éducation, aux services, aux loisirs et surtout à l’emploi, tout y est plus compliqué. Sans parler des transports. À l’heure de la transition écologique, ils incarnent la France qui carbure au diesel et doit avaler des bornes. Non par choix. Mais par obligation, renforçant encore ce sentiment d’être tenu à distance de tout. En quarante ans, la mondialisation a cassé un tissu industriel dont on mesure mieux aujourd’hui le rôle social et économique. Clé de voûte d’une fierté d’appartenance fissurée. Dans un jeu de miroirs, la métropolisation triomphante accentue encore ce sentiment d’injustice et d’abandon. Rien d’étonnant donc à ce que le RN prospère sur le terreau fertile de cette fracture territoriale ouverte.

l’éditorial

Dominique Diogon