World News in French

Qui sont nos centenaires, nos supercentenaires, et comment suivre leurs exemples pour bien vieillir ?

Qui sont nos centenaires, nos supercentenaires, et comment suivre leurs exemples pour bien vieillir ?

Existe-t-il une limite à la vie humaine ? A défaut, la clé pour bien vieillir serait la prévention. « La capacité à se projeter dans le grand âge est un atout ». Et la qualité de vie repose sur trois piliers que résume le Dr Bohatier, chef du pôle de gérontologie du CHU de Clermont-Ferrand. On vous dit tout.

Existe-t-il une limite pour la vie humaine ? Au XVIIIe siècle, on estimait qu’un être humain ne pouvait pas vivre au-delà de cent ans. Mais les progrès de la médecine et des conditions de vie ont rebattu les cartes pour repousser cette limite à 110, puis 115, puis au-delà quand, en 1995, Jeanne Calment a fêté ses 120 ans. Y a-t-il une limite à l’espérance de vie humaine ? Et si oui, laquelle ?

Le débat est relancé avec de récentes publications qui posent une limite entre 120 et 150 ans. Au-delà, les auteurs estiment que l’on dépasse une limite biologique ultime pour les capacités de résilience et de réparation de l’être humain (*). Mais il y a d’autres hypothèses.

Une chose est en tout cas avérée : la longévité humaine n’a jamais été aussi élevée sur la planète. Ce qui ne doit pas être confondu avec l’espérance de vie. L’Insee notait d’ailleurs que  cette espérance de vie avait reculé en 2015 en France, avant de remonter à 80,1 ans pour les hommes et 85,8 ans pour les femmes en 2023.

1 - Combien de centenaires et super-centenaires?

Selon une estimation de l’Insee de 2023, il pourrait y avoir 198.645 centenaires vivant en France métropolitaine en 2060. C’est sept fois plus qu’en 2021 ! En 1900, ils n’étaient qu’une centaine, mais les outils de recensement étaient différents.

Un chiffre multiplié par plus de 50 entre 2060 et l’année 1990, où il y avait 3.760 centenaires connus.

Les êtres humains les plus âgés sont recensés par le Gerontology research group (GRG), basé à Los Angeles. Cette institution internationale constituée d’observateurs et de chercheurs s’est donné pour mission d’étudier la longévité humaine. Sa base de données, régulièrement mise à jour, alimente le livre Guiness des Records, mais elle repose en grande partie sur les déclarations spontanées des familles.

Les données de l’Institut national démographique (Ined) sont plus solides concernant la France, mais sa dernière communication sur les supercentenaires remonte au 19 janvier 2023.

122 ans et 64 jours : c’est l’âge qu’aurait atteint Jeanne Calment, disparue le 4 août 1997. Elle reste à ce jour l’être humain connu ayant vécu le plus longtemps. 110 ans et plus ! On les appelle les « supercentenaires ». Ils seraient 36 répertoriés en France par le Gerontology research group. Aucun connu en Auvergne par ce réseau. 114 ans depuis le 21 mai : c’est l’âge de la Vendéenne Marie-Rose Tessier. Elle est devenue la doyenne des Français ce 17 janvier. 3 femmes pour 1 homme. Au 1er janvier 2021, sur les 27.497 centenaires répertoriés par l’Ined en France métropolitaine, 23.156 ( soit 84 %) étaient des femmes (4 sur 5).

3 - Comment vivent les centenaires en France ?

En France, on parle de gériatrie à partir de 75 ans. Mais les super-centenaires sont de plus en plus nombreux à décrocher les 110 bougies. « On gagne un an de moyenne d’âge tous les trois ou quatre ans ». Et il n’y a jamais eu autant de centenaires restant à domicile.A l'hôpital de Riom, Raymond est accueilli par une équipe pluridisciplinaire du court séjour gériatrique pour s'entretenir, se préparer et bien vivre, chez lui, l'avancée dans l'âge. Photo Francis Campagnoni  

« La majorité des personnes très âgées vivent à domicile, contre 20 à 30 % seulement en institutions, et ça se passe bien?! », explique le Dr Jérome Bohatier qui dirige le pôle de gérontologie du CHU de Clemont, partagé entre Riom, Gerzat et Clermont-Ferrand.

4 - Typologie dans un département comme le Puy-de-Dôme ?

Sur un territoire qui couvre Ambert, Billom, Clermont-Ferrand, Courpière, Issoire, Pontgibaud, Riom, Saint Eloy-le-Mines et Saint-Sauves, la seule association Apamar (association à but non lucratif, créée en 1995) intervient actuellement en accompagnement à domicile auprès de 13 centenaires !L'heure du bilan de santé et de fonctionnalité à domicile, avec une infirmière de l'équipe pluridisciplinaire du court séjour gériatrique de Riom, qui maintient les personnes âgées sur la bonne voie pour bien vivre chez elles jusqu'à 100 ans et plus. Photo Francis Campagnoni

En 2021, ses intervenants en accompagnaient 17 usagers ; 18 en 2022 ; 16 en 2023. Ce 5 juin 2024, l’association a même souhaité l’anniversaire de sa doyenne à domicile où elle est accompagnée depuis huit ans : elle a eu 103 ans !

Les personnes qui sont accompagnées par l’association ont des profils très différents. Sans surprise, les femmes sont plus nombreuses : 2 hommes et 11 femmes. Cinq de ces centenaires habitent en milieu urbain, un en Ehpad et six en milieu rural. Dix vivent seuls, un vit en couple, un en famille (fille et gendre). Quatre des bénéficiaires de prestations (aide à la toilette, habillage, levers et couchers), préparation et service des repas, accompagnement et compagnie et entretien du cadre de vie) sont accompagnés 7 j/7. Les autres fonctionnent avec un à quatre passages.

5 - Comment maintenir une bonne qualité de vie dans le grand âge ?

À Riom, le pôle gérontologique du CHU vient d’ouvrir un court séjour gériatrique ; un hôpital de jour qui accueille déjà les personnes âgées et leurs aidants un jour par semaine, pour évaluer et préconiser ce qui peut maintenir le bien vivre avec le grand âge. Le Dr Jérome Bohatier qui dirige ce pôle propose trois fondamentaux : faire en sorte de rester en bonne santé, travailler sur l’équilibre et bien s’alimenter. « Plus une valeur ajoutée : anticiper »

Bien se préparer

Ce qui a favorisé considérablement le maintien de l’autonomie, c’est peut-être la capacité à envisager la dernière partie de sa vie pour qu’elle soit douce. L’époque où l’on se faisait surprendre par la vieillesse cède le pas à des retraités qui entretiennent leur santé pour en profiter.

 Le problème que l’on redoute n’est pas de vieillir, mais de mal vieillir. Ce qui fait peur, c’est moins le nombre que la qualité des années. D’où l’intérêt d’anticiper pour éviter les polypathologies et la dépendance. 

Adapter sur le fonctionnement et les espaces quotidiens : quand les accidents de vie ou de santé ne viennent pas s’en mêler, ça marche !

Choyer sa santé

Le bien vieillir repose sur trois piliers, dont la bonne santé. Il faut parfois batailler pour y veiller si le maillage sanitaire est insuffisant. Mais le relais à domicile se fait. Et les avancées médicales haussent régulièrement le curseur des solutions à proposer. En outre, beaucoup de maladies autrefois létales (cancers, diabètes, insuffisances cardiaques, rénales ou pulmonaires par exemple) deviennent chroniques et offrent des années de vie quasi ordinaires. Les états polypathologiques qui signent la dégradation de la qualité de vie deviennent plus faciles à repousser.

Rester actif

Le grand âge est une étape qui se prépare et s’entretient. Le chemin peut être pavé de choses aussi simples que le maintien d’une petite activité physique quotidienne : prendre un déambulateur pour continuer à aller chercher le pain, se mettre à la gym adaptée, bien faire la mobilisation proposée par le kiné, continuer à monter quelques marches…

C’est ce qui va permettre d’améliorer le fonctionnement cardiaque ou respiratoire. Il y a un gain quel que soit l’âge où l’on s’y (re)met. 

Ce jour-là, Raymonde d’un côté, Raymond et sa famille de l’autre, sont justement reçus à l’hôpital de jour. Médecin, infirmiers, kinésithérapeute, psychologue, ergothérapeute et autres professionnels de l’équipe, orchestrée par le Dr Joyon, se succèdent pour évaluer leur santé, mais aussi leurs capacités à fonctionner dans leur environnement habituel.Le Dr Jérome Bohatier présente l'heure du bilan, ce mardi-là, à Riom.  

Des choses aussi simples que l’équilibre, les capacités sensorielles qui réduiraient le cercle social, la capacité à tendre le bras pour attraper les verres ou mettre un repas à chauffer…

Travailler l’équilibre

C’est capital pour la prévention des chutes, qui signent souvent l’entrée en grande fragilité. Les populations asiatiques savent prendre en compte cette dimension du bien vieillir, avec la mobilisation lente et contrôlée de pratiques comme le taï-chi ou le qi-gong.

Bien s’alimenter

« L’alimentation, c’est ce qui fait marcher la chaudière ! » Il suffit de petites astuces comme un œuf ou du fromage dans l’habituel bol de soupe pour changer les perspectives. Jamais d’impasse sur la nutrition !

Nati raconte 100 ans : "Je me suis sortie de tout."

(*) Longitudinal analysis of blood markers reveals progressive loss of résilience and predicts human lifespan limit, Nature, mai 2021.

Anne Bourges

Читайте на 123ru.net