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A Clermont-Ferrand, l'invraisemblable expédition punitive après "un comportement inacceptable" envers une jeune femme

A Clermont-Ferrand, l'invraisemblable expédition punitive après

Un incompréhensible emballement a conduit deux hommes de 19 et 22 ans devant le tribunal correctionnel, ce jeudi 27 juin. En juillet 2023, à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), ils avaient violemment agressé un trentenaire, suspecté d’avoir eu des gestes déplacés à l’encontre de la sœur et petite amie des prévenus.

Les deux amis, âgés de 19 et 22 ans et jusqu’ici parfaitement inconnus de la justice, ont la tête basse à la barre du tribunal correctionnel clermontois. À plus forte raison lorsque la présidente, Isabelle Ferret, leur rappelle sans détour que c’est devant une autre juridiction, en l’occurrence une cour d’assises, qu’ils auraient bien pu se retrouver…

Petit retour un an en arrière. Il est 3 h 50, ce jeudi 27 juillet 2023, sur le parking d’une entreprise située rue Gutenberg, à Clermont-Ferrand. Un salarié, âgé de 33 ans, vient prendre son travail. Il est à peine descendu de son véhicule que deux hommes se ruent sur lui et le rouent de coups, gourdins en main, pendant plus d’une minute, avant de prendre la fuite.

Des blessures gravissimes

La victime, prise en charge par les sapeurs-pompiers, souffre de multiples fractures au visage, à la tête et dans le dos (ainsi que d’une dissection de l’aorte, une blessure gravissime), qui lui vaudront 21 jours d’ITT.

Même si les raisons de cette agression paraissent d’abord très nébuleuses, l’enquête s’oriente finalement vers une jeune salariée de l’entreprise, âgée de 18 ans. Ou, plus précisément, vers son frère et son petit ami. Quelques heures avant les faits, elle leur aurait en effet indiqué être victime, depuis plusieurs semaines, de gestes et de comportements déplacés de la part du trentenaire. N’ayant pu déposer plainte immédiatement auprès de la brigade de gendarmerie de leur lieu de résidence (*), les deux hommes avaient alors pris la pire des décisions en choisissant de se faire justice eux-mêmes (ce qui les a conduits à être poursuivis pour violences aggravées par trois circonstances : la réunion, l'usage d'une arme par destination et la préméditation, NDLR).

"On était très en colère. Sur le moment, on n’a pas réfléchi", reconnaît le grand frère. "Ce qu’on a fait est impardonnable", ajoute le petit copain de la jeune femme.

"Mon client a été victime d'un AVC, puis d'un infarctus, en janvier dernier. Il a failli en mourir. Ce sont là des conséquences directes de son agression, et plus particulièrement de la dissection aortique provoquée par les coups".

"Que l’on veuille protéger les siens, cela peut à la limite se comprendre, a admis Me Clémence Marcelot pour la partie civile. Mais certainement pas en agissant de cette façon…".

La procureure de la République, Anne-Claire Garraud, est allée dans le même sens, en rappelant que "rien ne peut justifier de tels actes". Elle a requis douze mois de prison, dont la moitié assortie du sursis, demandant que la partie ferme soit effectuée sous forme d’une détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE).

"Ce sont des gamins seuls et démunis qui ont agi cette nuit-là. Personne ne voulait prendre la mesure de la détresse de la jeune femme".

En défense, Me Renaud Portejoie (pour le frère) a évoqué "une loi du talion appliquée par dépit et non par choix par ces gamins, totalement dépassés par leurs émotions", avant que Me Armelle Palamenghi (pour le petit ami) ne souligne que "tout ce gâchis aurait pu être évité si la victime n’avait pas eu préalablement un comportement inacceptable avec la jeune femme".

"Aucun adulte n'a répondu présent dans cette affaire lorsque la jeune femme a voulu dénoncer les agressions sexuelles dont elle était victime depuis des jours sur son lieu de travail".

Les deux hommes ont été condamnés à douze mois de prison, dont huit assortis d’un sursis probatoire pendant deux ans. La partie ferme de la peine sera effectuée en DDSE.

Une audience sur intérêts civils, fixée au 7 janvier 2025, permettra de fixer le montant définitif des dédommagements qui devront être versés à la victime. Cette dernière, qui a gardé de lourdes séquelles de son agression, fera, d'ici là, l'objet d'une expertise médicale.

Christian Lefèvre

(*) L’heure à laquelle les gendarmes avaient été sollicités (en début de soirée) ne leur permettait pas de recueillir cette plainte. Tout en s’étant informés de l’éventuel caractère d’urgence de la situation, les militaires avaient alors proposé aux deux hommes et à la jeune femme de se présenter dès le lendemain matin à leur unité pour y déposer plainte.

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