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Les conseils de la science pour s'améliorer en sport : le cerveau, un allié trop souvent négligé

Comment performer dans sa pratique sportive, comment bien s’entraîner et prendre du plaisir à se dépasser sans se blesser ? L’Euro de football, les Jeux olympiques de Paris sont autant de vitrines pour le sport de haut niveau, avec ses athlètes suivis au jour le jour, parfois par des armées de médecins, kinésithérapeutes, psychologues… Pour le sportif du dimanche jusqu’à l’amateur endurci, impossible d’être aussi bien accompagné. Les plus argentés se tournent vers des coachs personnels, quand la plupart glanent des recommandations auprès de collègues sportifs, d’outils connectés, voire de YouTube, Instagram ou TikTok… où bons et souvent moins bons conseils pullulent. De nombreuses études scientifiques apportent pourtant des réponses sérieuses quant aux méthodes éprouvées pour s’améliorer. L’Express passe en revue quatre thèmes essentiels : la préparation mentale, l’alimentation, les méthodes de récupération et la conduite à tenir face aux blessures. Dans ce premier épisode, place aux pouvoirs fascinants du cerveau.

Il s'agit de l’organe le plus sous-estimé dans le sport. Et pourtant, il est possible de l’entraîner pour prendre plus de plaisir et mieux performer ! Et l’intérêt est grand, car le cerveau est doté de super pouvoirs méconnus. En premier lieu, celui de l’imagination. "L'avantage de la visualisation mentale est démontré scientifiquement : le simple fait d’imaginer un mouvement sollicite les structures cérébrales et les muscles impliqués", résume Vincent Nougier, directeur du groupement de recherche CNRS Sport et activité physique de l’Université de Grenoble. Dans la vie, lorsque nous bougeons, les commandes motrices sont envoyées aux membres par notre cortex moteur. "Chacune de ses zones est associée à un membre, et plus on s’entraîne à faire un geste, plus on renforce les connexions entre les neurones de la zone correspondante, détaille Camille Jeunet-Kelway, chercheuse du CNRS à l’Institut de neurosciences cognitives et intégratives d’Aquitaine. Quand une personne s’imagine simplement en train de réaliser une action, elle sollicite des réseaux cérébraux similaires."

Utiliser le cortex visuel ou moteur, deux usages, deux bénéfices

Il existe plusieurs façon d'utiliser son cerveau. Le première est donc l’imagerie cérébrale visuelle, qui vise à se voir soi-même en train d’effectuer un geste, ce qui active le cortex visuel. En s’entraînant régulièrement de cette façon, il est possible d'améliorer la confiance en soi, mais aussi la mémorisation et la stratégie, par exemple pour mieux grimper une voie en escalade ou dévaler une pente à ski. "Il existe également l'imagerie kinesthésique, qui consiste à imaginer en ressentant toutes les sensations liées au geste, comme la contraction musculaire du bras et la pression de la raquette lorsqu’on imagine un coup droit au tennis", poursuit la chercheuse. Dans ce cas, c’est le cortex moteur qui s’active. On renforce alors les connexions neuronales liées au geste. "De solides preuves scientifiques indiquent que l’imagerie motrice peut améliorer la précision, la souplesse et la force - pas en gain musculaire, mais en efficacité", ajoute-t-elle.

Il est possible de pratiquer ces exercices d’imagination à tout moment, notamment lorsque la fatigue physique est trop importante ou en cas de blessure. Les chercheurs soulignent néanmoins qu'il reste difficile de savoir avec précision si les sportifs utilisent la bonne imagerie et sollicitent donc le bon cortex - visuel ou moteur - en fonction de leur objectif. Raison pour laquelle ils utilisent le "neurofeedback" grâce à des interfaces cerveau machine et des électroencéphalogrammes afin de savoir si une personne active son cortex moteur ou visuel. Si ces techniques de précisions sont, aujourd’hui, principalement destinées aux sportifs de haut niveau, des outils pour le grand public pourraient bientôt arriver sur le marché, par exemple grâce à des électrodes connectées, que Camille Jeunet-Kelway essaie de développer au sein d’une start-up qu’elle vient de lancer.

"Un autre type d'imagerie cérébrale est la visualisation flash, qui se déroule au cœur de l’action, quand le sportif imagine ce qu’il veut faire quelques secondes avant son geste", ajoute Jean-Philippe Lachaux, neurologue au Centre de recherche en neurosciences de Lyon, auteur de l’ouvrage Dans le cerveau des champions. Un aspect particulièrement utile dans les sports techniques, comme ceux de raquette ou de ballon. "Les recherches sont encore balbutiantes dans ce domaine, car il est impossible de pratiquer une imagerie en plein cœur de l’action, mais nous travaillons en collectant le témoignage de grands sportifs. Nous savons néanmoins qu’il est positif de prendre l’habitude de visualiser ce que l’on veut accomplir juste avant de le faire", précise le Pr. Lachaux.

L'effet de la motivation sur les performances prouvé mathématiquement

Mais les pouvoirs du cerveau ne s’arrêtent pas là. La capacité d’adaptation est elle aussi essentielle. L'avantage est qu'elle se travaille plus facilement : il suffit de se confronter à des environnements variables. "Cela a été démontré dans de nombreux domaines de l’apprentissage : on apprend moins vite, mais mieux dans des situations instables. De la même manière, il est intéressant de s’entraîner lorsque l’on est fatigué physiquement et mentalement, car cela permet de ne pas s’écrouler lors d’une épreuve", indique Vincent Nougier.

Des scientifiques ont même réussi à mettre le mental et la motivation en équations grâce à un modèle mathématique, détaille une étude publiée en mars dans Frontiers in Sports and Active Living. "Afin de minimiser le coût induit par un effort, il faut réduire les instructions du cerveau au muscle, donc réduire les sollicitations externes et musculaires et les variations d’instructions, ce qui peut s’effectuer grâce à la concentration sur l’action", explique Amandine Aftalion chercheuse CNRS au Centre d’analyses et de mathématiques sociales, coautrice de ces travaux, et autrice de Pourquoi est-on penché dans les virages ?, un ouvrage de vulgarisation.

Les auteurs expliquent ainsi que la motivation permet de produire une action plus intense, en augmentant la rapidité d’exécution tout en réduisant la pénibilité ressentie. "Pour le sportif amateur, cela peut s’effectuer en suivant quelqu’un qui court au bon rythme, ou en recopiant ses gestes, précise la chercheuse. Plus généralement, pour progresser, mieux vaut faire du sport à plusieurs". Il est également plus important d’apprendre à se connaître et à modérer son effort, à tenir le rythme choisi, plutôt que se reposer sur sa montre connectée, dont les instructions peuvent d’ailleurs complètement annuler l’effet de détente psychologique du cerveau en produisant une fatigue mentale et en détournant l’attention. "Il faut aussi savoir pourquoi on va faire un effort, car lorsqu’on est motivé et qu’on en a envie, avoir un but réduit la pénibilité de l’effort", ajoute Amandine Aftalion.

Prêter plus attention au cerveau, sans se faire berner

"Le cerveau reste encore trop occulté aujourd’hui, car l’entrée dans le sport se fait toujours par le physique, donc la dimension mentale n’intervient pas, sauf dans le cas de la préparation mentale, et là, c’est souvent un vaste fourre-tout, comme la programmation neurolinguistique et la méditation transcendantale qui ne sont fondées sur rien, prévient Vincent Nougier. 99 % de ceux qui s’autoproclament 'coach mental' n’ont aucune compétence ni formation en psychologie ou sur le fonctionnement du cerveau".

Le fond du problème de la préparation mentale consisterait, selon lui, principalement à assurer aux sportifs d’avoir l’environnement le plus serein possible, en allégeant les problèmes extérieurs (famille, travail, finances). Et si cet aspect est de plus en plus abordé dans le sport de haut niveau, notamment parce que les méthodes pour l’amélioration technique et physique commencent à arriver à leur maximum, il est en revanche difficile à mettre en place pour les amateurs. Pour eux, la préparation mentale telle que vendue par les coachs en tout genre s’avère donc globalement inutile.

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