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Les enjeux de la normalisation des relations turco-égyptiennes (2/2)

La rencontre entre Recep Tayyip Erdogan et Abdel Fatah Al-Sissi, le 14 février 2024, vient consolider le processus de normalisation

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La rencontre entre Recep Tayyip Erdogan et Abdel Fatah Al-Sissi, le 14 février 2024, vient consolider le processus de normalisation des relations turco-égyptiennes en cours depuis quelques années. Cette visite revêt d’importants enjeux commerciaux, énergétiques et géopolitiques. 

Des tentatives de rapprochement

Rencontre entre Mevlut Cavusoglu, le ministre des Affaires étrangères turc, et son homologue égyptien Sameh Choukry au Caire.
Les ministres des Affaires étrangères turc et égyptien se sont rencontrés au Caire.

En 2021, une première reprise de dialogue est amorcée entre la Turquie et l’Égypte. Celle-ci intervient lorsqu’Ankara décide de censurer les médias proches de l’opposition égyptienne présents sur son territoire. Cependant, l’accord signé entre la Libye et la Turquie sur la prospection d’hydrocarbures en Méditerranée orientale entraînera le gel du processus de normalisation.

Toutefois, en 2022, à l’occasion de la Coupe du Monde de football au Qatar, le dialogue est relancé sous l’égide de l’émir Sheikh Tamim bin Hamad al-Thani. Bien qu’aucun accord concret ne soit conclu, une poignée de main entre les deux chefs d’État écarte le risque de rupture diplomatique.

Depuis lors, les évolutions géopolitiques régionales ont permis de relancer le processus de normalisation entre les deux États. Lors d’une visite en Égypte en 2023, le ministre des Affaires étrangères turc, Mevlüt Çavuşoğlu, a notamment annoncé « le coup d’envoi du retour à la normale » des relations turco-égyptiennes.

Des enjeux économiques et commerciaux

L’Égypte et la Turquie étant des partenaires commerciaux importants, le processus de normalisation revêt avant tout un enjeu économique. Aujourd’hui, l’Égypte est le premier partenaire commercial de la Turquie en Afrique. La Turquie, elle, figure parmi ses principaux fournisseurs. Leurs échanges commerciaux ont considérablement augmenté depuis le début du processus de rapprochement en 2020. Le volume des échanges a ainsi doublé, atteignant en 2023 plus de 10 milliards de dollars. Cette tendance devrait se poursuivre dans les prochaines années.

Tous deux confrontés à d’importantes difficultés économiques (forte inflation, dévaluation de la monnaie nationale, appauvrissement de la population, etc…), la normalisation des relations turco-égyptiennes représente d’importantes opportunités. Le Caire pourrait ainsi bénéficier d’une augmentation des investissements turcs sur son territoire. De son côté, Ankara trouverait de nouveaux débouchés commerciaux, soutenant ainsi sa stratégie économique axée sur les exportations.

Des enjeux géopolitiques et sécuritaires

La normalisation des relations turco-égyptiennes a également un enjeu géopolitique et sécuritaire.

La guerre à Gaza constitue aujourd’hui l’une des principales préoccupations pour les deux États. Avec la poursuite des combats, l’Égypte redoute l’afflux massif de réfugiés sur son territoire, en particulier dans le Sinaï, ce qui pourrait compromettre sa sécurité nationale. En renforçant leur coopération, les deux États espèrent œuvrer plus efficacement pour une stabilité régionale.

De la même manière, d’autres conflits régionaux pourraient également être impactés par ce rapprochement. Un exemple notable est le différend entre l’Éthiopie et l’Égypte concernant la construction du barrage de la Renaissance sur le Nil, fleuve dont Le Caire dépend fortement pour répondre à ses besoins en eau. La Turquie, qui dispose d’une certaine influence dans la Corne de l’Afrique, s’est déclarée prête à agir en tant que médiatrice pour résoudre ce conflit. La normalisation des relations turco-égyptiennes pourrait également favoriser une coopération accrue dans la résolution du conflit en Libye, où les deux pays soutiennent des positions divergentes.

Des enjeux énergétiques 

Grâce à ses ressources gazières et ses infrastructures énergétiques, l’Égypte occupe une position centrale dans l’exploitation et l’exportation du gaz en Méditerranée orientale. De son côté, disposant de faibles ressources en hydrocarbures, la Turquie a vu ses importations énergétiques croître ces dernières années, en raison d’une demande domestique en hausse. Ne possédant pas à ce jour de gisement offshore dans la zone, Ankara a adopté depuis plusieurs années une attitude proactive afin de se positionner en tant que hub énergétique. Les actions menées par la Turquie ont créé de nombreuses tensions avec les pays riverains, entraînant son isolement régional.

Dans ce contexte, avec une amélioration des relations turco-égyptiennes, Ankara espère sortir de son isolement régional. Cela pourrait ainsi influer positivement sur sa place dans le jeu gazier en Méditerranée orientale.

La visite du président turc Recep Tayyip Erdogan en Égypte après plus de 10 ans représente d’importants enjeux pour les deux puissances régionales. Ouvrant la voie à davantage de coopération, cette rencontre pourrait se répercuter sur les dynamiques en place dans la région.

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