Le Sénégal veut remettre la main sur son secteur minier, «assujetti» à la France
Lors d’une prise de parole au sommet Mining on Top Africa le 4 juillet dernier à Paris, le ministre sénégalais des Mines et du Pétrole Biram Soulèye Diop a pointé du doigt «l’assujettissement» des États africains, notamment le Sénégal, aux pays qui «exploitent leurs ressources» avec en tête la France.
Paris, fustige le ministre, refuse de partager des données importantes sur l'exploitation aurifère au Sénégal avec les autorités du pays. «Saviez-vous que la France connaît mieux que le Sénégal le cadastre minier du Sénégal ?», regrette-t-il non sans sarcasme. «Ils ont toujours les données et ne les ont pas partagées avec moi. De quel genre de générosité parlons-nous ?», a-t-il tancé.
Les pays africains producteurs de minerais doivent travailler ensemble pour accélérer la transformation locale, a déclaré le ministre, une question de souveraineté et de développement de leur propre expérience et compétences.
Selon lui, dans la course mondiale aux minerais, le Sénégal, dont le sous-sol recèle une grande variété de minerais (or, phosphates, fer, zircon), les vendra au plus offrant. «Je ne voudrais pas me limiter à l’Europe. Nous devons faire du profit partout dans le monde !», a-t-il martelé.
«C’est vrai, je suis venu à Paris, mais si l’Arabie Saoudite m’intéresse, j’irai certainement la chercher là-bas !», a tonné M. Diop, dans des propos interprétés par RFI comme un «discours de rupture» face aux industriels français.
«Respect mutuel» et «partenariat équilibré»
Ces déclarations intervenaient alors que le nouveau président sénégalais élu le 2 avril dernier, Bassirou Diomaye Faye, et son Premier ministre Ousmane Sonko n’ont pas raté une occasion pour réaffirmer l’ambition du Sénégal de retrouver sa souveraineté notamment économique.
Le jeune président, qui se positionne comme souverainiste, avait promis pendant sa campagne de redéfinir les rapports du Sénégal avec la France. C’est dans ce cadre que son premier déplacement en Europe s’est fait dans l’Hexagone. A l’issue d’une rencontre avec son homologue français Emmanuel Macron le 20 juin, les deux hommes ont affirmé partager une volonté de «donner une nouvelle impulsion» aux relations franco-sénégalaises, fondée sur «un respect mutuel» et «un partenariat équilibré».
Beaucoup plus virulent dans ses critiques envers la France et l’Occident, le Premier ministre Ousmane Sonko ne ménage pas ses propos depuis sa nomination en avril dernier à la tête du gouvernement. Le 16 mai dernier, en présence du leader de gauche français Jean-Luc Mélenchon, le responsable s’est livré à une vive critique de l’action passée et récente de l’Occident, de l’Europe et de la France concernant son pays.
«Néocolonisation» à l’œuvre
M. Sonko a aussi dénoncé la «néocolonisation» à l’œuvre, selon lui, dans les relations entre l’Occident et l’Afrique en général, et entre la France et le Sénégal en particulier.
D’inspiration «panafricaniste de gauche», le programme de Bassirou Diomaye Faye, nouveau président du Sénégal, et de son Premier ministre Ousmane Soko, vise à garantir la souveraineté économique du pays.
Au Sénégal, pays africain riche en minerai, le secteur minier présente des potentialités importantes, et est porté par trois activités principales : l'or, le phosphate et les sables titanifères.
Selon les chiffres de Team France, l'or représente la première source de production, avec 14,97 tonnes produites en 2022. Sur la même période, les industries du phosphate ont produit 2 492 687 tonnes et celles du zircon 84 993 tonnes.