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Laurence Tubiana veut aller à Matignon pour "arracher des mesures de gauche"

Laurence Tubiana veut aller à Matignon pour

QUESTION: Votre nom a été avancé par les socialistes pour Matignon. Êtes-vous d'accord?

REPONSE: "Oui. Je ne demande rien, mais c'est le moment de l'engagement et cela me correspond. Je n'avais pas ça en tête, même pas une minute, il y a quelques jours. Mais quand il y a une crise politique, il faut y répondre. Il y a besoin d'une personne de gauche, si cela doit être moi je le fais".

Q: Comment le NFP peut-il gouverner sans majorité absolue?

R: "Les résultats des élections sont contrastés. Ce qu'il y a eu de fort, c'est un front républicain contre l'extrême droite. Et même si le Nouveau Front populaire n'a pas gagné la majorité absolue, il a obtenu un succès qui répond à l'urgence sociale et écologique.

La société est polarisée et divisée. On crée des ennemis pour ne pas traiter la question explosive de l'urgence sociale, on commence à essentialiser les gens.

C'est donc une politique de gauche qu'il faut faire et non pas chercher un barycentre. Il faut arracher les mesures de gauche sur lesquelles tous les députés qui comprennent ce qui se passe peuvent s'accorder, même si tout ne leur plaît pas.

C'est la seule solution pour faire tenir un gouvernement, que ce soit moi à Matignon ou une autre. Je dis une autre car on n'a quand même pas beaucoup de femmes à la direction des affaires".

Q: Quelles seraient vos priorités pour gouverner ?

R: "On a une boussole, une ambition, les électeurs l'ont indiqué: le programme du Nouveau Front populaire. Il y a une urgence à restaurer un dialogue social sur les salaires, comme l'ont soulevé Sophie Binet (CGT) et Marylise Léon (CFDT). Sur le SMIC, mais pas seulement, parce que l'inflation a aussi frappé tous les petits salaires.

Il y a aussi la justice fiscale. Et l'impôt sur les grandes fortunes, il n'y a pas qu'en France qu'on en parle. La progression de l'extrême droite en France colle bien avec celle des inégalités. A chaque fois qu'on pratique des mesures antisociales, comme sous Macron, on ouvre la voie à l'extrême droite".

Q: Au sein du NFP, les Insoumis vous trouvent trop "Macron-compatible"…

R: "J'ai refusé trois ou quatre fois d'entrer au gouvernement sous Emmanuel Macron, car j'étais en désaccord avec sa politique. Il va falloir gagner des majorités à l'Assemblée nationale, arracher le plus possible de choses en trouvant des consensus.

Je pense à l'échec de justesse de la loi sur les superprofits, soutenue à gauche et par une partie du centre. Sur les retraites, il y a une grande majorité à l'Assemblée pour changer de cap, parce que c'était trop brutal. Le gouvernement n'a pas voulu entendre tous les gens qui ont défilé pendant des semaines".

Q: Donc il faut abroger la réforme des retraites?

R: "Il faut abroger la réforme, la geler, tout ce qu'on veut, mais on ne l'applique pas. Et on relance le dialogue social parce que des choses ont été complètement oubliées, comme la pénibilité. Il faudra également abroger la loi immigration.

Ensuite, on a un problème avec l'accès aux services publics, notamment les déserts médicaux. Ça pose la question des gens qui sont isolés, parce que je suis obsédée par tous ces gens qui ont voté pour le Rassemblement national. Il faut aller en chercher certains parce qu'ils sont en colère, ils pensent qu'on ne s'occupe pas d'eux. Les gilets jaunes, c'était aussi ça".

Q: Comment convaincre la macronie de revenir sur les retraites ou la loi immigration ?

R: "Peut-être qu'ils n'étaient pas tous d'accord finalement. Que la politique centralisée de là-haut, ça ne leur convenait pas. S'ils écoutent les Français, il faut qu'ils soient raisonnables. Je ne sais pas si c'est réaliste mais il faut y aller. Avant l'accord de Paris, jusqu'au dernier jour, tout le monde me disait que c'était fichu".

Q: Comment vous définiriez-vous politiquement?

R: "Je suis une femme de gauche, mais pas encartée, qui partage les idéaux de la famille de gauche au sens large: le progrès social, l'égalité, la démocratie, la lutte contre la brutalisation des minorités, comme les femmes"

Q: Vous engagez-vous à ne pas utiliser le 49.3 ou à ne pas gouverner par décret?

R: "Mon ADN, ce n'est pas le 49.3, on voit l'incompréhension des Français sur ce sujet. Même s'il faut peut-être des exceptions, notamment sur le budget.

Le principal défaut de la politique, c'est quand elle se fait par le haut, qu'on gouverne à coups de menton, quand on pense qu'on va tout régler à coups de décrets ou de lois. Je crois à la tradition en France du dialogue social: on a eu Mendès France et la majorité plurielle de Lionel Jospin.

François Ruffin a dit quelque chose de très bien: il faut être bienveillant. Ne pas brutaliser la société, c'est quand même la base de la démocratie, non?"

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