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"Ne pas sous-estimer Kamala Harris" : le renoncement de Biden vu depuis l’étranger

En 200 ans, aucune campagne présidentielle américaine n’aura connu autant de rebondissements en si peu de temps. En l’espace de huit de jours, un candidat a failli perdre la vie, et l’autre a fini par se retirer de la course face aux doutes de nombreuses personnes jusque dans son propre camp. Une folle semaine qu’El Universal résume en une formule musclée : "La balle tirée pour tuer Trump il y a huit jours a finalement tué Biden."

Alors que les appels en faveur d’un désistement du président des Etats-Unis se multipliaient, "la raison a fini par l’emporter", se réjouit le quotidien mexicain. De l’autre côté de la frontière, le magazine américain Rolling Stones salue une "décision historique", faisant entrer Biden dans le sillage de Lyndon B. Johnson, "seul président moderne à renoncer volontairement à la chance de servir encore quatre ans".

Une annonce montée "en 48 heures"

Il faut dire que beaucoup d’indicateurs viraient au rouge. "La carte s’élargissait dans la mauvaise direction. Le parti avait tourné. L’argent se tarissait. Les sondages dans les États à gagner absolument étaient de pire en pire", égraine The Washington Post. Longtemps soutenu par les pontes du camp démocrate, telles que Nancy Pelosi, souligne le Corriere della Sera, Joe Biden a fini par perdre la plupart de ses défenseurs. Dans les derniers jours précédant son retrait, les doutes ont même infiltré dans le clan Biden.

Dans un récit détaillé, le New York Times raconte notamment ce "week-end où Joe Biden a décidé de se retirer de la compétition". Dès samedi 20 juillet dans l’après-midi, la plume présidentielle, Mike Donilon, et le plus proche conseiller de Joe Biden, Steve Ricchetti, "ont travaillé sur l’une des lettres les plus importantes et les plus historiques de la présidence de Biden", retrace le quotidien américain. Les seuls, presque, à avoir été mis dans la confidence. "Un secret de polichinelle", résume le journal espagnol El Mundo, gardé loin de ses équipes de campagne et de la Maison-Blanche.

Pour nos confrères italiens du Corriere della Sera, "il est clair que Biden voulait contrôler l’annonce de ce qui a dû être l’une des décisions les plus difficiles de sa vie". Le président de la première puissance économique mondiale n’avait-il pas assuré début juillet, sur ABC, qu’il ne se retirerait que "si Dieu tout-puissant" le lui adjoignait ? Raison de plus pour s’incliner devant sa décision. El informador recense notamment les réactions des hommes politiques mexicains qui saluent "l’acte d’intégrité et de maturité politique" de Joe Biden.

Kamala Harris, l’espoir d’un nouveau souffle

Nombreux voient dans ce point final écrit par Joe Biden le début d’une phase de prospérité pour la campagne démocrate. "En se débarrassant audacieusement de Biden, les démocrates vont maintenant profiter des feux de la rampe", analyse sèchement le magazine conservateur britannique The Spectator, qui développe : "Les médias s’intéresseront à un nouveau groupe de personnages. Comment Harris obtiendra-t-elle l’investiture ? Qui choisira-t-elle comme colistier ? Qui sera son directeur de campagne ? […]" Car si rien n’est encore fait comme le souligne l’ensemble de la presse internationale, l’actuelle vice-présidente fait figure de favorite pour reprendre la course à la présidentielle.

"Tous les regards sont tournés vers elle", constate El Mundo, qui estime que "la première femme à accéder à la vice-présidence, afro-américaine et d’origine asiatique, représente le grand espoir des démocrates de battre le candidat républicain". Car si elle avait "entamé une chute vertigineuse jusqu’à la sixième place, elle est à l’heure actuelle au même niveau que Joe Biden dans les intentions de vote", fait valoir le quotidien espagnol. Raison pour laquelle, entre autres, le conservateur The Spectator recommande aux Républicains "de ne pas sous-estimer Kamala Harris".

L’urgence de redimensionner la campagne républicaine

D’autant que leur stratégie est désormais à revoir. "Trump s’efforce de faire pivoter sa campagne pour attaquer Kamala Harris", titre The Guardian. Car l’architecture de la campagne républicaine a été taillée sur-mesure pour un affrontement entre le président sortant et l’ex. Or, comme le note le quotidien britannique, "les meilleures lignes d’attaque contre Biden, sur l’âge et l’acuité mentale, ne peuvent pas être utilisées (contre Kamala Harris)". Pire : "elles pourraient être reprises par les démocrates contre Trump, étant donné qu’il sera désormais le candidat le plus âgé."

Ainsi, "les millions de dollars que les partisans de Trump ont dépensés pour créer des publicités d’attaque contre Biden, dont une, pas plus tard que la semaine dernière, centrée sur le faux pas de Biden lors du débat présidentiel du mois dernier au sujet des décès de militaires, ont été gaspillés", abonde The Guardian. The Spectator, lui, pointe avec une touche d’humour que "soudain, le candidat républicain est devenu un vieux schnock, tandis que le probable candidat démocrate représente le changement générationnel", à tel point que "Trump serait devenu l’actualité d’hier".

Michelle Obama, un rêve qui risque de ne jamais se réaliser

Serait-ce une aubaine pour des démocrates qui pousserait même certains à s’autoriser quelques fantasmes ? Et pourquoi pas une candidature de Michelle Obama à la Maison-Blanche ? Hypothèse galvanisée par un sondage Ipsos/Reuters publié début juillet plaçant l’ex-First Lady comme la seule en position de battre Donald Trump en novembre prochain. Mais "totalement infondée", balaye Il Post, qui avise ses lecteurs, quitte à doucher certains espoirs : "Non l’option Michelle Obama n’existe pas".

Michelle Obama "n’a jamais laissé entendre qu’elle se présenterait à des fonctions publiques, ne s’est jamais comportée de manière à le suggérer" et a même "toujours démenti de telles rumeurs", fait valoir le quotidien italien. En 2012, mais également en 2016, à la fin du mandat de son mari. Et Il Post d’exhumer une formule teintée d’humour qu’avait eu le quarante-quatrième président des Etats-Unis : "Il y a trois choses qui sont certaines dans la vie. La mort, les impôts et le fait que Michelle ne se présentera pas à la présidence des États-Unis".

Si l’hypothèse Michelle Obama est venue sur la table, c’est en partie parce que Kamala Harris, héritière naturelle de Joe Biden, n’est pas parvenue à conquérir le cœur des Américains. Le quotidien helvétique Le Temps relève notamment "les handicaps" de "cette femme énergique mais tout aussi impopulaire". Le Soir, en Belgique, reste quant à lui prudent : "Kamala Harris, la vice-présidente sortante ? Possible mais pas certain. C’est le Parti démocrate qui décidera avant l’ouverture de la convention démocrate qui se tient du 19 au 22 août. Le choix devra ensuite être validé par les délégués des 52 Etats."

Qu’importe en réalité. Car quiconque remplacera Joe Biden aurait toutes ses chances de gagner. La prophétie est de Nikki Haley, principale rivale de Donald Trump lors des primaires républicaines. En janvier dernier, l’ancienne gouverneure de Caroline du Sud avait lâché, mine de rien : "Le premier parti à retirer son candidat de 80 ans sera celui qui gagnera cette élection."

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