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L'institut de formation politique à Paris, l'école qui prépare à la coalition des droites

L'institut de formation politique à Paris, l'école qui prépare à la coalition des droites

Alexandre Pesey, qui a des attaches familiales en Eure-et-Loir, dirige l’Institut de formation politique. Une plateforme de formation et de réseau qui œuvre à la coalition des droites.

« On ne pensait pas que Ciotti allait faire ça. Il n’était pas connu pour avoir pris ce genre de position dans le passé… », se réjouit Alexandre Pesey, à propos de l’alliance électorale que le président contesté des Républicains (LR) a passé avec le Rassemblement national (RN) au lendemain de la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin.Signe des temps qui changent, son attitude a indigné une partie de la classe politique et des siens, mais on est loin de la bronca que soulevaient, dans le passé, ces tentatives de rapprochement, des « compromissions » qui faisaient les gros titres pendant des mois.

« Ça s’est bien décanté intellectuellement »

« Politiquement, on est encore dans une période de décantation, aucun parti n’est encore au clair. Mais ça s’est bien décanté intellectuellement, dans les associations, les médias, chez les jeunes… », analyse Alexandre Pesey.Lundi 22 juillet, Éric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, appelait justement son camp à « trancher la ligne des LR à travers un vote clair ». Vilipendant le ralliement de Laurent Wauquiez et Xavier Bertrand à la macronie, il somme les siens de choisir entre « l’alliance des droites dans l’indépendance » ou « l’intégration des LR dans le camp macroniste ». 

Ce qui les rassemble

Ces avancées, Alexandre Pesey en éprouve une grande satisfaction et en attribue quelques fruits à l’Institut de formation politique, à Paris, qu’il dirige.« Parce que ce qui divise les droites est moins important que ce qui les rassemble », reprend ce responsable, dont la famille est en partie originaire d’Eure-et-Loir - sa grand-mère paternelle était de Nogent-le-Roi, tandis que sa mère et sa tante étaient à la tête d’une exploitation céréalière, près de Janville-en-Beauce. Il tient de ses racines agricoles, dit-il, cet esprit d’entreprendre, qui le conduira à fonder, avec deux acolytes, cet Institut de formation politique, en 2004. 

La bataille des idées

Cet établissement vise à former les cadres de partis et autres relais d’opinion, avec l’idée qu’à leur tour, ils propageront leurs convictions, via le monde culturel, associatif, de la justice, de l’éducation… Car, avant de parler d’arc de droite, Alexandre Pesey comprend, très tôt, qu’il faut d’abord mener une bataille des idées, comme l’a fait la gauche, dont le fonctionnement fascine ce conservateur dans les valeurs et libéral en économie. Il en prend la mesure lors de ses études, dans les années 90, -dans une école de commerce, à Lyon, et à la fac de droit de Paris II Assas. D’une part en regardant faire les étudiants de cette obédience, d’autre part, par les auteurs, dont Antonio Gramsci, philosophe communiste. 

« Ils ont théorisé le fait que l’engagement politique ne se limite pas au terrain électoral. Pour la gauche, l’engagement politique s’étend aux médias, à la magistrature, aux associations, à la culture… Souvent, à droite, il se résume au terrain électoral, soit on a gagné, soit on a perdu et après, on attend les prochaines élections. » 

Lors de son séjour aux États-Unis, en 2000-2001, il constate que les Républicains ont la même démarche que la gauche française. Il admire également le pragmatisme de cette droite américaine qui forge, sans tabous, des coalitions pour gagner. 

Dans le champ de l'éducation

À son retour, celui qui travaillera un temps pour France 3 et BFM, après une expérience au sein de la chaîne CNN, abandonne le projet d’un mandat politique pour investir le champ de l’éducation. Le responsable de 49 ans s’estime plus utile à la cause, à l’IFP, qui dispense des formations où le fond compte autant que la forme, la théorie autant que la pratique. Ces formations intensives se déroulent en soirées ou lors de week-ends de séminaires, à thèmes… Une école de journalisme a été créée au sein de l’institut, en 2018.

Indépendance financière

L’établissement, qui se veut « indépendant des partis », s’appuie sur 400 enseignants et intervenants dont le logiciel intellectuel est proche des courants de la droite : conservateurs, libéraux et souverainistes. Les mêmes courants irriguent les milliers de donateurs de l’institut - qui ne reçoit aucune subvention publique, « par indépendance financière inscrite dans les statuts » - et les étudiants venant de l’UDI, du RN, des LR, de Reconquête… « L’IPF est le seul à être le carrefour de rencontres intellectuelles, politiques… Ici, ils peuvent se côtoyer, se former ensemble, discuter et les choses se dédramatisent. Ils peuvent développer cet esprit de coalition, faire sauter le verrou chiraquien. » 

Convergence des idées

L’ancien patron du RPR et président de la République avait consolidé le cordon sanitaire politique, inhibant toute velléité de rapprochement avec le Front national, placé notamment sous le sceau de la faute morale. Preuve que la digue recule, la convergence des droites a été amorcée autour de thèmes longtemps confinés aux extrêmes, comme les questions identitaires et de genre, l’immigration, la religion, la sécurité…

Depuis la Manif pour tous

Alexandre Pesey a senti le vent tourner, à partir de la Manif pour tous, opposée au mariage homosexuel. Par ailleurs, il signale deux personnes qui ont fortement contribué « à déverrouiller » certains esprits. Éric Zemmour, lorsqu’il était chroniqueur sur France 2, et la journaliste Charlotte d’Ornellas, passée par les bancs de l’école, qui se veut aussi une plateforme de réseau pour ses élèves.

Du terrain à labourer

L’influence s’est accentuée avec l’avènement des réseaux sociaux et « l’arrivée de nouveaux patrons de médias », poursuit le responsable, faisant référence à Vincent Bolloré. L’IFP, qui a formé 3.200 personnes depuis ses débuts, a vu ses effectifs croître significativement. L’entrepreneur garde les pieds sur terre. Il reste tant à labourer, estime-t-il, pour transformer cette victoire des idées en un accord d’appareils. Alexandre Pesey mise, pour cela, sur le temps long, propre au monde politique et agricole. 

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