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Revenu universel : l’étude qui ébranle les convictions des progressistes

Le 22 juillet, le monde académique et l’univers de la technologie se sont retrouvés pour commenter les résultats d’une expérimentation grandeur nature totalement inédite. Le prestigieux National Bureau of Economic Research a mis en ligne une étude détaillant les impacts du revenu universel, autrement dit un transfert monétaire sans conditions.

Concrètement, les chercheurs ont donné 1 000 dollars par mois pendant trois ans à 1 000 personnes à faible revenu, dans l’Illinois et au Texas. Ils ont également créé un groupe témoin de 2 000 personnes qui n’ont, elles, reçu que 50 dollars par mois. Les participants disposaient d’une application mobile personnalisée qui a permis d’étudier leur utilisation de cette somme. Ces derniers avaient accepté la transmission de leurs relevés bancaires, de leurs dossiers médicaux et même des résultats de leurs prises de sang régulières. Le montant, substantiel, de 12 000 dollars par an représentait une augmentation de 40 % du revenu du ménage et il n’était pas imposable. C’est la première véritable étude de ce type car les expérimentations précédentes, notamment en Finlande en 2017-2018, relevaient de transferts monétaires plus modestes (560 euros), en substitution d’allocations.

Plus de loisirs, moins de travail

Les conclusions de l’étude sont sans appel. Le programme a entraîné une diminution de 2 points de pourcentage de la participation au marché du travail des heureux bénéficiaires et une réduction de 1,3 à 1,4 heure par semaine des horaires de travail, les partenaires des participants réduisant leur activité professionnelle d’un montant comparable. Le temps libéré n’a pas été compensé par d’autres activités productives mais par plus de temps consacré aux loisirs. Aucun impact n’a été recensé sur la qualité de l’emploi. L’investissement dans le capital humain n’a pas significativement augmenté, pour les adultes comme leurs enfants.

Seul fait notable, les personnes entre 20 et 30 ans bénéficiant du transfert ont vu leurs inscriptions dans l’enseignement supérieur augmenter de 2 %. L’argent a généré des bénéfices majeurs en termes de stress et de santé mentale au cours de la première année mais cet effet s’est estompé dès l’année suivante, l’insécurité alimentaire suivant la même trajectoire. La consommation d’alcool et d’analgésiques a quant à elle augmenté.

Une utopie en vogue dans la tech

Cette étude est un coup de massue pour les défenseurs du revenu universel, notamment chez les progressistes qui en ont fait le porte-étendard de la lutte contre les inégalités. De nombreux commentaires n’ont pas manqué de tracer le parallèle avec les importantes allocations distribuées sans conditions pendant la période Covid aux Etats-Unis, pays jusqu’alors peu habitué aux amortisseurs sociaux, et qui avaient entraîné de forts mouvements sur le marché du travail, la fameuse "grande démission".

Le revenu universel est également très populaire parmi les entrepreneurs de la tech. Il faut souligner que le projet porté par Open Research, un laboratoire de recherche associé à OpenAI, a coûté 45 millions de dollars. C’est Sam Altman qui en a financé la majeure partie, poussé par la conviction que les progrès de l’intelligence artificielle et de la robotique conduiront à une vague de destruction d’emplois. Conviction qui l’a également incité à créer le projet Tools for Humanity qui s’est donné pour mission de résoudre l’épineuse question du revenu universel, autrement dit d’organiser la redistribution de la richesse en dehors du contrôle des Etats-nations, directement aux individus, en recourant à l’infrastructure décentralisée de la blockchain, comme nous le présentions dans une chronique il y a quelque temps.

Le traitement médiatique de l’étude est intéressant. Le consensus parmi les universitaires est que les résultats de l’étude sont mitigés et décevants. Pourtant, la plupart des articles de presse, de Forbes à Bloomberg en passant par Vox, NPR ou Quart, exposent les résultats sur un ton positif et ignorent les éléments négatifs. D’autres médias, qui ont beaucoup écrit sur le revenu universel, tels que le New York Times ou le Washington Post, ont ignoré l’histoire alors que ce dernier journal a couvert la publication, le même jour, d’une autre étude beaucoup plus étroite sur le revenu universel qui concluait à une réduction de 27 % des urgences hospitalières pour les récipiendaires.

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