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Les 80 ans de la libération de Montluçon : cinq jours de combats dans la ville

Les 80 ans de la libération de Montluçon : cinq jours de combats dans la ville

Le 25 août 1944, Montluçon est libérée du joug allemand. Après cinq jours de combats, l’occupant s’enfuit de la caserne Richemont. Une cinquantaine de morts est à déplorer parmi les résistants et les civiles.

"L’Allier a été libéré par le seul engagement de ses fils. Ceci vaut la peine d’être noté". Dans une plaquette publiée à l’occasion du 50e anniversaire de la libération de Montluçon, Georges Rougeron, l’une des figures locales de la Résistance, donne le ton.

La cité des bords du Cher, occupée depuis novembre 1942 par les troupes allemandes, doit son salut aux FFI, FTP, Milices Patriotiques, Guérilleros espagnols… "La ville a donné l’exemple d’une libération obtenue sans attendre l’évacuation de l’ennemi", commente le général Émile Mairal, chef du maquis Michel.

Le 19 août 1944, veille du début des hostilités, un "conseil de guerre" se réunit à Hérisson. L’état-major des FFI Ouest-Allier, sous les ordres du commandant Fabre, décide de mener une opération contre la garnison allemande stationnée à Montluçon.

Celle-ci, installée à la caserne Richemont, est constituée d’environ 800 hommes. Elle comprend le 163e bataillon du Verbïndungsstab (état-major de liaison), la feldgendarmerie (activité de surveillance du territoire) et quelques unités tactiques de SS.

De leur côté, les Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) de la région montluçonnaise représentent entre 1.000 et 1.500 hommes. Ces troupes, munies d’un armement léger et de peu de munitions, sont principalement issues de divers maquis du bourbonnais.

Les combats vont durer cinq jours du 20 au 24 août jusqu’à la libération de la ville le 25. Et faire près d’une cinquantaine de morts parmi les résistants et les civils.

Dimanche 20 août

9 heures du matin. Les premières voitures des FFI arborant le drapeau tricolore font leur entrée dans la ville. Elles viennent de toutes les directions "au milieu des applaudissements de la population", témoignent Armand Gourbeix et Louis Micheau dans Montluçon sous la botte allemande, un livre écrit quelques mois seulement après la libération.

Des officiers de la garnison allemande passant sur le boulevard de Courtais, toujours en calèche par économie d'essence.

Les assaillants parient sur une capitulation de la garnison allemande "comme cela avait été le cas dans plusieurs villes", précise l’historien André Touret, dans Montluçon 1940-1944 la mémoire retrouvée. Il n’en sera rien. La première phase consiste à occuper les hauteurs à l’est et à l’ouest de la ville.

La deuxième, retardée par les négociations menées avec l’occupant, se traduit par la prise en mains des édifices stratégiques : la sous-préfecture, l’hôtel de ville, le commissariat de police, la poste, la gare SNCF… Vers 16 h 30, une alerte aérienne est sonnée. Elle sera vite levée.

Des blindés américains s’approchent à vive allure de Montluçon. Une fausse nouvelle. Quelques rafales de mitraillettes sont signalées autour de la caserne.

Vers 22 h 30, le bruit du combat prit une telle ampleur que l’on put croire venue l’heure de l’assaut de la caserne.

Au contraire, une colonne de camions allemands, venue de Moulins, pénètre dans la ville par les côtes de Châtelard malgré les FFI placés en embuscade.

Lundi 21 août

Au petit matin, le convoi allemand est stationné dans le quartier du Châtelet. Plusieurs civils qui "étaient sortis de leur maison pour se rendre à leur travail ou pour faire les commissions du ménage", dixit Armand Gourbeix et Louis Micheau, sont abattus.

En fin de matinée, le convoi réussit à se frayer un chemin par l’avenue Jules-Guesde et rejoint la caserne Richemont. Trois camions sont incendiés et plusieurs soldats sont tués. Dans l’après-midi, une pluie torrentielle s’abat sur la ville. Les Allemands en profitent pour effectuer plusieurs sorties. Ils incendient l’usine des Textiles et le quartier du Camp-Neuf.

Équipés d’une auto-blindé, les occupants portent également une attaque meurtrière au niveau du pont Saint-Pierre où ils sont attendus par les FFI. Le poste de surveillance du château de Bien-Assis est également pris pour cible. Cinq résistants sont découverts dans une maisonnette où ils s’étaient cachés. "Les boches les alignèrent devant une haie et les abattirent à bout portant d’une rafale de mitraillette", rapporte les auteurs de Montluçon sous la botte allemande.

Mardi 22 août

Après une nuit calme, les combattants FFI resserrent leur dispositif à moins de cent mètres de la caserne. Malgré la pluie, la grêle et un ravitaillement en munitions de plus en plus précaire, les résistants s’opposent victorieusement aux tentatives de sorties de l’ennemi. L’eau, le gaz et l’électricité sont coupés à la caserne.

Le lieutenant-colonel Borgsmanh obtient l’évacuation de ses soldats blessés vers l’hôpital de Montluçon. En fin de journée, Le Centre Républicain, daté du 23 août, titre sur "La marche à la libération".

Les opérations à Montluçon se déroulent normalement sans que la ville ait à en souffrir et ses habitants vivent les derniers jours de la guerre dans cette région, avec l’espoir le plus justifié.

Cette publication intervient au moment où les Allemands utilisent leurs mortiers pour bombarder les hauteurs de la ville où se trouvent les postes d’observation des FFI. Des unités SS sortent de la caserne pour incendier une centaine de maisons de la rue des Goncourt. Environ 700 personnes sont évacuées de leurs maisons par la force.

Mercredi 23 août

C’est une journée assez calme sur le plan des opérations militaires. Cependant, de nouvelles maisons sont incendiées à l’angle de l’avenue Jules-Guesde et de la rue Pierre-Curie. À 12 h 30, Radio Londres annonce la libération de Paris.

"Cette nouvelle sensationnelle produisit le plus heureux effet sur le moral des Montluçonnais qui apprirent également dans la journée la libération de Grenoble et de Marseille", disent Armand Gourbeix et Louis Micheau.

Jeudi 24 août

À 15 heures, un important convoi de camions allemands est signalé sur la route de Quinssaines. "Il s’agissait du deuxième bataillon du 19e régiment de SS Polizei en provenance de Guéret et fort de 800 hommes", avance l’historien André Touret.

En représailles, de nombreuses maisons ont été brûlées par les Allemands. Ici, à proximité de l'avenue Jules-Guesde.

Une bataille s’engage avec plusieurs groupes de FFI et fait plusieurs morts dans les deux camps. Le convoi réussit à gagner la caserne aux alentours de 17 heures. Il est là pour délivrer les assiégés de la garnison. L’évacuation peut commencer.

À l’abri d’une automobile blindée, le convoi quitte Montluçon avec soixante véhicules, quinze voitures légères, des camions et quatre ambulances remplies de blessés. À 20 h 30, il n’y a plus un seul allemand à Montluçon. Vers minuit, un groupe de FFI, agissant sous les ordres du capitaine Michel, investit la caserne pour constater qu’elle est vide. Le drapeau tricolore est hissé sur le fronton de la grille d’entrée.

Le message du 25 août. Dans l’après-midi, Le Centre Républicain, daté du 26 août, publie un communiqué de l’état-major de l’Allier. "Depuis dimanche, date de l’investissement de Montluçon, les FFI ont mené héroïquement le combat libérateur dans des conditions atmosphériques excessivement mauvaises. La vaillance de nos troupes, leur acharnement nous ont permis de mettre en échec des forces supérieures en nombre et en armements". 

Fabrice Redon

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