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Les Jeux olympiques, un tremplin en or pour les start-up tricolores

Les Jeux olympiques, un tremplin en or pour les start-up tricolores

De nombreuses jeunes pousses permettent en coulisses, et parfois dans le secret total, la tenue des Jeux olympiques et paralympiques de Paris. Elles attendent beaucoup des retombées de cet évènement planétaire.

Sur les devantures des boutiques, des buvettes ou à la télévision, leurs noms s’affichent en grosses lettres : Coca-Cola, Visa, Samsung… Ces partenaires officiels des Jeux olympiques, des géants bien connus du grand public, entendent tirer profit du moment. Ce ne sont pas les seuls. Dans l'ombre, une pléiade de start-up tricolores s’affairent sur l’évènement sportif international. Kinomap pilote ainsi la partie en ligne du Marathon pour Tous, organisé ce samedi 10 août. Et plusieurs jeunes pousses dans la sécurité, le transport ou le logement voient dans l’évènement planétaire un moyen de glaner une médaille d’or sur leurs marchés respectifs. Tour d’horizon.

Wintics veut démocratiser la vidéosurveillance algorithmique

Grâce à un logiciel d’analyse par intelligence artificielle, les caméras situées dans l’espace public peuvent désormais alerter sur des phénomènes particuliers : abandon de bagages, départ de feu, mouvements de foule… Forcément, la VSA (pour "vidéosurveillance algorithmique") intéresse les grands évènements tels que les Jeux olympiques, où le dispositif de sécurité est maximal. Wintics, une start-up de ce secteur encore naissant en a profité, remportant deux des quatre lots de l’appel d’offres mis en jeu pour la compétition. Les plus critiques : l’Ile-de-France, où se déroule le gros des épreuves, et le très surveillé secteur ferroviaire. "C’est une vitrine pour nous de gagner un marché comme celui-ci, car il y avait beaucoup de candidats et un processus d’appel d’offres très sélectif", témoigne Quentin Barenne, co-fondateur de l’entreprise. A la clé, également, un pécule pouvant aller jusqu'à deux millions d’euros, selon les prestations utilisées par les services de sécurité et forces de l’ordre.

Et si tout se passe bien, une somme plus importante dans les prochaines années. Car cette phase de test, menée au-delà des Jeux jusqu’en mars 2025, pourrait déboucher sur une loi encadrant définitivement la pratique en France. Jusqu’ici, la "VSA" se déployait à bas bruit dans des municipalités qui opéraient en zone grise. L’activité générerait ainsi environ 50 millions d’euros de chiffre d’affaires par an dans l’Hexagone. Mais elle devrait croître une fois légalisée. Outre Wintics, des jeunes pousses comme Videtics ou Chapsvision, qui se partagent les autres lots des JO, sont en embuscade. Reste à convaincre. Des associations de défense des droits en ligne comme la Quadrature du Net s’inquiètent du caractère intrusif de la technologie - porte d’entrée selon elles vers l’utilisation de la reconnaissance faciale et biométrique - et multiplient les recours contre son déploiement. Quentin Barenne assure que ces techniques ne sont pas utilisées, ni aux JO, ni ailleurs. "Notre solution est un bon moyen de faire valoir l’IA à la française, éthique et fiable", vante-t-il. Le retour d’expérience des JO est attendu d’ici l’année prochaine.

Le marathonien Kinomap… et les autres

Comme pour la cérémonie d’ouverture en extérieur, le dispositif est unique en son genre lors d’une quinzaine olympique. Dans la nuit du samedi 10 août, le Marathon pour Tous réunira 24 024 coureurs amateurs, qui suivront en petite foulée le même circuit que les athlètes officiels. Face aux nombres de déçus - plus de 650 000 demandes d’inscriptions - l’organisation a souhaité prolonger l’expérience en ligne. Une start-up s’est engouffrée dans la brèche : le spécialiste de l’entraînement d’intérieur Kinomap. "Via notre application, il y aura la possibilité de participer à distance chez soi sur son propre matériel, comme un tapis de course, un rameur ou un vélo d’appartement, ou bien en allant dans une salle de sport Fitness Park où se trouve ce type d’équipement. Tout le trajet a été filmé, annoté et même commenté avec des explications historiques sur les bâtiments que l’on croise", indique Philippe Moity, le patron de l’entreprise. Ce dernier espère un million de participants derrière les écrans. Et pourquoi pas, dans le lot, quelques nouveaux adhérents à son appli, qui en compte 2,5 millions à travers le monde ? "Difficile à dire, tempère-t-il. L’entraînement indoor [NDLR : en intérieur] fonctionne mieux en automne et en hiver, et non lors de la saison estivale. En revanche, on s’attend à de belles retombées en termes de notoriété vis-à-vis de nos partenaires et des fabricants d’équipements sportifs. On gagne ici un statut prestigieux en étant affilié aux JO." Philippe Moity a investi pour cela. Il s’agit de la seule start-up française dans le domaine du sport sous licence officielle. Un coût, que l’entrepreneur garde pour lui.

En plus de Kinomap, "pas moins de 16 autres start-up tricolores opèrent en coulisses", informe Omar El Zayat, directeur de l’innovation pour Paris 2024. Certaines proposent des solutions d’audio-description, des guides pour comprendre les règles de chaque sport ou encore des tablettes tactiles afin que les mal-voyants suivent en direct une rencontre de football ou de rugby. Mais le silence leur est pour le moment imposé. "Nous ne sommes pas partenaires officiels, ni produit sous licence. Dès lors, même si nous aimerions beaucoup communiquer, nous ne pouvons pas en dire plus sur notre participation. La promotion de notre entreprise ne pourra avoir lieu qu’après la compétition", confirme le fondateur d’une start-up, interrogé par L’Express. Sans regret néanmoins. "C’est un évènement qui demande beaucoup de rigueur, qui se prépare de manière très professionnelle, et qui nécessite une maturité technique importante. Pour une très jeune entreprise, c’est un gap de professionnalisme énorme", précise-t-il.

Urbanloop et ses capsules futuristes

De petites capsules bleues, pouvant accueillir jusqu’à deux personnes, et reliant un parking et la fan zone du vélodrome olympique. A Saint-Quentin-en-Yvelines, où depuis le lundi 5 août se déroulent les épreuves de cyclisme sur piste, les spectateurs peuvent prendre un mode de transport en commun unique en son genre : l’Urbanloop. De loin, l’Urbanloop ressemble à une sorte de tram, une petite capsule roulant sur des rails. Mais il y a des différences fondamentales. "Les capsules sont autonomes : il n’y a pas de chauffeur, pas de batterie, elles fonctionnent de manière 100 % électrique, et comme elles sont très légères, on a le record du monde de la plus faible consommation électrique sur transport", explique Noémie Bercoff, la directrice générale d’Urbanloop, jointe par L’Express.

Le transport est actuellement testé à Saint-Quentin-en-Yvelines, dans le cadre des Jeux olympiques.
Le transport est actuellement testé à Saint-Quentin-en-Yvelines, dans le cadre des Jeux olympiques.

La liste des avantages ne s’arrête pas là : l’Urbanloop est "un transport silencieux, léger, facile à installer, et peu coûteux." L’ambition de l’entreprise est grande : persuader que ces capsules représentent le futur des transports en commun, sur des trajets de proximité, ou pour les derniers kilomètres. Et grâce aux JO et aux 2 km de pistes installés, elle bénéficie d’un coup de pouce et d’une exposition indéniable. "On a des retours très positifs d’un grand nombre des usagers", indique la directrice. Depuis le début de la compétition, entre cinq et dix nouveaux clients potentiels ont contacté l'entreprise, précise-t-elle. Conclusion ? "Les JO, pour nous, c’est entièrement positif".

Inpulse, l’IA au service des restaurants

Il n’y a pas que le secteur des transports, de la surveillance ou encore de l’équipement sportif qui tire son épingle du jeu grâce aux JO : la foodtech, ce secteur qui veut révolutionner la restauration avec la technologie, vit aussi un été intense. Inpulse, qui met au point des outils pour aider les chaînes de restaurants à mieux gérer leurs stocks et réduire le gaspillage alimentaire avec de l’intelligence artificielle, peut le confirmer." On prévoit la fréquentation des points de vente grâce à de très nombreuses données externes", explique Brice Konda, le PDG et cofondateur d’Inpulse. Le logiciel prend ainsi en compte les conditions météorologiques, les jours de la semaine, ou, particulièrement intéressant en ce moment, la proximité de compétitions sportives.

"Il y avait de l'anxiété chez les restaurateurs avant les JO, notamment au sujet de l’arrivée des touristes, et de la gestion des stocks : ils voulaient échapper aux ruptures, mais aussi éviter de trop remplir les frigos", raconte Brice Konda. Ce dernier précise qu'Inpulse a reçu beaucoup de demandes de restaurateurs parisiens avant les Jeux. "En particulier, pour un outil de prévision de fréquentation en fonction de tous ces phénomènes extérieurs." Résultat ? "Les clients ont gagné 2 à 5 points de marge et beaucoup réduit le gaspillage alimentaire, assure avec fierté le directeur, évoquant une réduction de 70 % du gaspillage sur les produits de la mer pour certains restaurants de sushis.

Host & Fly, la conciergerie numérique qui profite du boom de Airbnb

Qu’en est-il pour ceux pressentis comme les grands gagnants de ces JO : Airbnb et tout le secteur de la location à courte durée ? Pour Host & Fly, le bilan est à nuancer. L’entreprise, spécialisée dans la conciergerie, s’occupe de la gestion d’appartements mis en location par leurs propriétaires. Créations des annonces, prises de rendez-vous pour le ménage, récupération des clés par les voyageurs… les concierges d’Host & Fly s’occupent de tout, résume Quentin Brackers de Hugo, PDG de la start-up. "On gère 3 000 logements en France, dont 1 500 à Paris ou en région parisienne. L’année dernière, on en avait 800 à Paris, et 1 200 sur le reste de la France", énumère-t-il. Une hausse de taille qu'il attribue aux JO : "Historiquement, on avait 200 demandes de propriétaires par mois, qui voulaient mettre leur logement à Paris. On est passé à 1 000 par mois entre octobre 2023 et avril de cette année".

Le fameux "effet JO", boosté par des "articles de presse tapageurs sur les prix de location envisagés", parfaitement faramineux, selon le PDG. Or, ces prévisions ne se sont pas tout à fait réalisées. "Ça a été problématique pour louer certains appartements, il y a eu tellement d’offres que les taux d’occupation sont en deçà des prévisions, et les prix aussi", pointe-t-il. A Paris, le taux d’occupation de ces appartements est finalement de 55 %, contre 65 % l’an dernier. Même chose pour les prix : "beaucoup de gens tablaient sur une multiplication par deux". A l’arrivée, les prix ont "seulement" bondi de 40 % par rapport à 2023. Le bilan pour ces JO serait-il en demi-teinte pour le secteur ? "Il y a tout de même autour de 30 % de croissance de chiffre d'affaires sur Paris pendant les dates des JO", observe Quentin Brackers de Hugo, qui juge le bilan in fine équilibré et les perspectives pour le futur bonnes. "Beaucoup de propriétaires se sont lancés. On espère qu’ils continueront. Les JO ont fait la publicité de Paris, cela pourrait avoir un impact positif pendant les 24 prochains mois, comme cela a été le cas après les JO de Londres."

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