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Vestiges néolithiques à Culhat : les fouilles participatives ont commencé

Dans un champ d’apparence ordinaire, non loin du petit bourg de Culhat, s’affairent depuis fin juillet et pour quatre semaines une archéologue, des étudiants et des bénévoles. Casquettes sur la tête, truelles et balayettes à la main, ils recherchent avec minutie des indices du passé. Plus précisément, des éléments sur un bâtiment datant du néolithique final, c’est-à-dire entre 3.000 et 2.200 avant notre ère. Un édifice monumental qui recèle des informations inédites sur les populations vivant en Auvergne à cette époque-là.

Des trous de poteaux inattendus

Les premiers jours, une pelle mécanique a retiré les couches supérieures de la terre, sur environ 150 m2. C’est la zone de fouilles. Un large rectangle qui correspond pourtant à une petite zone de l’immense bâtiment de 70 mètres de long. Petite, mais stratégique. Par rapport au cliché qui avait été fait du ciel, de nouvelles informations ont déjà surgi.

"Tant qu’on n’avait pas dégagé, on ne pouvait pas savoir ce qu’il y avait réellement. On va pouvoir corriger notre plan. On a plusieurs poteaux qui n’étaient pas prévus, constate Nina Parisot, l’archéologue responsable des fouilles. Soit la construction est plus complexe, soit des poteaux ont été rajoutés pour rénover, renforcer la charpente, soit il y a une autre construction, plus ancienne ou plus récente."

Autant d’hypothèses que l’équipe devra approfondir dans la suite de ses missions.

Tout sera tamisé

Le premier nettoyage du site laisse donc entrevoir des cercles correspondant aux trous où étaient plantés des poteaux de bois supportant la structure et des tranchées de fondations de ses murs.

Au premier plan, un trou de poteau.Là aussi, on aperçoit les traces des trous de poteaux.Ici, on voit la tranchée où reposait le mur du bâtiment.

Ensuite, les chercheurs s’aideront d’un drone pour prendre des photos aériennes puis creuseront dans ces trous et ces tranchées. Tout le contenu sera récupéré et tamisé. À la recherche de tout petits éléments ayant survécu à une société qui n’avait ni l’écriture ni de métaux.

On recherche des arêtes de poisson par exemple ou des charbons, reprend la préhistorienne. À l’automne, je vais tout trier, à la pince à épiler.Nina Parisot, archéologue en charge des fouilles.

Les charbons seront envoyés à une anthracologue qui va identifier les essences des végétaux. Les poteaux étaient-ils en chêne ? Les murs en noisetier ? Il faut attendre ses conclusions pour peut-être le savoir ! "L’année dernière, grâce aux premiers sondages, l’anthracologue a détecté une espèce végétale qui n’existe plus aujourd’hui", rappelle Nina Parisot.

Un géoarchéologue est aussi missionné pour déterminer le relief des lieux il y a 5.000 ans. Et à l’automne, une équipe du CNRS sillonnera le terrain avec une machine en quête d’un éventuel village alentour.

Une reconstitution du bâtiment en 3D ?

Un des objectifs des fouilles de cet été, c’est de comprendre à quoi servait ce bâtiment monumental, quelles activités il abritait, et dater plus précisément son existence.

Ensuite, une reconstitution en 3D ou une maquette pourront par exemple être faites. La vulgarisation de ces recherches, à laquelle tient beaucoup l’archéologue, plaît aussi à la municipalité de Culhat.

"Le lieu pourrait devenir un site éducatif pour les écoles", imagine Gilles Bergami, le maire. "C’est l’occasion de créer un noyau culturel autour du néolithique, avec des visites du site, des brochures, des conférences, poursuit Patrick Giraud, son adjoint. Ces fouilles rendent Culhat un peu plus visible sur la carte de France et même d’Auvergne. Les retombées peuvent être intéressantes."

Cagnotte en ligne

Dans un premier temps, la mairie soutient déjà le chantier en cours. Aux subventions de la Drac et du Département, la petite commune ajoute son aide logistique et a lancé sur son site une cagnotte participative. "Ces dons privés nous apporteront des moyens supplémentaires pour les recherches post-fouilles, illustre la néolithicienne, par exemple des datations."

Deux nouvelles campagnes auront lieu en 2025 et 2026.

Durant la dernière semaine de recherches, à partir du 19 août, les personnes qui le souhaitent pourront visiter le site des fouilles. Contacter la mairie au 04.73.70.23.69 ou mairie@culhat.fr.

Des fouilles ouvertes aux bénévoles

Nina Parisot avait tenu à donner la possibilité de fouiller à des bénévoles. "Entre 150 et 200 personnes m’ont contactée !", rapporte-t-elle. Au final, une vingtaine de novices participent à cette campagne. "J’explique les enjeux scientifiques, le contexte de l’époque et je leur montre comment on détoure, on nettoie, on tamise", détaille-t-elle. À la quinzaine d’étudiants aussi, il a fallu "montrer comment on fouille en préhistoire. Il n’y a pas énormément de fouilles néolithiques sur l’ensemble de la France."

Hicham Douma, habitant de Culhat, a tout de suite candidaté pour participer aux fouilles. Ce chef d’équipe dans la logistique aurait rêvé d’être archéologue. "J’ai toujours aimé ça, depuis tout petit et je n’ai jamais eu l’occasion de mettre un pied dedans." Ici, il a appris comment "gratter la terre" et apprécie les leçons d’Histoire glanées par les personnes qui l’entourent. C’est une semaine de vacances originale et émouvante. Il est reconnaissant de "pouvoir fouiller sans avoir fait d’études et surtout, à côté de chez soi !"

Étudiants

Killian Ayten va entrer en licence 1, à Clermont. "L’archéologie a toujours été un coup de cœur mais le niveau des études m’avait freiné. Alors j’en ai fait d’autres, mais qui ne m’ont pas plu." Il a donc décidé de suivre son rêve de petit garçon, avec l’ambition de devenir égyptologue. Il fait son premier stage à Culhat "pour toucher à tous types d’époques".

Justine Dubouchet, qui entre en master 1, est plus intéressée par l’Antiquité grecque. Mais ce site néolithique trouve aussi son intérêt. "En archéologie, ce qui est passionnant, c’est de découvrir d’où l’humain vient", souligne-t-elle, ébahie à l’idée que "des gens, qui n’avaient pas les mêmes moyens que nous, aient fait un aussi gros bâtiment."

Alice Chevrier

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